Avec “Entrelacés”, l’événement qui se tiendra ce vendredi 27 mai au Centre del Carme Cultura Contemporània de València (CCCC), la pianiste Marina Delicado nous invite à un concert de piano contemporain et minimaliste autour des œuvres de Philip Glass. Une rencontre originale entre la danse, le piano et l’art visuel. Une manière aussi pour cette artiste, Valencienne de naissance et Belge d’adoption, d’exprimer son amour envers le public francophone et de tracer les contours de nouvelles formes de vivre-ensemble. Nous l’avons interviewée pour nos lecteurs.
Lepetitjournal : Pouvez-vous nous raconter votre parcours en quelques mots ? Comment êtes-vous devenue musicienne ?
Marina Delicado : De Bach à David Bowie, j’ai toujours écouté de la bonne musique à la maison. Mes parents et mes grands-parents ont beaucoup de disques. J’ai commencé par explorer ma voix, et à l’âge de huit ans, j’ai commencé le piano presque par hasard. À la maison, personne n’était musicien mais on m’a toujours encouragée à suivre mes envies. Et la musique m’a toujours donné beaucoup de richesse intérieure et de fantaisie.
Vous êtes pianiste et vous avez été formée à Paris et en Belgique, en plus de Barcelone et Valence. Pourquoi avoir choisi la France et la Belgique particulièrement ?
Les pianistes qui m’ont inspirée quand j’étais adolescente étaient Français, comme Hélène Grimaud, David Kadouch et Adam Laloum plus tard…C’est pour cela que j’ai toujours voulu aller étudier en France. Aussi, dès mes dix-huit ans, j’ai éprouvé une sensibilité particulière pour la musique française, notamment pour Debussy, Ravel et Boulez, leur musique me parle à un degré très personnel. Ce qui m’a amenée en Belgique à été le hasard, une fois encore. J’ai été acceptée au Conservatoire de Bruxelles avec un très bon maître, là j’ai eu l'opportunité de travailler à un très haut niveau et de rencontrer des professeurs et des collègues superbes, mais une des raisons en plus pour y aller c’était que là-bas j’avais la possibilité de parler français. Et que je n’étais pas loin de Paris pour suivre des cours complémentaires à L’école Normale de Musique Alfred Cortot.
Après avoir parcouru la Belgique et la France, retourner dans ma ville est un moment très important pour moi.
Vous entretenez un lien très particulier avec la francophonie et le français, qui se ressent dans votre formation et votre carrière. D’où vous vient ce lien ?
À part les musiciens que j’ai cités avant, je dirais la découverte des films de la Nouvelle Vague quand j’étais ado, voire Godard, Truffaut... Films que j’ai eu l’occasion de voir plusieurs fois dans le cinéma de l’ancien Institut français, qui était d’ailleurs à côté de chez moi, et dont l'esthétique m’a toujours enchantée. C’est grâce à cela que j’ai voulu apprendre le français. J’ai commencé à écouter Radio France tous les matins et c'est ainsi que j’ai découvert la richesse culturelle de la France, d'autres musiciens, des institutions, comme le centre de recherche IRCAM ou le Concours de Musique Contemporaine d’Orléans, des auteurs, des artistes de toute sorte, enfin je me suis plongée de plus en plus dans la vie culturelle et même politique française. Et je voulais rencontrer tout ça de près.
Vous avez énormément développé votre carrière professionnelle en Belgique. Pourquoi ? Qu’est-ce que la Belgique vous apporte et vous a apporté professionnellement ?
La Belgique est mon deuxième chez moi. Là-bas, j’ai vécu cinq ans de ma vie et je continue d’y aller régulièrement et d’y avoir des projets. Je suis arrivée à Bruxelles quand j’avais 21 ans et j’ai grandi non seulement en tant que musicienne mais aussi en tant que personne. J’y ai rencontré des gens incroyables qui font maintenant partie de ma vie et j’ai eu la chance de travailler avec des professeurs magnifiques. Je suis façonnée par la Belgique, pays qui m’a d’ailleurs accueillie très bien !
La culture francophone et votre amour pour cette dernière influencent-ils votre musique ? Comment cet amour et cette passion se reflètent-ils dans votre art ? Pourra-t-on le retrouver dans votre projet multidisciplinaire qui verra le jour en juin prochain ?
On le voit sûrement dans mes choix de programmes. J’inclus très souvent de la musique française dans mes récitals. Mon projet multidisciplinaire au Festival dels Horts mène de front une expérimentation sonore et du mouvement, une exploration de la relation du pianiste avec l’instrument, et envisage les manières de sortir des cadres établis. Rien de tout cela n'aurait pu être envisageable sans l’influence et la découverte de collectifs et institutions comme l’IRCAM à Paris et l’Ensemble Ictus en Belgique, et leurs recherches d’autres possibilités sonores.
Ce vendredi 27 mai, vous serez en concert dans le cadre de l’événement “Entrelacés” organisé par La Base Culture - Maison des francophonies au CCCC. Est-ce important pour vous d’être présente et d’y participer en tant que musicienne mais également passionnée de la francophonie ?
Oui ! Évidemment, je suis très heureuse de prendre part à cet événement non seulement en tant que pianiste, mais aussi en tant que passionnée de la francophonie. Très heureuse aussi de partager la scène avec le chorégraphe français Mikael Fau, avec qui j’ai très envie de collaborer. Pour moi, c’est un moment très important, après avoir parcouru la Belgique et la France, de retourner dans ma ville et de jouer sur le piano de l’Institut français (ou de La Base Culture, ou de la francophonie). Ce sera un moment magique.