Vendredi 16 octobre, la police retrouvait le corps sans vie de Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie à Conflans-Sainte-Honorine. Tour d’horizon de la presse allemande sur l’attentat.
Retour sur les faits
Vendredi 16 octobre à 17 h, la police retrouve le corps de Samuel Paty décapité. A côté du corps, le meurtrier, visiblement agité, s’enfuit. La police le poursuit et il est finalement abattu après avoir menacé la police avec son arme. L’assaillant, âgé de 18 ans, avait revendiqué son geste sur twitter en s’adressant à Emmanuel Macron. Dans son tweet il explique que Samuel Paty devait mourir pour avoir montré à ses élèves des caricatures du prophète Mahomet dans le cadre d’un cours sur la liberté d’expression.
Qui était l’agresseur ?
Le meurtrier, Abdoullakh Abouyezidvitch, d’origine tchéchène est né à Moscou en 2002 et avait le statut de réfugié comme ses parents. Il n’était pas un élève de Samuel Paty, il n’était même pas inscrit dans le collège du Bois d'Aulne où enseignait le professeur ni dans un lycée voisin. Il n’était pas non plus connu des services secrets. On soupçonne l’assaillant d’avoir été en lien avec un parent d’élève du lycée de Samuel Paty qui se serait plaint sur les réseaux quelques jours avant l’assassinat du cours du professeur sur la liberté d’expression. Les vidéos de ce parent, dont l’enfant n’était pas dans le cours de Samuel Paty, aurait fait monter la pression dans l’établissement quelques temps avant le tragique événement.
De la compassion à la solidarité dans les journaux allemands
Comme le soulignent le Spiegel et die Zeit, contrairement à l’Allemagne, la France a mis en place la séparation de l’église et de l’Etat. Cette différence culturelle donne à la presse allemande un regard extérieur sur l’attentat de ce vendredi. Globalement, dans les journaux allemands, c’est la compassion et la solidarité qui est au-devant de la scène.
Le Frankfurter Allgemeine Zeitung et le Münchner Merkur relèvent l’intervention de Heiko Maas, ministre allemand des Affaires étrangères, qui s’est exprimé sur twitter : « Nous ne devons jamais nous laisser intimider par la terreur, l'extrémisme et la violence ». Le journal relaye aussi les paroles de Ursula von der Leyen, femme politique allemande et présidente de la Commission européenne : « Mes pensées vont aussi aux enseignants, en France et dans toute l'Europe. Sans eux, il n'y a pas de citoyens. Sans eux, il n'y a pas de démocratie ».
Le Süddeutsche Zeitung, de son côté, titre un de ses articles « tué pour avoir enseigné la liberté ». Le journal allemand va même plus loin en prenant position face aux propos de Marine Le Pen : « La cheffe du parti d'extrême droite Rassemblement national exige que l'islamisme soit « expulsé de force de notre pays » - comme s'il n'était pas aussi un produit artisanal de la société française elle-même ».
La radio Deutschlandfunk Kultur, elle, a décidé de donner la parole au politologue Michael Koß. Spécialiste de l’institution politique comparée, il explique que l'école est l'institution centrale de la République en France et que la conception de l'État est différente de celle de l'Allemagne : « On ne devient pas français en naissant français, on devient français en apprenant la langue, en apprenant la culture. Et cela se passe dans un contexte strictement non religieux. L'institution qui crée les Français est l'école. Or, si une telle attaque est dirigée contre un enseignant qui a suivi ces idéaux républicains, il s'agit d'une attaque contre tout le monde ». « Il devient évident qu'un groupe ne perçoit plus l'école comme un lieu d'égalité » a ajouté Michael Koß.
En ce qui concerne le journal hebdomadaire Junge Freiheit, celui-ci relève les informations du ministère de l’Intérieur qui affirment que chaque mois, une attaque terroriste majeure est évitée. Face à cette situation alarmante, le journal analyse la position d’Emmanuel Macron dans son discours à Conflans : « Il avait l'air déterminé, mais aussi très impuissant ».
L'attentat de Paris soulève également la question de la sécurité en Allemagne
Enfin, devant cet attentat, die Deutsche Welle s’inquiète : « L'attentat de Paris soulève également la question de la sécurité en Allemagne ». Die Welt concluait déjà lors de l’attentat devant les portes de l’ancienne rédaction de Charlie Hebdo : « Bien plus de la moitié des attentats perpétrés en France depuis 2012 ont été perpétrés par des auteurs qui passaient jusqu'alors inaperçus et inconnus des services secrets. La nouvelle flambée de terrorisme (…) est la triste preuve que ce terrorisme opportuniste est plus difficile à combattre et malheureusement surtout inévitable. »