Le terme Polin signifie à la fois « reposez » et « installez-vous ici » en hébreu. La légende raconte qu’en arrivant sur les terres de ce qui deviendra plus tard la Pologne, le peuple juif aurait entendu une voix leur chuchoter ce mot. C’est au cœur d’une forêt symbolique que s’ouvre la visite du musée qui a choisi de porter ce nom significatif.
L’idée de créer un musée de l’histoire des Juifs polonais est venue de l’Association de l’Institut historique juif. Le projet, lancé en 1995, a vite obtenu un soutien important, en Pologne comme à l’étranger. Si le musée a pu voir le jour, c’est en grande partie grâce à la participation de donateurs individuels et institutionnels du monde entier. Il fut inauguré officiellement en 2005.
Le musée POLIN représente le fruit d’un partenariat entre pouvoirs publics et organisations non-gouvernementales. En tant qu’institution culturelle moderne, il porte l’ambition de retracer 1000 ans de l’histoire des Juifs polonais à travers divers prismes, comme la culture, l’éducation, le commerce, la religion… Il s’agit avant tout d’un lieu d’échange et de commémoration, pour en apprendre plus sur le passé, comprendre le présent, et lutter contre les dangers de l’intolérance religieuse. C’est un endroit bien vivant pour raconter l’Histoire des Juifs au travers d’histoires de vie, de parcours singuliers. Un centre éducatif spécifique au musée a été développé dans cette optique afin de proposer des programmes précis, adaptés à tous les publics. Le département de recherche fait également l’objet d’efforts importants et sert d’espace de réflexion permanent autour de l’historiographie juive.
La modernité au service du passé
Le cadre élaboré pour accueillir cette exposition ambitieuse est un bâtiment géométrique et lumineux construit par l’architecte finlandais Rainer Mahlamäki. Composé de grands panneaux de verre, il s’élève à la hauteur des immeubles du style des années 1950 du quartier Muranów. Sa façade s’ouvre sur une brèche importante ; certains y voient une fracture qui sépare en deux le bâtiment, rappelant la perte irréparable des 3,3 millions de Juifs qui formaient la plus grande communauté juive du monde en Pologne en 1939 ; d’autres y perçoivent une forme d’arche, comme un pont entre deux cultures. L’emplacement du bâtiment est également très symbolique puisque le musée se dresse au cœur de l’ancien ghetto de Varsovie, non loin de l’ancienne prison Pawiak et de la Umschlagplatz, et fait face au monument du sculpteur Nathan Rapoport, érigé en 1947 en l’honneur de l’insurrection juive de 1943.
Une visite interactive
Visiter le musée POLIN, c’est accepter de se plonger dans un parcours balisé un peu sinueux qui nous fait revivre 1000 ans d’Histoire en seulement quelques heures, une véritable rétrospection historique pour laquelle il faut prévoir un peu de temps.
Au début, on peut se sentir un peu perdu au milieu des panneaux d’information, l’exposition étant extrêmement dense – prendre un audioguide pour seulement 10 PLN supplémentaires est une bonne aide pour suivre le fil de la visite. Bien vite, on se sent happé par l’interactivité du musée : installations multimédia, tablettes tactiles, enregistrements sonores, documents d’archives, photographies, projections de films… Les sources sont diverses ! Le grand point fort du musée, ce sont ses reconstitutions qui rendent la visite extrêmement vivante, comme la reproduction de l’intérieur de la synagogue en bois de Gwozdziec (18e s.) dont la coupole polychrome est incroyable.
On suit tout un parcours chronologique bien documenté et fourni, divisé en plusieurs « chapitres ». Dès leur arrivée, vers 960, le commerce a pris une place très importante dans l’organisation de la vie des Juifs en Pologne. Les grandes villes comme Poznań, Płock, Varsovie et Cracovie ont rapidement développé un quartier juif dans leur enceinte. Le musée dépeint l’épanouissement de la communauté juive en Pologne, rendu possible grâce à une législation favorisant la défense de la liberté de culte durant « l’âge d’or » (XVI-XVIIIe s.). La suite de la visite retrace ensuite la montée de l’antisémitisme sous la domination russe. Les phénomènes d’industrialisation et de nationalisation voient grandir le questionnement de la communauté juive : existe-t-il une nation juive ? Différents mouvements se dessinent en réponse, certains plus conservateurs et d’autres plus modernistes, en particulier dans la période de l’entre-deux-guerres. L’exposition nous plonge dans toute la richesse et la diversité de la culture juive au début du XXème siècle avant d’en arriver à l’horreur de la Shoah et les marques indélébiles laissées par les atrocités des nazis. La dernière section de l’exposition est consacrée à l’après-guerre, du régime communiste jusqu’à aujourd’hui.
Une visite poignante qui mérite véritablement le détour pour mieux connaitre l’histoire et la culture des Juifs en Pologne – vivement recommandé à tous les Varsoviens, résidents ou juste de passage, vous ne serez pas déçus !
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