Édition internationale

CHYPRE – La réunification en danger


L'élection d'un président indépendantiste à la tête de la partie nord de Chypre n'est pas de bon augure pour la réunification de l'île scindée entre Grèce et Turquie. Ankara devrait jouer un rôle prépondérant dans la suite du dossier. Une Chypre réunie serait un grand pas en avant pour l'île mais surtout pour l'intégration de la Turquie à l'U.E

Dimanche dernier, Dervis Eroglu, fervent nationaliste, a été investi président de la République turque de Chypre-Nord (RTCN). L'indépendantiste a recueilli dès le premier tour 50,38% des voix, contre 42,85% pour le président sortant Mehmet Ali Talat. Ce dernier avait pourtant engagé des négociations depuis 19 mois avec le président chypriote (grec) Demetris Christofias dans le but de réunifier les deux parties de l'île, grecque et turque (AFP). L'élection de Dervis Eroglu fait donc craindre à un gel des négociations et à une montée du nationalisme chypriote turc.  

Petit rappel historique

En 1974, la garde nationale chypriote envisageant un rattachement avec la Grèce, renverse l'archevêque grec-orthodoxe Makarios, alors président de l'île méditerranéenne. Les militaires turcs débarquent dans le nord, officiellement pour protéger la minorité chypriote-turque (environ 20% de la population). Le gouvernement issu du coup d'Etat ne tient pas longtemps et la Turquie, la Grèce et le Royaume-Uni, garants de l'indépendance de l'île, reconnaissent l'existence de deux administrations autonomes, une au nord et l'autre au sud. L'armée turque prend alors le contrôle de 37% de Chypre. En 1983, est créée la République turque de Chypre du Nord (RTCN). Elle n'est cependant reconnue que par les autorités d'Ankara. En 2004, un référendum pour la réunification est organisé mais est rejeté par le sud de l'île, qui intègre la même année l'Union européenne. Malgré plusieurs tentatives de reprise de dialogue organisées par l'ONU et l'UE, ce n'est qu'il y a un peu plus d'un an que les négociations ont réellement repris.

Les négociations tombent à l'eau ?
La victoire de Dervis Eroglu à la présidentielle inquiète aujourd'hui la communauté internationale quant à l'avenir de ces pourparlers."L'élection de M. Eroglu est malheureuse, vu ses positions déclarées depuis longtemps contre une fédération et en faveur de l'établissement de deux Etats à Chypre", a estimé le porte-parole du gouvernement chypriote grec, Stefanos Stefanou. La Commission européenne a plaidé pour que des négociations se poursuivent"dans un esprit constructif"."La chose importante c'est que les négociations sont conduites sous le patronage des Nations unies sur des bases définies par des résolutions du Conseil de sécurité et acceptées par les deux parties", a précisé le porte-parole de l'ONU, Martin Nersirky.

L'avenir de Chypre ? et de la Turquie !
Le président fraîchement élu a affirmé dimanche :"Personne ne doit penser que je quitterai la table de négociations (...) le processus de pourparlers va continuer". Son homologue du sud, Demetris Christofias, l'a rapidement appelé après l'annonce de sa victoire pour lui assurer de "sa disposition à le rencontrer à la table des négociations afin de poursuivre les efforts pour un règlement" du problème chypriote. Le président de RTCN, au delà de ses convictions personnelles, devrait suivre à la lettre les recommandations d'Ankara. La Turquie aimerait enfin clore le dossier chypriote qui pèse lourd dans son dossier de candidature à l'Union européenne. Les 35.000 soldats turcs toujours déployés dans le nord de Chypre sont mal vus par Bruxelles. Encore faudra-t-il attendre les résultats des élections législatives turques prévues en 2011. Celles-ci pourraient faire évoluer la position d'Ankara et par effet boule de neige, faire basculer l'avenir de Chypre.
Damien Bouhours (www.lepetitjournal.com) mardi 20 avril 2010

En savoir plus


Article du Nouvel Obs, Chronologie de Chypre
Notre article, TURQUIE ? Erdogan plaide pour l'adhésion à l'UE
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