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Une tempête polonaise nommée Wanda Traczyk-Stawska 

Si elle ne figure pas dans le Dictionnaire insolite de la Pologne, j’ai décidé de rendre hommage ici à une femme qui a été plébiscitée à la désignation de « citoyenne de Varsovie de l’année 2021 » : Wanda Traczyk-Stawska surnommée aussi affectueusement et respectueusement « Pani Wanda ».

Adrian Grycuk Wanda_Traczyk-Stawska Polska Adrian Grycuk Wanda_Traczyk-Stawska Polska
Adrian Grycuk 2022 - Wanda Traczyk-Stawska dans la salle commémorative du cimetière des Insurgés de Varsovie
Écrit par Jean-Luc Sochacki
Publié le 10 mars 2024, mis à jour le 11 mars 2024

« Tais-toi, sale brute ! », Pani Wanda, une histoire de résistance

C’est en novembre 2021, que les médias européens ont découvert Wanda Traczyk-Stawska qui, lors d’une manifestation pro-UE, invectivait le militant d’extrême droite Robert Bakiewicz en lui ordonnant : « Tais-toi, sale brute ! »

Wanda Traczyk-Stawska est née le 7 mars 1927 à Varsovie. Dans la capitale, elle est allée à l’école dans le quartier de Brodno puis à Mokotów. En parallèle, Wanda Traczyk-Stawska faisait partie d’un groupe de scouts au sein duquel elle a appris l’autonomie, la « débrouillardise », la rigueur et la discipline. Elle a toujours dit que cette expérience chez les scouts a été très importante pour elle lors de sa participation à l’insurrection de Varsovie

Dès 1942, elle s’engage dans la Résistance polonaise et participait à « l’action N » - Akcja N - qui consistait à mener des opérations de tractages et de sabotages contre l’occupant nazi. Sur le jeune âge de certains soldats de l’AK et leur attachement à la capitale polonais, Wanda Traczyk-Stawska dit : “Byliśmy tylko jej wojskiem, byliśmy jej dziećmi” (« Nous n’étions que son armée, nous étions ses enfants ».) 

 

Officier de liaison pendant l’Insurrection de Varsovie, sous le nom de Paczek

Pendant l’Insurrection de Varsovie, surnommée Paczek (« Beignet »), elle est officier de liaison pour les divisions du bureau des éditions militaires et au bureau de l’information et de la propagande du quartier général de l’AK. Après avoir reçu une mitraillette « Błyskawica », elle est ensuite allée combattre, arme à la main sur le terrain, dans les troupes insurgées des quartiers de Śródmieście Północ et Powiśle. Le 6 septembre 1944, elle est grièvement blessée rue Smolna par des éclats de projectiles et conduite à l’hôpital de campagne n° 2 de l’hôtel « Terminus ».

 

Un temps prisonnière, mais jamais silencieuse

Après la reddition des insurgés, elle a été prisonnière de guerre dans différents stalags comme Lamsdorf, Zeithain, Altenburg puis au Stalag Oberlangen, camp libéré le 12 avril 1945 par des hommes de Stanisław Maczek (entrée Barman dans le Dictionnaire insolite de la Pologne). En 1946, atteinte de tuberculose, Wanda Traczyk-Stawska est envoyée en Égypte, dans un ​l’hôpital de guerre anglais.

De retour en Pologne, elle termine ses études de psychologie à l’Université de Varsovie, puis travaille dans des écoles spécialisées comme celle de Praga-Polnoc. En parallèle, elle a toujours contribué à faire vivre la mémoire de l’insurrection de Varsovie.

 

« Nous avons toujours été en Europe ! »

Engagée dans de multiples causes comme le soutien aux personnes handicapées, elle a aussi manifesté en faveur d’une Pologne membre de l’UE en affirmant lors des manifestations pro-UE de l’automne 2021 : « Nous avons toujours été en Europe ! Et personne ne nous en sortira. Parce que nous sommes nés ici depuis le début. Ce sont nos racines, et nous l’avons dans la phrase “Pour notre liberté et la vôtre !” ».

Wanda Traczyk-Stawska s’est aussi élevée contre les nouvelles lois qui rendent l’avortement plus difficile en Pologne et s’est toujours battue pour les droits des femmes : « Il est important de ne pas avoir peur de se battre pour les droits des femmes et la liberté féminine. Important de lutter pour la dignité féminine ! ».

Pani Wanda aujourd’hui âgée de 95 ans est symbole de force, de courage, de sagesse, de révolte et de dignité pour une partie des Polonais. Elle a toujours mis l’Humain au centre de ses combats et elle persiste à dire que « Chaque personne a sa propre dignité humaine. Nous nous sommes battus pour cette dignité, nous la plus jeune génération de soldats polonais » et qu’il convient de bien vivre ensemble :  « Ensemble, parce que nous sommes la famille humaine, peu importe la couleur de peau, la richesse ou les opinions ».

 

Les articles de Jean-Luc Sochacki sont publiés en partenariat avec le site Boisko.blog

Le Dictionnaire insolite de la Pologne, est paru aux éditions Cosmopole.

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