Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 2

« Tout ça ne serait jamais arrivé sans Jacqueline Kennedy »

Julio A. Jeldres, The Royal House of Cambodia, livre, biographe officiel, Chilien, Siem Reap, CambodgeJulio A. Jeldres, The Royal House of Cambodia, livre, biographe officiel, Chilien, Siem Reap, Cambodge
Julio A. Jeldres, auteur de l'ouvrage « The Royal House of Cambodia » © Raphaël Ferry
Écrit par Raphaël FERRY
Publié le 5 février 2018, mis à jour le 6 février 2018

Vendredi 2 février a eu lieu, au Templation Angkor à Siem Reap, la première présentation - dédicace du livre « The Royal House of Cambodia » par son auteur Julio A. Jeldres, d’origine chilienne. Edité par The Sleuk Trith Institute, cet ouvrage de plus de trois cents pages - format à l’italienne ou paysage - est très richement illustré. Notre correspondant à Siem Reap a pu recueillir les propos de l'auteur et connaître son histoire singulière.

 

LePetitJournal.com Cambodge : Comment un Chilien devient-il le biographe de la famille royale du Cambodge ?

Julio A Jeldres : Tout ça, c'est grâce à Jacqueline Kennedy ! En novembre 1967, j'ai lu dans la presse chilienne qu’elle avait visité le Cambodge. J’avais déjà entendu parler du Vietnam mais jamais du Cambodge. Je me suis tout de suite piqué d'intérêt pour ce pays mais à Santiago il n’y avait aucune documentation. Alors je me suis rendu à l'Institut américain à Santiago où l’on m'a donné une copie de Life Magazine qui contait la visite de la Première dame au Royaume. 

Le magazine était richement illustré de photos d’elle tandis que d’autres montraient le roi auprès de son peuple. Sa popularité était frappante. Le dame de l’Institut m’a également donné l'adresse de la mission permanente du Cambodge auprès des Nations Unies à New York. C'était la plus proche représentation diplomatique du Cambodge de Santiago.

J’ai leur ai donc écrit une lettre, entièrement en castillan car c’était la seule langue que je parlais, pour obtenir plus d’informations sur le pays. Elle est restée sans réponse pendant quatre mois et m’est un peu sortie de la tête jusqu’au jour où en rentrant chez moi je trouve ma mère furieuse. A cette époque au Chili, le destinataire d’une lettre devait payer pour la recevoir et c’était assez cher. Ce n’était pas une lettre que j’avais reçue mais une bibliothèque complète transportée sur un camion que le roi Sihanouk lui-même m’avait fait parvenir du Cambodge !! Il y avait des livres dans toutes les langues, en français, en anglais, en russe ou en chinois, des films et des diapositives. L’envoi était accompagné d'une lettre du roi qui me faisait part de son contentement qu'un Chilien s'intéresse à son pays. J'ai appris le français pour pouvoir lui répondre.

 

Vous avez donc eu une correspondance directe avec le roi ?

Oui et j’ai, par la suite, créé un groupe qui s'appelait l'Union des Etudiants Amis du Cambodge au Chili. Nous animions des conférences et des expositions.

 

A ce moment-là, vous n'aviez pas encore mis les pieds au Cambodge ?

Non pas encore en effet. En 1969, l'Australie prit la décision d'ouvrir une ambassade au Chili. Le premier ambassadeur avait précédemment été en poste à Phnom Penh. Il entretenait de très bonne relation avec le roi. Avant son départ, le roi avait organisé un banquet d'adieu et l’avait prié de rentrer en contact avec un étudiant chilien amoureux du Cambodge une fois qu’il serait installé à Santiago. Ce qu’il fit. Il devint le président d’honneur de notre association et un ami de la famille. C’est grâce à lui que je suis parti étudier en Australie, que j’ai pu m’y installer et obtenir la nationalité australienne. 

Pendant ce temps le roi et moi continuions à échanger une correspondance même après le coup d’état du 18 mars, alors qu’il était exilé à Pékin. Chaque semaine je lui écrivais une revue de la presse australienne. Il me demandait souvent de répondre à des articles qu’il ne considérait pas justes.

Notre correspondance s’est interrompue trois ans durant la période Khmer Rouge. La dernière lettre que j’ai reçue fut datée de Pyongyang le 19 septembre 1975. Ce n’est qu’après l’invasion vietnamienne que Pékin autorisa le roi à recevoir le corps diplomatique. J’ai ainsi pu lui faire parvenir un message. Après quelques mois, il m’a demandé de lui traduire des textes en anglais car l’ensemble des membres de son secrétariat avait été tué. Je l’ai rencontré pour la première fois à Pyongyang. Il m’a reçu auprès de lui durant une vingtaine de jours. Il n’y avait autour de lui que la reine Monineath, son fils le roi  Sihamoni et quelque proches.

Plus tard, le roi m’a demandé de rejoindre Bangkok pour travailler aux bureaux locaux du Funicep. J’y étais en charge de l’information. Après plusieurs années, je suis venu travailler auprès de lui comme secrétaire privé à Pekin et à Pyongyang. J’ai occupé ce poste pendant douze ans jusqu’au jour où il fut nommé roi. Le 25 septembre 1993, il signa un décret me nommant biographe officiel. 

C’est ainsi que j’ai pu écrire un livre sur le palais royal, les mémoires du roi que j’ai traduites en anglais ainsi qu’un petit livre sorti en 2003 sur la famille royale.


Ce qui nous amène au livre que vous présentez aujourd’hui « The Royal House of Cambodia ».

C’est un livre qui présente toutes les ramifications de la famille royale cambodgienne. C’est le fruit de recherches que j’ai menées au Cambodge mais aussi en Australie et en France.

Mon livre a pour objectif de montrer à quel point les nouvelles générations de la famille royale sont impliquées dans les tissus économiques et culturels du Cambodge contemporain.

Contrairement aux grandes familles royales européennes ou thaïlandaises qui disposent de grandes fortunes, de services d’information ou encore de sites internet, ce n’est pas le cas de la famille royale cambodgienne. 

 

Avez-vous d’autres projets ?

Nous travaillons à la création d’une fondation dont l’objet sera de promouvoir les traditions royales. En effet, les nouvelles générations ne les connaissent pas. Les Cambodgiens sont attachés à leur monarchie et cela s’explique par une très longue histoire qui les unit. Nous voulons créer un centre de mémoire où la population pourra s’informer et se réapproprier ce qui leur appartient : leur culture.

 

The Royal House of Cambodia est disponible à Monument books à Siem Reap et à Phnom Penh.

Raphael Ferry
Publié le 5 février 2018, mis à jour le 6 février 2018

Flash infos