

La Cour internationale de justice (CIJ), plus haut organe judiciaire de l'ONU, doit départager lundi Thaïlande et Cambodgedans un différend sur un temple du XIe siècle qui pourrait raviver les tensions nationalistes entre les deux pays.
Le souvenir des affrontements autour du temple inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco, qui avaient fait des dizaines de morts et des dizaines de milliers de déplacés en février et avril 2011, est encore dans les mémoires des locaux.
Nettoyage de bunker, stockage de vêtements et de nourriture, les civils habitant à proximité du temple se préparent au pire à l'approche de l'arrêt, qui sera rendu lundi au Palais de la Paix, à La Haye, par la CIJ.
Quant aux soldats postés à proximité du temple, il leur a été demandé de rester en alerte, même si le renforcement des troupes en faction à cet endroit n'est pas à l'ordre du jour.
Le Premier ministre cambodgien Hun Sen a assuré jeudi après un entretien avec son homologue thaïlandaise Yingluck Shinawatra que les deux pays accepteraient le verdict, quel qu'il soit.
"J'appelle toute les forces armées qui remplissent leur devoir en protégeant la frontière à rester calme, à montrer de la retenue et à s'abstenir de toute activité qui pourrait provoquer des tensions ou affrontements", a déclaré Hun Sen à la télévision nationale.
L'atmosphère s'était réchauffée entre les deux pays après l'arrivée au pouvoir à l'été 2011 de Yingluck Shinawatra, soeur de l'ex-Premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, qui est un ami de Hun Sen.
Mais en janvier, le puissant chef de l'armée thaïlandaise Prayut Chan-O-Cha avait assuré que son pays pourrait ne pas respecter la future décision de la CIJ si elle était défavorable à la Thaïlande.
Le Cambodge avait déposé en avril 2011 une plainte demandant à la CIJ d'interpréter un arrêt rendu en 1962 lui octroyant la souveraineté sur le temple de Preah Vihear.
Si la Thaïlande ne conteste pas la souveraineté de son voisin du Sud sur le temple, les deux pays revendiquent une zone de 4,6 km2 en contrebas des ruines, dont Bangkok contrôle les principaux accès.
Perché en haut d'une falaise, le temple est beaucoup plus facile d'accès par la Thaïlande. L'accès par le Cambodge est tellement difficile que la place était d'ailleurs la dernière à être tombée aux mains des Khmers rouges dans les années 70.
Les habitants se préparent au pire
Un verdict défavorable à la Thaïlande fragiliserait un peu plus encore le gouvernement thaïlandais, qui doit déjà gérer des manifestations massives contre une loi d'amnistie controversée. Yingluck Shinawatra s'adressera à la nation à l'issue de la décision.
En avril, les censeurs thaïlandais avaient failli interdire un documentaire au sujet du différend frontalier car "son contenu pourrait causer des divisions dans les relations internationales" et "mettrait en danger la sécurité nationale".
"La plupart des villageois ont creusé des bunkers dans leurs maisons. Nous avons préparé de la nourriture et des vêtements", a indiqué Sok Chhoeun, un physicien de la province cambodgienne Oddar Meanchey.
Phumsarol Wittaya, directeur d'une école dans la province thaïlandaise de Si Sa Ket a pour sa part expliqué que lui et ses étudiants nettoyaient des bunkers au cas où des combats éclateraient. "Il y a 17 bunkers dans notre école, assez pour 626 élèves", a-t-il précisé.
"Il n'y a pas encore eu de mobilisation de troupes d'autres régions, mais il y a quelques jours, nous avons reçu l'ordre de ne pas quitter les lieux. Nous devons rester à notre base militaire et rester en alerte", a affirmé le soldat cambodgien Pen Chheng, basé à quelque kilomètres du temple.
Quant au colonel thaïlandais Prawit Hookaew, il assure que la frontière n'a pas été renforcée : "nous attendrons les ordres du gouvernement et du ministère de la Défense après le jugement".
Dépêche AFP lundi 11 novembre 2013
