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Covid-19 : Le travail au quotidien des Français du Cambodge bouleversé

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Le docteur Julie Thongsavane dans son cabinet, à Phnom Penh. Photo fournie
Écrit par Thibault Bourru
Publié le 22 mars 2020, mis à jour le 24 mars 2020

Lepetitjournal.com Cambodge a posé à cinq Français de Phnom Penh la même question : « Votre quotidien au travail a-t-il changé depuis vendredi 13 mars et l’annonce des mesures prises par le gouvernement pour faire face à l’épidémie de COVID 19 ? » Ces mesure, entrées en vigueur au cours de la semaine, englobent la suspension des rassemblements religieux et des concerts, la fermeture temporaire des écoles, des karaokés, des boîtes de nuit, des cinémas et des musées. Les voyageurs étrangers en provenance de France, d’Italie, d’Espagne, d’Allemagne, des Etats-Unis et d’Iran ne sontplus autorisés à entrer sur le territoire cambodgien depuis mardi 17 mars. Les 5 Français interrogés travaillent dans des secteurs d’activités différents : la médecine, le tourisme, la restauration et l’éducation.

Julie Thongsavane, médecin généraliste : « Professionnellement mon quotidien a changé, on demande aux gens de rester chez eux au maximum. Lundi j’ai reçu une vingtaine de personnes au cabinet, comme à l’accoutumée, puis 15 personnes mardi, et 10 mercredi. J’ai mis en place un système de consultation en ligne par vidéo pour tous. Ceux qui le nécessitent peuvent m’appeler tout en prenant rendez-vous sur la plate-forme SabayCare. J’ai déjà procédé à trois consultations à distance depuis lundi. La première consultation était étrange, mais ce sentiment est vite passé. Je crois en l’utilité des réseaux sociaux. Lorsque j’étais généraliste à Paris j’utilisais déjà WhatsApp pour communiquer avec mes patients. Aujourd’hui nous avons passé un pas. La situation est totalement inédite, mais pour l’instant cela s’est très bien passé en vidéo avec trois patients. Si je dois ausculter, chose qu’on ne peut pas faire par visio-conférence, je leur fais savoir par ailleurs qu’ils peuvent venir me voir au cabinet, et dans ce cas là ils ne paieront le prix que d’une seule consultation. Cela peut me permettre de consulter des patients qui habitent très loin ou sont physiquement incapables de se déplacer jusqu’au cabinet. On doit s’adapter au contexte. Si le confinement devenait dans le futur partiel voire total je serai bien au cabinet pour m’occuper des patients, et nous continuerons ces consultations en ligne. A moment exceptionnel, consultations exceptionnelles. »

Charles, responsable marketing dans une agence de voyage à Phnom Penh : « Il y a eu une évolution dans notre façon de travailler depuis vendredi dernier. D’abord sur l’hygiène. Depuis l’explosion de l’épidémie en Chine, de nombreuses personnes au sein de notre équipe viennent au bureau avec un masque. Lorsque la Chine a pu calmer le phénomène contagieux et qu’il a commencé à se déplacer en Europe on a ressenti bizarrement une baisse dans les méthodes de précaution. En revanche, depuis vendredi, tout s’est vraiment accéléré. On prend notre température à notre arrivée au bureau, nous devons porter un masque lors des réunions en présentiel, que nous limitons d’ailleurs au maximum en utilisant Skype ou le téléphone, et enfin du gel hydroalcoolique a été placé sur le lieu de travail. C’est une bonne chose en soit que tout le monde soit conscient du risque et fasse en sorte de limiter une propagation éventuelle. Cela devient difficile également avec les partenaires à l’étranger par exemple. Nous devons nous assurer que toutes les informations que nous leur donnons sur la situation au Cambodge sont exactes. Le monde du tourisme est actuellement très touché par cette crise sanitaire que ce soient les hôtels, les agences de voyage, les guides, les événements organisés, etc. L'impact est énorme, il faudra du temps pour retrouver une situation normale. Je ne redoute pas un éventuel confinement à l’image de la France car je pense que c’est une bonne solution pour arrêter l’épidémie, mais je pense que beaucoup d’entreprises comme celle où je travaille ne sont pas prêtes techniquement pour que leurs employés fonctionnent totalement en télétravail. »

David, pizzaïolo à Phnom Penh : « J’ai ressenti des changements depuis vendredi 13 mars. Déjà dans ma vie personnelle, la ville s’est quelque peu vidée ou les gens restent chez eux. Habitant près d’Aeon 2 je le vois sur la route pour me rendre au travail en voiture. Bassac Lane, qui est habituellement une rue bondée, est totalement désertée en ce moment. La ville tourne au ralenti. Et professionnellement nous avons ressenti un impact sur notre chiffre d’affaire. Jusqu’à dimanche les affaires marchaient très bien, et depuis mardi les commandes ont baissé. Si l’on ne s’en tient qu’à mardi et mercredi le chiffre d’affaires à diminué de 40 voire 50%. Nous avions déjà ressenti une baisse depuis le départ de nombreux Chinois du territoire. Je ne suis pas inquiet, je suis propriétaire, si dans les jours ou les semaines à venir nous devons nous confiner partiellement ou totalement comme en France nous fermerons boutique en attendant et je continuerai de payer une partie du salaire de mes employés. »

Bruno Schell, professeur de français au lycée René Descartes de Phnom Penh : « Nous travaillons à distance depuis l’annonce de la fermeture des écoles. Nous utilisons des outils informatiques gratuits comme la suite Google. Nous avons pu nous préparer à ce changement de mode de travail durant les trois dernières semaines grâce à des formations organisées par le lycée. Cela demande évidemment un temps d’adaptation pour que tout le monde s’approprie les logiciels. Il faut également que les élèves disposent du matériel informatique adéquat. Le service informatique du lycée nous soutient d’ailleurs beaucoup dès que nous avons des questions. Depuis qu’on fonctionne de la sorte je trouve que la relation avec les élèves change progressivement. Certains se révèlent, peut-être car ils ressentent moins le regard des autres. Je me sens éloigné géographiquement mais en même temps plus proche de mes collègues. Nous échangeons beaucoup. J’ai l’impression que face à cette crise tout le monde au lycée travaille bien ensemble. »

Chloé, maîtresse d’école à l’École française internationale de Phnom Penh : « Tout a changé depuis que l’école a fermé. J’essaie de ne rien changer à mon rythme normal, je me lève à 6h00 et commence à travailler à 6h30 : je prépare les cours que j’envoie ensuite sur la plate-forme Seesaw. Mes élèves peuvent alors les récupérer et travailler de chez eux. Nous travaillons beaucoup sur la compréhension orale, je me sers par exemple des excellents reportages de France Info réalisés pour les enfants. Beaucoup de sites internets français ont par ailleurs ouvert leur contenu en cette période de crise sanitaire, cela rend la recherche plus intéressante. J’envoie aussi les leçons et les exercices de mathématiques, et des autres matières. Nous conseillons aux élèves et à leurs parents, à qui nous avons envoyé une fiche de recommandations, de se faire un emploi du temps pour étudier, sans oublier par exemple de faire un peu d’exercice. J’organise également, le lundi et le jeudi, une classe en direct sur la plate-forme Zoom pendant une demi-heure, afin que nos deux élèves qui sont rentrés en Europe puissent être présents. Nous avons eu notre première session jeudi, je leur ai demandé s’ils avaient des inquiétudes et si ce nouveau mode de travail se passait bien. Ils allaient très bien et n’étaient en aucun cas inquiets ! Cela permet de garder un contact visuel et de les rassurer si cette méthode ne leur sied pas. Je profite également de cette nouvelle façon de travailler pour tourner des vidéos courtes dans le but d’expliquer des notions que nous n’aurions pas vues en cours. Et lors de ces rendez-vous bihebdomadaires nous pouvons également discuter de cela. »

 

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Thibault Bourru
Publié le 22 mars 2020, mis à jour le 24 mars 2020

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