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Les Koli, la communauté des pêcheurs de Mumbai

Des pêcheurs réparant leurs filets dans le Koliwada de Colaba à MumbaiDes pêcheurs réparant leurs filets dans le Koliwada de Colaba à Mumbai
Écrit par lepetitjournal.com Bombay
Publié le 16 février 2023, mis à jour le 19 décembre 2023

Les Koli sont d’abord une caste d’agriculteurs, probablement originaire du Gujarat et dispersée dans plusieurs États de l’Inde. Mais sur la côte de Konkan, bordant le Maharashtra et Goa, les Koli forment une communauté de pêcheurs bien établie, en particulier à Mumbai, où ils résident dans les « koliwadas », des villages de pêcheurs qu’on trouve, entre autres, à Worli, Colaba, Khar Danda, Versova ou Navi Mumbai.

 

Les bateaux de pêche à Colaba
Les bateaux de pêche près du marché aux poissons de Sassoon Docks à Colaba

 

 

Les koliwadas, des villages de pêcheurs à Mumbai

Mumbai compte environ 150 villages urbains reconnus comme tels. La majeure partie de ces quartiers sont des « gaothans », habités en général par la communauté des East Indians, les chrétiens de Bombay, agriculteurs à l’origine. Les autres, au nombre de 20 à 40 selon les estimations, sont des « koliwadas », des villages de pêcheurs Koli.

 

L'entrée du Koliwada de Cuffe Parade à Mumbai
L'entrée du Koliwada de Cuffe Parade

 

À côté de ces villages de pêcheurs de Mumbai aux maisonnettes colorées, évidemment situés sur le littoral, on peut voir un marché de gros de poisson, un espace où sèchent des crevettes et des poissons appelés bombils, et de jolis bateaux aux coques peintes.

 

Un marché aux poissons et des poissons secs à Mumbai
Le marché aux poissons d'Orlem et des poissons séchant 

 

Dans les rues de Mumbai, les femmes Koli se déplacent avec leur panier de poissons posé sur la tête.

 

Des Koli, sur des dessins du 19e siecle
Dessins du 19e siècle représentant des Koli dans leurs tenues traditionnelles

 

Elles s’habillent d’un sari, dont un pan est souvent passé entre les jambes, d’avant en arrière, puis coincé dans le dos, pour créer une sorte de short ou de pantalon. C’est plus pratique pour s’asseoir sur un tabouret bas, posé sur le trottoir ou au marché, où elles passent la journée à vendre les prises ramenées par les hommes. Elles sont généralement entourées de chats et d’aigrettes, attendant leur part.

 

Une vendeuse de poisson de Mumbai

 

 

Les hommes portent un chapeau rouge appelé Koli topi, en particulier lors des rassemblements et fêtes.

Un homme portant le Koli topi

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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Une communauté ancienne de Mumbai en perte de territoire

Des villages Koli existaient déjà à Mumbai au 12e siècle, quand la ville n’était encore qu’un archipel de sept îles. Les Koli de Mumbai parlent soit le marathi, soit un dialecte de cette langue, l’agri. La plupart sont hindous et certains sont chrétiens. Lorsqu’ils sont chrétiens, les Koli sont assimilés aux East Indians Catholics. La religion pratiquée se mêle parfois à des croyances animistes et à une vénération des ancêtres. Il semblerait également que les Koli chrétiens comme hindous participent au pèlerinage annuel aux grottes de Karla, près de Lonavla, dont un temple est dédié à la déesse protectrice des Koli, Ekvira.

 

Une statue d’Ekvira, la déesse tutélaire des Koli hindous

 

 

Bien sûr, avec le développement constant des infrastructures et la pression immobilière, le nombre de koliwadas et de leurs habitants tend à diminuer. Les Koli protestent régulièrement contre les projets d’aménagements qui bloquent leur accès à la mer et détournent les routes migratoires des poissons.

 

Le koliwada de Worli

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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Par ailleurs, les villageois refusent de voir leur habitat classé dans la catégorie des bidonvilles, afin de ne pas être soumis aux projets de réaménagement de ces quartiers insalubres, qui aboutissent à l’installation des familles dans des immeubles qui ne correspondent pas à leur mode de vie.

 

Les difficultés de la communauté Koli à Mumbai

L’activité de la pêche est de moins en moins rentable. Le changement climatique, la pollution et les nombreux aménagements de la côte commencent à avoir raison des réserves de poissons, qui pullulaient encore récemment au large de Mumbai. Selon un article récent de Times of India (réservé aux abonnés), dans le village de pêcheurs de Satpati, dans le district de Palghar, à 120 kilomètres de Mumbai, une baisse de 70 % des prises de pomfret (un poisson plat à la chair blanche et délicate), a été observée en seulement cinq ans.

À Mumbai, une association appelée Bombay61 a relaté la disparition de plusieurs espèces des eaux de la Malad Creek, en se basant sur les témoignages de la communauté Koli locale.

 

Le post Instagram de Bombay61

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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Le poisson se fait si rare que les sorties en mer sont de plus en plus souvent une perte pour les pêcheurs, qui préfèrent laisser leur bateau au sec. Pour pêcher, ils doivent s’avancer de plus en plus loin dans l’océan, et passer plus de temps au large, ce qui augmente les coûts.

 

Des bateaux de pêche abandonnés à Mumbai
Des bateaux de pêche abandonnés à Mumbai

 

En conséquence de cette raréfaction du poisson, les prix augmentent, faisant baisser la demande, ce qui ajoute aux difficultés rencontrées par les Koli. Certaines femmes de pêcheurs achètent du poisson pour le vendre, ce commerce étant leur unique métier et source de revenus.

 

Le retour de pêche au koliwada de Versova
Le retour de pêche au koliwada de Versova

 

Une interdiction de pêcher est instaurée du 1er au 31 juillet sur toute la côte ouest de l’Inde, afin de permettre la reproduction. Mais certains estiment que ce n’est pas suffisant et voudraient que la pêche soit interdite pendant 91 à 120 jours. C’est notamment la position défendue par les représentants des pêcheurs du Gujarat. Une initiative appelée Know Your Fish a par ailleurs été lancée. Il s’agit d’un calendrier en ligne qui permet aux consommateurs de choisir les bons poissons selon l’époque de l’année et leur cycle de reproduction. Il n’est pas certain que l’initiative soit du goût de tous les pêcheurs, mais elle peut être une partie de la solution.

 

Les bateaux de pêche des Kolis à l'abri pendant la mousson
Les bateaux des Koli à l'abri pendant la mousson à Cuffe Parade

 

Les pêcheurs cherchent des moyens de survivre

Au koliwada de Dharavi, les pêcheurs trouvent de nouveaux moyens de préserver leur activité. Autrefois, le poisson abondait dans la rivière Mithi, qui prend sa source dans le lac de Vihar, dans le parc national Sanjay Gandhi, et se jette dans la baie de Mahim. Quand la mer était trop agitée, les Koli pouvaient pêcher dans la rivière, ce qui leur assurait un revenu en toute saison. Aujourd’hui, le cours d’eau a été réduit à un étroit canal, et son eau est polluée par les nombreux bidonvilles et industries installés sur ses berges. Les poissons ont disparu au fur et à mesure de la dégradation de leur habitat.

Selon un article de Indian Express, pour pallier ce manque, les pêcheurs de Dharavi ont creusé des mares et se lancent dans la pisciculture. Les marées hautes viennent remplir les bassins, dont le niveau est plus haut que celui de la rivière. Ce principe leur fournit, heureusement, une eau bien plus propre que celle de la rivière. Cependant, l’exploitation de ces bassins, qui seraient une trentaine, ne résout pas tous les problèmes. Pendant la mousson, ils sont contaminés par le cours d’eau qui déborde et en période sèche, ils deviennent inaccessibles en bateau. Enfin, cette solution reste artificielle, et il serait bien plus durable de protéger la mangrove et de dépolluer la rivière Mithi.

 

Le koliwada de Versova

 

 

Le Versova Seafood Festival organisé par les Koli

Depuis 20 ans, autour du 20 janvier, la communauté Koli de Versova, dans le nord-ouest de Mumbai, organise le Seafood Festival pour célébrer sa culture et promouvoir son savoir-faire. Pendant trois jours, une cinquantaine de stands proposent des plats de poissons et de fruits de mer préparés selon les recettes locales, à des prix défiant toute concurrence. Le festival occupe un grand espace en plein air, où des longues tables sont installées pour les visiteurs. Les stands sont tenus par les femmes Koli.

 

Femmes koli au festival de poisson de Versova à Mumbai
Les femmes Koli au Sea Food Festival de Versova


Parmi les poissons et fruits de mer servis, on peut citer le « surmai » (kingfish en anglais), le pomfret et le pomfret argenté, appelé « saranga », le « bombil » ou Bombay duck, le « basa » (poisson-chat), des « mandeli » (anchois servies frites), du « bangda » (maquereau), du « rawas » (une sorte de saumon), ainsi que des crevettes, du homard ou encore des palourdes.

 

Des plats traditionnels de poissons au festival des Kolis de Versova
Deux stands du Sea Food Festival de Versova 2023

 

Reportage sur le Versova Seafood Festival 2023 (en marathi)

 

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