L’écrivain français Dominique Lapierre s’est éteint le 4 décembre 2022 à l’âge de 91 ans. Connu pour ses ouvrages sur les grands moments de l’histoire du 20ème siècle, dont Cette nuit la liberté co-écrit avec Larry Collins sur l’indépendance de l’Inde, il a utilisé une grande partie de ses droits d’auteur et des revenus de ses conférences pour financer des actions caritatives en Inde, principalement dans l’état du Bengale occidental.
Reconnaissant le travail réalisé par Dominique Lapierre, en 2008, la Présidente de l’Inde, Pratibha Patil, l’a décoré de la Padma Bushan, une décoration civile attribuée par le gouvernement indien à des personnes dont les actions ont eu un impact dans le pays (ndlr : la Padma Bushan est classée en troisième position dans les décorations civiles, après la Bharat Ratna et la Padma Vibhushan, et devant la Padma Shri).
Joint par téléphone, Johnmary Barui, le directeur de l’Asha Bhavan Centre, une des organisations caritatives soutenues par Dominique Lapierre, a confié avec émotion à la rédaction que Dominique et son épouse étaient connus comme “Dominique Dada et Dominique Didi” (des surnoms familiers qui signifient grand frère et grande sœur en bengali). Lors de leur dernière visite en décembre 2011, plus de 300 enfants s’étaient rassemblés dans les locaux de l’Asha Bhavan Centre pour les accueillir.
Les différentes organisations caritatives soutenues par Dominique Lapierre et son épouse ont elles aussi rendu hommage à l’écrivain disparu par des veillées dans leurs centres d’accueil.
De nombreux journaux indiens, dont les grands quotidiens nationaux comme The Times of India ou The Hindu, mais aussi des journaux locaux dans l’état du Bengale occidental ont rappelé le rôle de l’écrivain dans le développement de centres pour les plus défavorisés dans le pays.
Dominique Lapierre, une passion pour l’Inde
Dominique Lapierre a décrit sa passion pour l’Inde dans un ouvrage intitulé India mon amour, qui détaille d’une part le travail de recherche et de documentation pour l’écriture de ses romans sur l’Inde (Cette nuit la liberté, La Cité de la joie, Bhopal minuit moins cinq), et d’autre part, les actions humanitaires en Inde qu’il a financées avec sa femme, Dominique Conchon Lapierre.
Commentaires de lecteurs indiens sur le livre India mon amour :
“India mon amour encourage à s’investir dans des actions caritatives et raconte certaines expériences douces-amères de l'auteur en Inde, notamment à Kolkata. Dominique mérite le respect pour cela.”
“India mon amour est une lecture indispensable pour les personnes qui ont le sentiment que la vie n'a aucune valeur, même si elles disposent de toutes les commodités que l'argent peut acheter.”
L’écrivain français a été impressionné lors de sa première visite à Calcutta par l’engagement du frère du Prado, Gaston Dayanand dans le quartier défavorisé de Pilkhana, dans la ville de Howrah qui jouxte Calcutta. C’est ce quartier qu’il a nommé la Cité de la Joie dont il décrit la vie dans son roman éponyme.
Inspiré par cette figure généreuse, Dominique Lapierre s’est lancé avec sa femme dans une vaste action de soutien à des organisations caritatives dans l’état du Bengale-Occidental. Ils ont créé les Fondations Dominique Lapierre en France et en Inde pour collecter des fonds destinés à les financer.
Fort de son succès en tant que romancier et de son aura d’écrivain, Dominique Lapierre a réussi à faire partager son engagement envers ceux qui avaient besoin d’aide auprès de ses amis, lecteurs, auditeurs… et a ainsi pu recueillir des financements importants.
Dominique Lapierre et son épouse ont donc pu inspirer et inciter de nombreuses personnes à réaliser leur passion d’aider les autres.
Les Fondations Dominique Lapierre en Inde et en France
Le 6 décembre 2022, en hommage aux actions caritatives de Dominique Lapierre dans l’état du Bengale-Occidental, l’agence de presse indienne, PTI, publiait un article sur les ambitions sportives de deux jeunes filles nées handicapées et qui ont été sélectionnées pour faire partie de l’équipe indienne de handball pour les jeux olympiques spéciaux de Berlin 2023. Toutes deux ont été recueillies par le centre pour enfants handicapés de l’ONG Asha Bhavan Centre à Howrah à côté de Calcutta financé par la fondation Dominique Lapierre.
Lors de la conversation avec la rédaction, Johnmary Barui, le directeur de cette ONG, nous a indiqué que ce sont en fait 6 jeunes filles du centre qui représenteront l’Inde aux JO spéciaux de Berlin 2023, 4 font partie de l’équipe de football et 2 de l’équipe de handball. L’année dernière, l’équipe de football indienne qui comprenait deux jeunes filles d’Asha Bhavan a remporté la médaille de bronze aux JO spéciaux de Detroit 2022, aux Etats-Unis.
Récemment, une des deux footballeuses présente à Detroit a figuré dans un film de l'UNICEF sur les enfants sportifs ayant accompli des exploits significatifs pour servir de modèles à d’autres enfants en situation difficile.
C’est une formidable réussite pour ces enfants et les personnes qui les ont accompagnées dans leur bataille pour une vie “meilleure”.
Asha Bhavan Centre est une des organisations caritatives qui ont été soutenues financièrement depuis leur création par les fondations Dominique Lapierre en France et en Inde.
L’action des époux Lapierre ne s’est pas limitée à la “Cité de la Joie”, ils ont aussi essaimé dans des zones rurales très retirées du Bengale occidental comme la région isolée des Sunderbans (le delta du Gange) dans laquelle œuvre SHIS, une ONG assurant un service médical par bateaux ou l’association du frère Gaston à Huluberia dans la ville de Howrah et d’autres ONG.
Jusqu’en 2015, les Fondations Dominique Lapierre assuraient une grande partie du financement de ces ONG, mais à la suite de problèmes de santé de l’écrivain, les sources monétaires qui provenaient de ses droits d’auteur mais aussi de ses conférences se sont petit à petit réduites et les Fondations Dominique Lapierre sont devenues moins actives. Récemment, l’épouse de Dominique Lapierre a décidé de transférer la gestion des fondations à une ONG active depuis plus de 15 ans principalement dans le sud de l’Inde, appelée Objectif France Inde (OFI) en France, et Casa India Foundation en Inde, toutes deux gérées par Benjamine Oberoi.
Les ONG les mieux équipées (en termes de connaissances pour collecter des fonds et s’enregistrer auprès des institutions gouvernementales pour obtenir des subventions) ont réussi à attirer d’autres sources de revenus mais aussi à obtenir des subventions de la part du gouvernement de l’état du Bengale occidental et du gouvernement national et leur avenir semble plutôt assuré, c’est le cas par exemple de l’Asha Bhavan Centre. Mais certaines ONG n’ont pas les compétences techniques dans ces domaines et font aujourd’hui face à un besoin de financement accru.
Le rôle d’OFI sera d’aider ces ONG à devenir le plus indépendantes possible, à les assister dans l’enregistrement auprès des gouvernements local et national pour obtenir des subventions…
Toute donation quel qu’en soit le montant, est toujours bienvenue ! Il est possible de faire un don en euros sur le site d’OFI avec déduction fiscale ou en roupies sur le compte de la Fondation Dominique Lapierre à Delhi (demander les références bancaires ici).
L’Asha Bhavan Centre, le handicap n'est pas une incapacité
L’Asha Bhavan Centre a été fondé il y a 40 ans par Sukeshi Barui, la mère du directeur actuel, avec le soutien financier de la Fondation Dominique Lapierre.
L’ONG s’occupe de personnes handicapées quel que soit le handicap et est reconnue par le gouvernement du Bengale occidental et par le gouvernement national. Aujourd’hui, 50 % des besoins sont financés par des subventions gouvernementales, le reste provient de dons. 300 personnes travaillent dans les différents locaux de l’Asha Bhavan Centre au Bengale occidental.
L’ONG dispose de deux centres dans la ville de Howrah où se trouve son siège qui sont des maisons d’accueil pour les enfants handicapés orphelins ou dont la famille ne peut pas s’occuper. Actuellement, 200 enfants y vivent.
Asha Bhavan Centre gère aussi des centres de jour dans des villages isolés du Bengale occidental qui accueillent les enfants handicapés des alentours pour des séances de rééducation, des activités manuelles mais aussi des formations des parents à la prise en charge du handicap de l’enfant. Ce sont plus de 7 000 enfants qui sont accompagnés par ces centres. Dans des zones rurales isolées, onze écoles accueillent environ 3 000 enfants dans des bâtiments modernes, une exception dans ces villages. L’Asha Bhavan Centre gère aussi des dispensaires qui sont bien équipés, certains ont même des spécialistes capables de fixer une prothèse pour les personnes amputées.
Tous les centres de l’ONG sont gérés par des personnes locales qui ont été formées et sont employées par l’ONG.
Avec émotion, le directeur du centre, Johnmary Barui qui connait les époux Lapierre depuis qu’il est enfant, a évoqué leur dernière visite en décembre 2011 lorsqu’ils ont inauguré le centre pour enfants handicapés de Kathila à Howrah.
Il est possible de soutenir l’Asha Bhavan Centre via un don de particulier, un sponsoring par une entreprise ou en s’y investissant comme bénévole. Actuellement, 4 jeunes Français y effectuent leur service civique.