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Le plaisir d’être "de rodriguez" à Madrid en août

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Ben White on Unsplash

"Estar de rodriguez" est une expression typiquement espagnole qui se réfère aux maris, souvent pères de famille, qui restent à la ville pendant l’été lorsque que leurs femmes et enfants sont au "pueblo" (village de la famille) ou au bord de mer, et qui souvent aussi sous-entend que les "pauvres" maris en question en profitent pour faire la fête. "Quand le chat n’est pas là, les souris dansent", du moins à Madrid et pendant l’été.

Une expression populaire issue d’un film des années 1960

L’expression "estar de rodriguez" semble avoir pour origine un titre de film des années 1960, "El cálido verano del sr. Rodriguez" (L’été chaud de Monsieur Rodriguez), de Pedro Lazaga. Cette comédie burlesque met en scène les journées estivales d’un cadre moyen espagnol resté "à la ville" pendant que sa femme et ses enfants sont partis pour l’été à la plage. Si l’on passe outre le machisme et les clichés du scénario qui sont sans doute les causes du succès tout à fait limité du film, l’acteur principal (José Luis López Vázquez) et le metteur en scène peuvent néanmoins se vanter d’avoir lancé une expression populaire ancrée dans les mœurs espagnoles et qui figure désormais au DRAE -  Dictionnaire de la Royale Académie Espagnol.

Un deuxième film du même directeur Lazaga, intitulé "Tres suecas para tres Rodriguez" (trois Suèdoises pour trois Rodriguez) annonce déjà la couleur. Le "fantasme" des Suédoises, la libération sexuelle en Europe et aux USA issue de Mai 68, de Woodstock et la campagne de "ban the bra" (fini le soutien-gorge) sont venus compléter, pour certains, le sens de l’expression "estar de rodriguez" dans l’Espagne des années de fin de dictature de Franco et de tourisme de plus en plus envahissant.

Toujours est-il que l’expression est aujourd’hui entrée dans les mœurs et fait partie du vocabulaire courant et quotidien des Madrilènes estivaux. Les puristes font remarquer que lorsque l’on utilise l’expression "estar de rodriquez" on utilise un "r" minuscule, la majuscule étant réservée au nom patronimique. A cet égard, Rodriguez n’est pas le patronyme le plus courant en Espagne. García l’est, suivi de González, en ensuite Rodriguez.

 

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De quoi s’occuper du matin au soir

En août, Madrid se vide et sans doute plus que d’autres capitales. D’abord parce qu’il y a moins de monde qu’à Paris, Londres ou Bruxelles et ensuite, et surtout, parce qu’il fait beaucoup plus chaud et que les 35 à 40 degrés centigrades sont difficiles à supporter malgré l’absence d’humidité. Certains partent en vacances au bord de mer, d’autres prennent leur quartier d’été dans la Sierra aux alentours de l’Escorial où les nuits sont fraîches et agréables.

Mais la vie continue à Madrid où de nombreux commerces, bureaux, magasins, bars et restaurants restent ouverts. Certains optent pour la journée continue de 7h jusqu’à 15h, tradition qui date du temps où il n’y avait pas d’air conditionné mais qui subsiste encore, surtout pour les petits commerces. La pause-café de 11h est une institution espagnole et encore plus en été. Un moment de détente pour prendre les meilleurs "churros con chocolate" de la ville à la chocolaterie San Ginés, ouverte 24h sur 24, ou le tout aussi traditionnel "cortado" (café-noisette) dans les cafés authentiques de Madrid que sont El Espejo, Gijón, Commercial, Barbieri, Jardín, Oriente ou Riojano, ou alors les cafés modernes et "instagrammés" que sont les Cafés Pum-Pum, Wanda, Salon des Fleurs ou Faraday. Quel que soit le lieu, l’essentiel est de se retrouver entre amis qui sont "de rodriguez" pour partager et rire des exploits et aventures de la veille.

Pour le déjeuner, le "rodriguez" sort avec les copains rodriguez. On reste en famille ! Une excellente viande "al carbón" servie avec assiette brûlante en terre-cuite aux restaurants El Buey ou Casa Julián, les meilleurs poissons et crustacés à La Trainera, La Giralda ou la marisquería Ribeira do Miño, et bien sûr les pinchos et raciones à la Meson del Chapignon, Casa del Abuelo, Orio ou Lateral parmi les innombrables bars, mesón et restaurants tous plus délicieux les uns que les autres.

Le soir c’est la fête ! 

Les Madrilènes qui restent dans la capitale s’en donnent à cœur joie. Ils vivent dans la rue et non pas à partir du jeudi soir comme en temps normal pendant l’année, mais dès le lundi pour profiter de leur statut "de rodriguez". Au-delà des établissements déjà cités qui accueillent les clients aussi en soirée, le Madrilène de rodriguez aime la variété et la nouveauté. Impensable d’aller deux fois dans le même bar ! Il faut découvrir et faire découvrir aux amis. Les bars Cibeles, Pasa Huertas, Hat Madrid, Nomad ou Gorila sont quelques favoris. Pour les amateurs de terrasses, la plus belle est celle du restaurant Numa Pompilio, ou celle du rooftop bar Penthouse pour voir les toits de Madrid ou bien sûr le classique jardin de l’hôtel Ritz dont l’ouverture après restauration prévue pour fin 2019 a été repoussée a 2020.

Dans tout Madrid, les bars regorgent de clients qui prennent leur consommation au comptoir et la consomment dehors car ils aiment être à l’air libre, regarder les passants, bavarder avec les amis de passage. C’est typique des pays méditerranéens où le climat clément et le ciel dégagé invitent à cette forme de liberté. Pour certains, "estar de rodriguez" va au-delà et vers des mœurs plus libertines dans les clubs des alentours de Madrid.  

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