Alors qu’il est en exil en France, le Dr Hay Ly Eang, pharmacien et phytothérapeute, invente, dans les années 80, Tabastop, premier comprimé à mettre sous la langue pour arrêter de fumer, et Phytorel, préparation novatrice à l’époque basée sur la nutrithérapie, associant poudres de fruits sans sucre à des plantes médicinales. Une trentaine d’année plus tard, Confirel, l’entreprise phare du secteur agrobiologique qu’il a créée au Cambodge, a déjà mis au point une trentaine de nouveaux produits dérivés du sucre de palme de Kampong Speu et de Kampot, qu’elle commercialise sur le marché mondial. Rencontre avec un entrepreneur qui met sa créativité au service du développement rural du royaume.
Connaissez-vous le cornichon de Koh Sotin? Non sans doute. Pourtant le Dr Hay Ly Eang place ce condiment en très bonne place dans le panthéon des délices du Royaume où trônent parmi d’autres le poivre de Kampot, le riz rouge de Battambang ou le sucre de palme de Kampong Speu. « Dans le passé, les gens de Koh Sotin savaient préparer ce cornichon pour en faire un condiment extraordinaire et réputé dans tout le pays. Mais depuis, rien n’a été fait pour que cet authentique produit des terroirs khmers trouve le public de gourmets qu’il mérite, ici et partout dans le monde. Et c’est malheureusement le sort de beaucoup des richesses que nous offre notre merveilleuse terre cambodgienne », s’indigne le Dr Hay.
Pourtant, avec Confirel qu’il a lancée il y a une quinzaine d’années, celui qui est aussi le fondateur du laboratoire pharmaceutique PPM, numéro un au Cambodge, a montré que l’alliance des savoir-faire traditionnels et de l’innovation permet aux produits cambodgiens de côtoyer le meilleur de la gastronomie mondiale sur les plus grandes tables et dans les meilleurs épiceries.
Sans cesse créer des nouveautés
« Nous avons démarré avec le sucre de palme. Il y a quinze ans, ce sucre traditionnel fabriqué par les paysans était uniquement vendu sur les marchés locaux. Les grimpeurs tiraient aussi de la sève de palme un vin de piètre qualité sanitaire que les guides touristiques déconseillaient aux touristes », se souvient le Dr Hay. « Avec le concours du Cirad en France, nous sommes parvenus très rapidement à fabriquer un sucre de palme bio d’une exceptionnelle qualité, primé au Salon Natexpo à Paris en 2005. Ce succès a été la matrice de tous nos développements ultérieurs ».
Avec le sucre de palme et autres dérivés de la sève du palmier - vinaigres, vins et spiritueux, confiseries, Confirel produit et commercialise du poivre de Kampot qu’elle cultive dans ses plantations biologiques. Là encore l’entreprise ne se contente pas de tirer profit de ce grain considéré comme l’un des meilleurs poivres du monde. Suivant cette idée qu’il faut sans cesse créer des nouveautés répondant à la demande des consommateurs pour valoriser sous toutes ses formes le produit brut, Confirel a par exemple mis au point une gamme d’infusions aux inflorescences de poivre de Kampot aux vertus du bien-être reconnues et brevetées en France et dans plusieurs pays.
« Beaucoup de Cambodgiens jugent que rien de ce que produit notre pays n’est bon et portent aux nues tout ce qui vient de l’étranger. C’est triste et c’est faux ! », s’agace le Dr Hay. « Ce que nous faisons avec Confirel prouve le contraire. Mais cela marche parce que nous sommes exigeants et que nous nous battons ensemble avec tous les membres des filières sucre de Kampong Speu et poivre de Kampot pour que nos produits, dont nous avons obtenu, avec le soutien de l’AFD, qu’ils bénéficient d’une IGP, soient irréprochables».
Pour lui, c’est aux Cambodgiens eux-mêmes qu’il revient de défendre leurs produits et par la même occasion défendre leur emploi et leur économie, en étant sans concession avec ceux qui sapent les richesses des terroirs en trichant avec la qualité. Comme il revient aux producteurs du pays de se tenir à la pointe de l’innovation pour être à la hauteur de la demande mondiale en produits de terroirs authentiques, sains et respectueux de l’environnement et des hommes.