Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

Philippe Dillmann, le Sparring-partner des DG ou chefs d’entreprise

philippe dillmanphilippe dillman
DR
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 18 février 2020, mis à jour le 19 février 2020

Acteur du développement économique de l’Espagne depuis 40 ans, Philippe Dillmann a acquis une expérience unique tant par sa culture franco-espagnole que par son parcours dense et atypique en tant que Top executive puis chef d’entreprise. Il transmet maintenant ce savoir à d’autres décideurs.

 


Philippe Dillmann a une vie professionnelle hors norme. Alors que la plupart des personnes de sa génération travaillaient toute leur vie dans la même boîte, lui a changé plusieurs fois de secteur et, fort de son expérience, il a créé sa propre entreprise. Dillmann débute à Total où il va vivre en direct la première crise du pétrole de 1973 et le passage du baril de 7 à 60 dollars. 

Il débarque en Espagne il y a tout juste 40 ans pour la création de la filiale d’Auchan et participe au développement du secteur de la distribution, puis rejoint 10 ans plus tard Accor, qui n’était pas encore la multinationale qu’il a aidée à forger. "Je suis arrivé –se souvient Philippe Dillmann- au moment où le groupe rachetait Wagons-lits et nous sommes passés du jour au lendemain d’une toute petite entreprise à une grosse boîte de plus de 12.000 employés, avec une diversité significative des activités, au-delà de l’hôtellerie encore très peu présente sur le marché espagnol". 

Fort de son expérience dans le secteur de la grande distribution, il travaille ensuite dans le développement de Centres Commerciaux, un concept alors relativement nouveau en Espagne et qui va connaître une grande effervescence.


On peut parfois commettre des erreurs dramatiques

Quinze ans après son arrivée en Espagne, en 1995, Philippe Dillmann crée sa propre entreprise, qui devient en quelques années un cabinet de conseil de référence dans le domaine de la stratégie et de l'organisation, surtout dans le secteur de la distribution et des produits de grande consommation. En 2008, Price Waterhouse Cooper rachète son cabinet et lui demande de rester comme associé, ce qu’il fait jusqu’à ce qu’il quitte la vie "hyper" active en 2012. Mais pas question de quitter l’Espagne, pays qu’il adore. Ni de rester chez lui à ne rien faire!

"Je me suis posé la question de comment je pouvais transmettre cette  expérience à d’autres personnes –explique Dillmann-. Je sais, pour l’avoir vécu moi-même, qu’être le numéro un d’une entreprise ou de la filiale d’un groupe, c’est être très seul. On a beau être entouré d’une équipe exceptionnelle, il faut prendre des décisions stratégiques, des choix pour l’organisation qu’on doit mûrir personnellement, et il est bon d’avoir un regard extérieur qui vienne vous servir un peu d’effet miroir". 


Socrate du business

Philippe Dillmann commence alors il y a huit ans cette approche de mentoring : "L’idée du top executive advisor est né d’une expérience personnelle –raconte Dillmann- lorsque j’étais responsable en Espagne de la filiale d’un groupe français et que je me suis rendu compte que lorsqu’on prend des décisions seul, on peut parfois commettre des erreurs dramatiques. C’est important de pouvoir parler à quelqu’un qui comprenne parfaitement vos doutes, vos inquiétudes". 

Et c’est encore mieux s’il saisit à la fois toutes les nuances de la culture française et espagnole pour- par exemple -faire comprendre au siège qu’en Espagne on n’annonce pas un plan social de la même façon qu’en France. Mais qu’il s’agisse d’un responsable d’une multinationale ou du dirigeant d’une petite entreprise, les enjeux sont identiques. 

Mais alors, peut-on dire que Philippe Dillmann est une sorte de coach ? "Pas du tout –rétorque-il. Le coach vous dit ce qu’il faut faire, quand et comment le faire. Je prendrais plutôt l’exemple du sparring-partner, le partenaire d’entrainement du boxeur qui reçoit les coups mais surtout les oriente. C’est du one to one. Je le fais parler, je questionne ses propos. En définitive, j’amène mon interlocuteur à se rendre compte qu'il possède la solution en le guidant à travers sa réflexion, et c’est très gratifiant car c’est finalement lui qui trouve la clef". Ce Socrate du business utilise donc l’art de la maïeutique, tel le philosophe grec qui parvenait à faire découvrir à ses disciples les vérités qu’ils avaient en eux-mêmes par le biais de questionnements.

Confiance et confidentialité sont bien sûr les maîtres-mots de ce mentoring. "Je suis présent sur le marché depuis longtemps –explique Philippe Dillmann. La confiance naît rapidement, parce que la personne que j’ai en face de moi se rend compte que je comprends ce qu’elle dit –non pas la technique de son métier, car je ne suis pas l’expert de tous les métiers-, mais je saisis ses interrogations, ses doutes, ses questionnements, et mes interlocuteurs sont très satisfaits de ce type de sessions". Et pour cause. Les personnes qu’il a conseillées ont eu une promotion au sein de leur groupe ou un changement d’entreprise très positif dans les deux ans qui ont suivi ce mentoring. "Ils ont appris à prendre confiance en eux, à bien formuler et verbaliser leurs lignes de force".


Vice-président et administrateur de La Chambre, membre du réseau Netmentora

Par ailleurs, Philippe Dillmann reste très attaché à la vie associative et est très impliqué dans la Chambre franco-espagnole de Commerce et d’Industrie, dont il est vice-président et administrateur depuis des années. "La Chambre -raconte-t-il- c’est à la fois un grand club d’affaires où se retrouvent les patrons de grandes entreprises, généralement liées à la France, et une plate-forme de services aux PME qui n’ont pas toujours les moyens financiers ou humains lors de leur implantation en Espagne". 

Il y a 124 chambres de commerces françaises dans le monde, dont la mission est de promouvoir les relations bilatérales. A ce titre, La Chambre couvre tous les services d’appui aux PME. "En s’adressant à La Chambre, les petites et moyennes entreprises savent qu’elles peuvent recevoir un service de qualité pour leur implantation et leur développement. Ce service d’appui aux entreprises représente une activité très importante de la structure, qui a ainsi aidé environ 400 entreprises l’an passé". Il faut rappeler que le courant d’affaire entre les deux pays est très important, aussi bien en terme d’exportations que d’investissements. 

Ces services incluent le conseil personnalisé et adapté au contexte local concernant la découverte du marché ou les possibilités de partenariats, en passant par des espaces de coworking, la domiciliation juridique et fiscale, ou la gestion administrative et comptable pour les PME qui le souhaitent. Mais les entreprises françaises ne sont pas les seules concernées. Des sociétés espagnoles font également appel à La Chambre pour exporter ou s’implanter en France. 

Un autre moyen qu’a trouvé Philippe Dillmann de partager son expérience est le réseau Netmentora, qui existe en France depuis 30 ans sous le nom de Réseau Entreprendre, et a démarré en Espagne il y a trois ans. "Il s’agit d’accompagner de jeunes entrepreneurs pendant deux ans -explique Dillmann- avec la possibilité de prêt d’honneur. Condition sine qua non : la création d’emplois. Et en trois ans, une centaine d’emplois ont déjà été créés à Madrid".