Stéphane Gregori : "SportDone est le réseau social du sport"

Comme toute idée géniale, il fallait juste y penser. Et il suffit de 10 minutes de pitch pour se persuader que si SportDone n'existait pas, il faudrait l'inventer. C'est désormais chose faite et on verra que Stéphane Gregori, Parisien de naissance et depuis 24 ans Madrilène, a eu le nez particulièrement creux lorsqu'il a décidé de s'investir dans le projet. Un projet né d'une frustration : c'est en 2020, de passage dans la capitale française, que ce publicitaire, grossiste et spécialiste de la grande distribution, cherche un partenaire pour jouer au tennis. Aucun de ses amis n'étant disponible, il pense pouvoir facilement trouver un joueur via une app de mise en relation. Pas de bol et peau de balle : Stéphane Gregori découvre avec stupeur qu'il n'existe aucune plateforme spécialisée sur la mise en contact de sportifs amateurs souhaitant pratiquer leur discipline. Tout de suite, cet entrepreneur qui n'en est pas à son premier business plan, identifie un marché porteur. 

Le sport, un formidable vecteur pour rassembler les gens et pour sociabiliser

"J'ai pensé que c'était un mega créneau", confirme-t-il. "Du coup je suis allé voir s'il existait quelque chose d'équivalent aux USA, et aussi incroyable que cela puisse paraître il n'y avait rien non plus". La même année, il fonde SportDone, un espace dont la vocation est de mettre gratuitement en contact des personnes pratiquant un même sport, au même niveau, et géographiquement proches les unes des autres. Après 4 ans de développement, l'app a été publié à l'automne 2024, avec 32 sports disponibles, et elle comptait déjà, en fin d'année, une dizaine de milliers d'utilisateurs, principalement en Europe et aux Etats-Unis. "Notre objectif est d'atteindre près de 200.000 utilisateurs en 2025", déclare le CEO de SportDone, "en augmentant à 48 le nombre de disciplines proposées et en intégrant rapidement les sports paralympiques". Le volume d'utilisateurs conquis en quelques mois d'existence, par la simple visibilité organique, confirme l'intérêt que la prestation génère. "Le sport, ce sont des valeurs et c'est aussi un formidable vecteur pour rassembler les gens et pour sociabiliser", observe Stéphane Gregori. Et "Sport Done est en passe de devenir le réseau social du sport", un espace qui constitue un potentiel énorme, notamment en termes commerciaux. Quand on vous disait qu'il suffisait d'y penser...  

Pourtant, sans les années d'entrepreneuriat qui ont précédé la création de SportDone, et sans le parcours de haut vol de son fondateur, la start-up ne serait pas porteuse du potentiel qu'elle véhicule aujourd'hui. Car les trois décennies qu'il a dédiées à la communication et à la grande distribution ne sont pas étrangères au modèle économique d'une app qui se distingue par sa gratuité. D'abord pour l'expérience que le Parisien a au cours de toutes ces années acquises : si dès 1998, cet alumni de l'Ecole Supérieure de Publicité et de l'ESSEC, propose avec son agence de communication toute une série de prestations dans le cadre du Mondial de football -un succès qu'il n'est pas prêt d'oublier et qui lui permet (déjà) de tisser des liens dans le monde du sport- c'est avec la création de son entreprise Globalcorp, en 2000, qu'il va acquérir un savoir-faire unique dans l'univers de la grande distribution. "Nous avons été les premiers à proposer en grande surface, tout ce qui gravite autour de l'ordinateur : du clavier à la webcam, en passant par le modem", se souvient-il, "mais aussi les premiers à importer les disques durs qui se vendaient dans les hypermarchés". C'est alors qu'il débute une relation commerciale avec le Corte Inglés, Carrefour et Auchan et qu'il décide de s'installer à Madrid. "De l'informatique, c'est naturellement que nous sommes passés à la fabrication et vente de téléviseurs puis à téléphonie mobile", poursuit l'intéressé, "en distribuant par exemple dès 2015 la marque Xiaomi en France et en Espagne". "J'ai passé toutes ces années à faire de la veille technologique en Chine, dans les grands salons et les laboratoires de Shenzhen, Canton, Xiamen, Dongguan ou Guangzhou", rémore-t-il.

SportDone : un modèle économique particulièrement puissant

"On a déjà beaucoup parcouru le monde et accumulé beaucoup d'expérience", résume le startuper à propos du noyau dur à l'origine de SportDone, 6 personnes actuellement à temps plein sur le projet. Surtout, SportDone hérite des compétences d'un parcours qui porte "la grande distribution dans son ADN" et qu'on retrouve dans son modèle économique. 
Résumons : la plateforme développée par Stéphane Gregori permet à l'utilisateur de créer un profil, avec ses sports favoris, ses publications de photos et vidéos, ses amis et de chater avec eux. Elle permet aussi de créer des équipes, de géolocaliser d’autres joueurs et de générer des événements ou rendez-vous sportifs. Bref, l’app permet de créer des liens, de se rencontrer physiquement, de partager des passions, de générer des amitiés… et plus si affinités. Un réseau social donc, qui inclut toutes les installations sportives du monde, permet de regrouper des gens autour des valeurs du sport, et qui devrait trouver assez facilement les sponsors désireux d'associer leur marque au projet, avec une audience qualifiée. C'est le premier pilier du modèle. Le second pilier est constitué par une formule premium, un abonnement payant qui permettra d'upgrader les prestations offertes à l'utilisateur et de jouir de toute une série d'avantages. "La souscription permettra aussi aux professionnels, coachs, entraîneurs, nutritionnistes etc. d'interagir de façon plus efficace avec leur clientèle cible, en accédant à la data générée par SportDone", explique l'entrepreneur.

Dernier pilier, et pas des moindres : la boutique en ligne. On devrait y trouver toute une série de produits intéressant les utilisateurs de la plateforme. "Nous avons lancé « SportDone HealthCare », notre propre marque de suppléments et nutrition sportive, en association avec un laboratoire en compagnie duquel nous formulons, fabriquons et distribuons nous-même nos gammes de produits, fabriqués en Espagne. On peut retrouver toutes les références sur le shop, ainsi que chez El Corte Ingles, Trade Inn, ou dans certaines parapharmacies et pharmacies" éclaire le CEO. La boucle est ainsi bouclée et l'expert en distribution apporte toute son expérience en la matière pour en assurer le bon fonctionnement du modèle.

Après 4 ans de développement en fonds propres, de 2020 à 2024, qui valent en soi leur lot d'anecdotes et leur poids d'expérience acquise, Sport Done est en passe de franchir un cap essentiel en 2025, avec une levée de fonds d'1 million d'euros prévue cette année. "C'est un parcours qui demande beaucoup d'abnégation", admet Stéphane Gregori, "et une grande foi en son produit". "On a passé 3 ans à faire un produit de très haute qualité", défend-il, "avec des développeurs français et espagnols très qualifiés, qui nous ont permis de travailler dans un langage particulièrement difficile, le React Native, qui a l'avantage de nous permettre dès à présent d'intégrer de nouvelles fonctionnalités, par exemple de l'IA générative, en accord avec l'évolution de notre modèle". Après s'être centrés sur le produit, l'heure est désormais venue de communiquer, pour capter de nouveaux utilisateurs. C'est aussi le moment de faire valoir la solidité du projet auprès des investisseurs, notamment pour financer le développement marketing. Sélectionnée pour postuler aux programmes d'investissements des plus gros incubateurs de la Silicon Valley, tels que Plug and Play, Tech Stars ou Alchemists, la start-up pourrait bien recevoir sur le continent américain les fonds dont elle a besoin à travers sa filiale US constituée en 2024. Cela tombe bien, le marché US constitue l'une des priorités de l'entreprise. L'Europe aussi : "Tout le monde connaît la place qu'occupe le sport en Espagne", illustre notamment le Français, "et nous connaissons très bien le marché du Vieux Continent". 

Et s'il garde la tête sur les épaules, Stéphane Gregori ne s'empêche en tous cas pas de se projeter vers un avenir radieux. "Notre objectif est d'être rentables dès la seconde année, et de générer 50 millions d'euros de chiffre d'affaires d'ici 5 ans, tous business confondus. En 2030, il s'agit d'être consolidés aux US et de disposer de plusieurs millions d'utilisateurs dans le monde, pour préparer une sortie en bourse", avance-t-il. 

Affaire à suivre, à n'en point douter… Et d'ici là, rdv au club !