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Quelque chose de Corée d’Elise Ducamp, un guide culturel pour naviguer la hallyu

Elise Ducamp auteure de Quelque chose de Corée (éditions Nanika)Elise Ducamp auteure de Quelque chose de Corée (éditions Nanika)
Elise Ducamp auteure de Quelque chose de Corée (éditions Nanika)
Écrit par Damien Bouhours
Publié le 31 mai 2022

Elise Ducamp est revenue de Corée du Sud avec l'envie d'écrire « un livre qui parle simplement de toutes les choses que j’avais découvertes en Corée ». Avec sa propre maison d’éditions Nanika, la jeune éditrice décide de lancer une série de guides culturels : Quelque chose de… et montre l’exemple avec la sortie d’un guide sur la Corée du Sud, un pays aimé des Français mais encore méconnu.

 

Je voulais un livre accessible, un livre qui parle simplement de toutes les choses que j’avais découvertes en Corée, un livre que j’aurais pu offrir à mes amis pour leur dire « voilà, c’est ça la Corée que j’ai vécue »

 

Comment avez-vous eu lidée de lancer les éditions Nanika

À mon retour de Corée du Sud, j’ai été un peu frustrée des livres que l’on pouvait trouver sur la Corée : soit des guides de voyage classiques avec principalement des « bonnes adresses », soit des ouvrages pointus qui demandent déjà des connaissances avancées pour les comprendre. Je voulais un livre accessible, un livre qui parle simplement de toutes les choses que j’avais découvertes en Corée, un livre que j’aurais pu offrir à mes amis pour leur dire « voilà, c’est ça la Corée que j’ai vécue ». Alors j’ai commencé à l’écrire.

Puis je me suis dit que c’était bête de ne faire ça que pour la Corée, qu’il devait y avoir d’autres personnes qui voulaient la même chose pour dire « voilà, c’est ça, le Mexique que j’ai vécu » ou « voilà, c’est ça la Thaïlande que j’ai vécue » ! Je viens du monde de l’édition et j’y travaille depuis presque 10 ans donc ça m’a semblé logique de créer ma propre maison pour accueillir tous ces auteurs passionnés. C’est comme ça qu’est née Nanika.

 

Quelque chose de Corée du Sud

 

Était-il important pour vous de créer des guides culturels plutôt que touristiques ?

Oui. Il existe déjà tant de guides touristiques traditionnels chez les gros éditeurs mais aussi chez de petits éditeurs indépendants de qualité… je ne vois pas ce que j’aurais pu apporter de plus ou faire de mieux !

Par contre, il y a toujours eu un manque au niveau des guides culturels et nous vivons à une époque qui a tendance à beaucoup valoriser l’image, la photo, le beau paysage. On a un peu tendance à oublier l’aspect culturel des choses, que chaque pays que l’on visite est un lieu de vie pour des milliers de personnes. C’était important pour moi de remettre ces habitants au centre d’un guide car ce sont eux qui font la culture de leur pays.

 

La gastronomie coréenne

 

 

Pour parler de votre ouvrage sur la Corée du Sud, y a-t-il beaucoup dincompréhensions entourant la culture coréenne ? 
Les choses évoluent doucement avec les « jeunes générations » qui sont beaucoup plus au contact de la hallyu et qui connaissent donc généralement mieux la culture coréenne. Le boom de la cuisine coréenne a aussi beaucoup aidé à faire connaître certains aspects de la culture coréenne en France.

Mais ce n’est pas toujours le cas. Beaucoup de gens continuent à penser la Corée en comparaison avec le Japon, avec les fameuses phrases « Ah oui c’est comme au Japon ça » ou « Ah non mais parce qu’au Japon… ». C’est assez révélateur. Et dans certains cas, on tombe encore carrément dans un racisme anti-asiatique décomplexé et à peine voilé où on dénigre certains aspects culturels sous couvert de « rigoler ».

 

La hallyu est l’outil privilégié du soft power coréen aujourd’hui

 

La Hallyu a permis de faire connaître la Corée du Sud dans le monde entier mais quest-ce que cette vague cache de la culture coréenne ? 

Elle ne cache plus grand-chose. La hallyu est l’outil privilégié du soft power coréen aujourd’hui. Le but est clair : vendre la culture coréenne à l’étranger, la faire « briller ». Les premières vagues étaient toutes « strass et paillettes », c’est vrai. On ne montrait que le bon côté de la vie en Corée, les beaux paysages, les histoires d’amour parfaites. C’était le temps des Winter sonata, Autumn in my heart ou Boys over flowers un peu plus tard.

 

Mais cela fait déjà plusieurs années que l’on voit arriver des productions (séries, films, livres…) qui abordent ouvertement les problèmes sociaux auxquels sont confrontés les Coréens d’aujourd’hui. Il y a évidemment les grandes questions politiques : les relations avec la Corée du Nord ou la corruption au sein de l’État. Mais ça va au-delà. Il n’y a qu’à voir le film Parasites qui tacle ouverture la fracture sociale grandissante dans la société coréenne ; ou le drama Extracurricular qui aborde frontalement la thématique de la prostitution des mineures. Il y avait déjà eu le drama Save me qui plonge dans l’univers des sectes religieuses, très fréquentes en Corée du Sud ou plus récemment Squid Games qui a eu un succès tel que cela a peut-être un peu étouffé sa portée « politique ».

 

Après, il y a ce qui est dit et comment cela est reçu. Les productions trop « négatives » sont généralement mal reçues en Corée et elles ne sont pas forcément celles qui ont le plus de succès dans le reste du monde. Hors Europe, la Corée a de nombreux intérêts en Amérique latine et au Moyen-Orient. Or ce sont des zones où les moeurs ne sont pas forcément favorables à la réception de séries ou de films trop « critiques ».

 

quelque chose de corée du sud

 

Vous avez été expatriée en Corée du Sud. Quel est ce quelque chose” que vous avez ramené avec vous de cette expérience ? 

Un livre ! Je vous invite à le lire. Il paraît qu’il est plutôt bien ! Blague à part, c’est compliqué de répondre à cette question. Cela me fait penser à Nathan, auteur de Quelque chose de Côte d’Ivoire qui s’insurgeait déjà face à la question « C’était comment la Côte d’Ivoire ? » en disant que « C’était comment ? c’est la question qu’on pose à quelqu’un qui revient d’un entretien d’embauche, d’un concours, d’une première journée de travail. Poser la question à quelqu’un qui est parti des années, c’est lui demander d’écrire un livre. »

 

Un temple en Corée du Sud

 

Dans ce livre, il y a tous les petits quelque chose que j’ai ramenés : un peu de han et un peu de jeong, les allées bruyantes et mal éclairées du marché de Gwangjang, le jaune tendre des tombes de Gyeongju à l’automne, un peu des cris des ajummas et de la  statique Namsan. La vivacité de l’hiver et son froid polaire. La langueur de l’été et son concert assourdissant de cigales. Cette « urgence » à vivre, à faire, à goûter, à boire, à tout faire « palli, palli » comme s’il n’y avait pas de lendemain. Un peu de ce kimchi jjigae bouillant servi à table, et sur lequel on se jette en se brûlant la langue. Un peu de toutes ces différences logées dans le quotidien, celles que l’on perçoit avant de les voir, celles qui se posent sur le bout de notre langue, et que l’on essayera de dire sans succès, et que, faute de mieux, on appellera « différentes ».

 

Un paysage en Corée du Sud

 

Quels seraient vos conseils pour quelquun qui veut sinstaller en Corée du Sud ?

D’avoir un vrai projet, de bien étudier la culture coréenne et d’apprendre le coréen. La Corée du Sud n’est pas un pays « intuitif » pour quelqu’un qui a grandi et vécu en France. La manière de penser, d’échanger, de socialiser, les codes… tout suit une logique différente qui peut être subtile à comprendre. La mauvaise idée est de se dire qu’on connait déjà « la Corée » parce qu’on a regardé une centaine de drama.

Partez sur place pour une ou deux semaines en vacances d’abord. Apprenez un peu la langue. Parlez avec des gens qui sont déjà sur place ou y ont été. Construisez un projet rationnel (non, vous ne trouverez pas un poste de chargé marketing dans l’événementiel à Séoul si vous ne parlez pas coréen ; partez d’abord en PVT, incrustez-vous dans une école de langue et après vous verrez). Si après ça, vous souhaitez toujours partir vivre en Corée, alors foncez !

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