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Francophonie en Thaïlande : Thammasat tient le coup et le cap

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DR - ‘Les réformes juridiques en Asie du Sud Est : vers une Société contractuelle et évolutive’ était le sujet débattu, en français, pendant deux jours fin décembre par 21 contributeurs et plus de 40 auditeurs
Écrit par Patrick Dutertre
Publié le 14 mars 2019, mis à jour le 14 mars 2019

Les 20 et 21 décembre 2018 s’est tenue à l'Université Thammasat la plus importante manifestation Francophone de l’année 2018/2019.

Pendant deux jours, 21 contributeurs, et plus de 40 auditeurs : étudiants français venus d’Hanoi, étudiants thaïlandais, enseignants, magistrats et avocats de Bangkok, représentants du Conseil d’Etat de Thaïlande etc. ont débattu, en français, d’un sujet hautement sensible ‘Les réformes juridiques en Asie du Sud Est : vers une Société contractuelle et évolutive.’

A côté de Thammasat et de cinq Universités Françaises, deux Universités Vietnamiennes, Hanoi et Saigon, l’Université de Vien Tiane, l’Université Royale de Phnom Penh, se réclamant toutes de la Francophonie, avaient délégué leurs meilleurs juristes, tous formés dans des Universités Françaises de premier plan et parfaitement bilingues.

Cette initiative du Doyen, francophone, de la Faculté de droit de Thammasat, mais mise en forme par le Directeur du Centre d’Etudes de Droit Français et le Conseiller du même Centre, a donc connu un important succès.

Elle s’inscrit dans la continuité du long combat que Thammasat, avec ses quarante pour cent de juristes formés en France, poursuit pour la prééminence d’un système de droit écrit dans l’Asie du Sud Est, système autonome mais inspiré à l’origine, tout comme le Code Civil et de Commerce Thaï, par le droit français, ce vecteur important de la Francophonie, trop méconnu par les instances représentatives de la Francophonie.

Centre de droit francais Thammasat

Thammasat et son Centre d’Etude de Droit Français, qui soutient et assure l’enseignement du droit Français en licence dans son campus de Rangsit n’en est cependant pas à son coup d’essai.

Déjà en 2014, un colloque interzone sur ‘La justice sociale en Asie du Sud Est’ avait marqué le cap de cette renaissance et de cette résistance du français menacé, non seulement en Thaïlande mais dans toute la région par la diffusion de la langue anglaise et du droit qui l’accompagne.

Des Universitaires de haut vol, tel le Doyen Mestre, d’Aix en Provence, spécialiste reconnu du droit des obligations, ou le Président Fulchiron, de Lyon III, avaient participé et donné un réel lustre à cette première manifestation. Cette fois-ci la délégation Française était encore plus étoffée et diversifiée. Surtout les Facultés de Droit de la région, parrainées par Thammasat, avaient fait un effort tout particulier tant par le nombre que par la qualité des intervenants : le Doyen de la Faculté de droit d’Hochiminh ville, dans une intervention remarquée sur la réforme du droit des obligations au Vietnam, très proche de la réforme du droit français des obligations de 2016, a confirmé au Vietnam la prééminence du droit écrit sur la common law.

Le droit de la Propriété intellectuelle et la diffusion de la cryptomonnaie ont fait également l’objet d’importantes contributions, mais les contributeurs n’ont pas manqué de souligner les transformations juridiques induites dans les pays de l’Asie du Sud Est par l’irruption d’un libéralisme économique toujours plus agressif dans des Sociétés encore, en grande partie, traditionnelles.

Une double préoccupation, souvent contradictoire

Les contributions et les débats ont bien fait apparaître une double préoccupation quelque peu contradictoire, un besoin de liberté contractuelle mais aussi de protection, en particulier dans les domaines du travail et de la santé, qui ne peut être assuré que par l’Etat Nation, fortement centralisé, culturellement et ethniquement homogène, et les solidarités familiales, tous deux bases de la société en Asie du Sud Est.

Dans ce contexte, avec son évolution récente, le droit Français ne pourrait sembler plus que constituer un simple terme de comparaison pour des systèmes juridiques ayant conquis leur autonomie.

Mais si la contractualisation, en France, du droit du travail et surtout du droit de la famille, devenu un droit du couple, ne peut être un modèle pour les systèmes de droit du Sud Est Asiatique, par contre l’importante réforme française du droit des obligations, considérée comme réussie par la plupart des commentateurs, peut redonner une réelle attractivité au droit français, réagissant enfin à la montée de la common law.

Il est apparu aussi que la Francophonie, privée en France de son Ministère, avait besoin de définir et surtout de mettre en place une réelle politique affirmée et même conquérante, faute de quoi d’autres pays européens prendraient rapidement son relais.

L’Ambassade de France, qui a renouvelé son personnel, ne semble pas insensible à cette préoccupation. Elle avait tenu à recevoir cordialement les contributeurs à l’issue de leurs débats.

Il faut que l’effort entrepris par Thammasat et son Comité du CEDF soit poursuivi et reconnu, faute de quoi le français déjà en perte de vitesse dans la région, les milieux économiques ou culturels succombant trop facilement à la facilité de l’utilisation de l’anglais comme instrument vernaculaire, poursuivrait un déclin pourtant loin d’être inexorable.

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