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Chiang Mai a désormais une école française, rencontre avec sa proviseure

L’école française internationale Windfield de Chiang Mai a ouvert ses portes comme prévu début septembre, avec un peu moins d’une dizaine d’élèves. Rencontre avec la proviseure Géraldine Villenave

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Windfield International School Chiang Mai a fait sa toute première rentrée le 2 septembre 2024.
Écrit par Franck S.
Publié le 23 septembre 2024, mis à jour le 24 septembre 2024

Les premiers élèves de maternelle et de primaire de la toute nouvelle école française de Chiang Mai ont effectué leur rentrée sur les bords de la rivière Ping lundi 2 septembre, le même jour que les élèves de France. 

L'école française internationale Windfield de Chiang Mai a ouvert ses portes avec seulement huit élèves de cinq nationalités différentes, mais les effectifs devraient en principe au moins doubler d’ici le deuxième trimestre si l'on tient compte des inscriptions déjà enregistrées.

Dans cet établissement privé voulu et soutenu par l’ambassade de France, cette première rentrée se place sous le signe de l’innovation pédagogique. Un pari pour une école plus efficace mais aussi plus agréable à vivre pour tous, élèves et enseignants.

Pour l’heure, l'équipe de l'école est constituée de douze personnes dont trois institutrices. Cinq enfants sont scolarisés en maternelle et trois en primaire. L'enseignement est organisé en deux groupes puis individualisé. Les élèves changent d'institutrice au gré des matières.

Pour mieux en comprendre les contours, nous sommes allés rencontrer Géraldine Villenave, une proviseure apparemment heureuse.

 

Geraldine Villenave proviseure de l'ecole francaise de Chiang Mai
Géraldine Villenave est la proviseure de la nouvelle école française de Chiang Mai

 

Lepetitjournal.com : Quelques semaines après la rentrée, vous affichez un grand sourire…

Géraldine Villenave : Oui, parce que ce lancement correspond à mes attentes. Il les dépasse même dans certains domaines. Je ne vais pas vous dire que tout est simple, bien entendu. Mais on est chaque jour émerveillé de la vitesse à laquelle les élèves progressent, de leur bien-être, de la bienveillance qui existe entre eux. Les enfants se sentent déjà ici chez eux et leur sourire lorsqu’ils courent chaque matin vers l’école me procure un plaisir fou.
Les enseignantes, de leur côté, doivent travailler en collaboration et le font à merveille. Elles s’adaptent en permanence, malgré les questionnements qu’elles pouvaient avoir au départ.

Avant de parler du projet pédagogique et de la vie de l’école, peut-on revenir rapidement sur la genèse de cette aventure ?

Cela fait des années qu’on évoque la création d’une école française à Chiang Mai. Son absence était une forme d’anomalie. Les choses se sont concrétisées il y a environ un an mais un coup d’accélérateur décisif avait été donné en mars 2021, sous l’impulsion de l’ambassadeur de France de l’époque, Thierry Mathou, et du président de l’Alliance française de Chiang Mai. Il y avait ce terrain, offert à la France par le royaume de Thaïlande il y a bien longtemps, qui était disponible. Il est désormais loué à l’école. Puis une relation contractuelle avec un investisseur thaïlandais a donné naissance aux bâtiments qui nous accueillent désormais.

Pourquoi la présence d’une école française à Chiang Mai revêt-elle une telle importance ?

Il y avait, en 2021, 850 Français inscrits au registre des Français établis hors de France, à Chiang Mai. Il y en a aujourd’hui plus de 1 000, dont une soixantaine d’enfants de moins de dix ans. Sans compter les non-inscrits. Leur offrir la possibilité de rejoindre notre école est important car, sans elle, ces enfants sont souvent éloignés de la langue française en étant scolarisés dans des écoles thaïlandaises ou internationales.

Il me paraît également fondamental de participer au rayonnement de la France à l’étranger, de promouvoir l’éducation à la française.

En disant que ce terrain disponible a rencontré un besoin culturel et pédagogique au bon moment, on n’est pas loin de la vérité.

La créativité, la recherche, l’expérimentation sont pour moi des moteurs

A quel moment avez-vous rejoint le projet ?

J’en ai entendu parler au mois d’avril dernier. Je rentrais d’une expérience d’enseignante au Gabon, en primaire, et j’avais repris un poste dans mon Pays basque. Une grande partie de ma famille vit à l’étranger, notamment en Asie et en Afrique, où j’ai déjà eu des expériences. J’ai vu passer des articles et j’ai postulé à un appel à candidature.

Outre l’Asie, que vous connaissez et aimez, qu’est-ce qui vous a attirée dans ce projet ?

J’ai été attirée par un projet de petite école à construire, avec une ouverture sur l’innovation pédagogique. J’ai déjà géré une école naissante en Malaisie, j’ai créé une entreprise, j’ai travaillé dans la recherche et travaille à l’université.

La créativité, la recherche, l’expérimentation sont pour moi des moteurs. Nous ne partons cependant pas dans tous les sens, puisque nous suivons le programme solide de l’Éducation nationale française.

 

Batiments de la nouvelle ecole francaise de Chiang Mai
Là où il n'y avait qu’un terrain vague il y a un an seulement, se dresse aujourd’hui l’école flambant neuve Winfield International School Chiang Mai. Photo Franck S.

 

Je suis profondément convaincue qu’il peut être développé autrement, d’autant plus dans une petite école, au travers de l’innovation pédagogique. J’ai un ADN de chercheuse et je me dis que des portes s’ouvrent, que nous avons la liberté de montrer que le modèle français d’éducation est adaptable et capable d’innovation. Mes lectures et mon expérience m’ont appris que plusieurs formats d’enseignement sont possibles et c’est pour cela que je me suis intéressée au primaire.  J’ai besoin d’imaginer, de créer, d’expérimenter. J’ai vu dans ce projet la possibilité de le faire.

Je vais vous faire une confidence. Je m’ennuyais à l’école, en tant qu’élève, et je ne veux pas que cela arrive aux enfants qu’on nous confie.

Enseigner autrement, qu’est-ce que cela veut dire ?

Donner plus de place à l’élève. L’élève devient presque le maître. Ce n’est pas "tout est permis" évidemment, mais l’élève est rendu maître de son apprentissage, dans un cadre, au cœur d’une pédagogie active.

Je le redis, il y a plusieurs façons d’apprendre. Donner aux enfants différentes façons d’attraper le savoir c’est ce qu’on appelle la différenciation. Je peux résumer cette vision en quelques mots-clés : enfants, expérimentation, imagination, créativité, de nouveaux possibles, cadre sécurisant, développement, autonomie, jeu, curiosité.

 

Parents et enfants lors de la rentree scolaire a l'ecole francaise de Chiang Mai
Pour l’heure, l'équipe de l'école est constituée en tout de douze personnes dont trois institutrices. Photo Franck S.

 

Il n’y a pas de ligne droite toute tracée, la même pour tous les enfants. Pas plus que pour les adultes. Je suis passée par le management, le marketing, le recrutement, la gestion de dossiers complexes, la recherche, avant de me passionner pour l’enseignement au primaire J’en sais quelque chose…

Comment cela se traduit-il à l’école française internationale Windfield de Chiang Mai ?

L’école se construit et s’adapte tous les jours au profil des nouveaux élèves. Nous utilisons des méthodes explicites : mathématiques de Singapour, ateliers Montessori, lecture-compréhension MHF, orthographémic. Il y a une progression qui insiste longuement sur la manipulation du concret, avant de passer à l’abstraction, en utilisant le plus possible des objets naturels. Les objectifs de chaque enseignement doivent être clairement compris par l’élève qui est invité à verbaliser à toutes les étapes de ses apprentissages.

Pour soutenir cette approche pédagogique, l’organisation de l’école est aussi flexible que possible. Toujours dans le cadre, rappelons-le, des programmes et des objectifs de l’Education nationale française.


Les enfants ont une envie d’apprendre naturelle

Vous avez démarré l’année avec huit élèves de cinq nationalités. Ce qui est possible en tout petit comité, avec un groupe maternelle et un groupe primaire, le sera-t-il en grandissant ?

Oui parce que nous construisons le présent en regardant vers l’avenir. Le multilinguisme (les élèves de tous les niveaux reçoivent un enseignement et sont accompagnés, selon les moments de la journée, en français, en anglais ou en thaï), le multiculturalisme, le mixage des générations d’élèves, le bien-être et la pédagogie active demeureront nos valeurs centrales.

Nos fondations seront construites solidement selon ces principes. Il n’y a pas de raison qu’elle bouge.

Dans "école française internationale", chaque mot a son importance. Si on part bien avec peu d’élèves, on peut grandir en maintenant notre philosophie.

 

Eleves en classe dans l'ecole francaise de Chiang Mai
L'école comptait seulement huit élèves le jour de la rentrée, mais les effectifs devraient au moins doubler d’ici le deuxième trimestre, selon la proviseure. Photo Franck S.

 

Cela dit, vous avez raison, c’est ici que la partie expérimentale du projet doit faire ses preuves. Nous allons tout faire pour conserver ce qui aura été mis en place avec les enseignants et nous espérons parvenir à maintenir cette dynamique pédagogique, même lorsque nous aurons la capacité d’ouvrir une puis deux classes par niveau.

La différenciation, la pédagogie de projet, l’évaluation positive, la pédagogie de l’écoute nous guideront toujours. Ainsi que la valorisation de l’erreur. L’erreur permet d’aller plus loin et d’y aller mieux.

Puisque Windfield s’adresse à tous les enfants de Chiang Mai, que voulez-vous dire aux parents pour qu’ils se tournent vers vous plutôt que vers une autre école internationale ?

Je souhaite leur dire que le cursus suivi ici est français mais multiculturel, pour l’ouverture d’esprit et l’apprentissage des langues. Lorsqu’on passe d’une langue à l’autre dès le plus jeune âge, la mécanique devient naturelle.

Je veux surtout insister sur notre priorité : il faut faire aimer l’école aux enfants. On y arrive en élaborant un accueil sur-mesure. Tous les élèves sont capables de progresser si on leur en donne les moyens et l’envie. Tous sont capables d’exprimer des compétences. 

Le mélange des âges, le multiniveau, permettent aux élèves de vivre l’école autrement. Les plus grands se sentent responsabilisés. Transmettre ce qu’ils savent les aide à approfondir leurs connaissances. Quant aux plus petits, ils sont stimulés. Ils veulent rattraper les grands. Les enfants sont toujours curieux et enthousiastes. C’est pour cela que j’aime tant travailler avec eux. Ils ont une envie d’apprendre naturelle.

Vous aimez bien mettre en avant, dans ce contexte, les neurosciences.

Sans s’appesantir, il s’agit tout simplement, pour moi, de la rencontre entre l’empirisme de grands pédagogues et la science. La science vient valider et enrichir leur vision. C’est un fait désormais scientifiquement validé, l’enfant apprend mieux quand il manipule, quand il est autonome, quand il se sent bien et en confiance.


L’homologation de l’école par l’AEFE sera la reconnaissance de notre offre pédagogique

Parlons un peu d’avenir. Quels sont vos objectifs à court, moyen et long terme ?

Vous l’avez rappelé, nous avons ouvert l’école avec huit élèves de cinq nationalités. Les effectifs doubleront, au moins, dès le mois de janvier, certaines familles ayant déjà inscrit leurs enfants à partir du deuxième trimestre.

Nous souhaitons au plus vite ouvrir une crèche parce que plus nous prenons les enfants jeunes plus tôt ils pourront évoluer dans le multilinguisme et le multiculturalisme que nous mettons en place à leur profit.

 

Eleves en classe dans l'ecole francaise de Chiang Mai
Le mélange des âges, le multiniveau, permettent aux élèves de vivre l’école autrement, souligne Géraldine Villenave. Photo Franck S.

 

Nous attendons également l’homologation de l’école par l’AEFE. Mais pour cela, il nous faut déjà avoir fait nos preuves sur cette première année scolaire. Cette homologation est fondamentale à plusieurs titres. Elle est la reconnaissance de notre offre pédagogique par l’organisme qui gère les écoles françaises à l’étranger. S’ensuit la possibilité pour les familles de se voir octroyer des bourses. Et pour les enfants, c’est la certitude d’accéder, sans examen d’entrée, à toutes les écoles AEFE réparties dans 159 pays dans le monde et aux écoles de l’Education nationale, pour ceux qui rentrent en France.

Nous espérons, dès que possible et dans un premier temps, ouvrir une classe par niveau, de la petite section au CM2, puis deux. Mais nous ne cherchons pas à développer l’école aux mille élèves.

Et après le CM2 ?

Dans un premier temps, nous aiderons au passage des tests Cambridge pour faciliter l’insertion des élèves dans les écoles internationales anglophones de Chiang Mai.

Nous réfléchissons également à la meilleure façon d’accompagner les élèves qui suivront les cours proposés par le CNED, grâce à l’appui de répétiteurs qualifiés, éventuellement dans le cadre de l’établissement, tant que des salles y seront disponibles.

Et ne nous interdisons pas de rêver. En cas de succès de l’école, un jour peut-être, un collège et un lycée pourraient voir le jour. Mais nous n’en sommes pas là…

Les frais d'inscription à l'Ecole Internationale Windfield de Chiang Mai sont fixés à 20.000 THB, les frais administratifs à 10.000 THB, et les frais annuels de scolarité à 220.000 THB en maternelle et 235.000 THB en primaire. Pour en savoir plus vous pouvez vous rendre sur le site Internet de l'école https://windfield.ac.th/chiang-mai-campus/

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