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XXI. SHIMADA (Shizuoka)

en reposen repos
Écrit par Wotan Jhelil
Publié le 14 août 2021, mis à jour le 14 août 2021

Ma chambre est très sommaire : un lit double avec un couvre-lit brun, une fenêtre à rideaux jaunes donnant sur une rue passante, une moquette en damier rouge et noir, un écran plat mural et un petit bureau pour écrire l’avancée de mon voyage.

 

NETTOYAGE EN PROFONDEUR

Dans la salle de bains : des toilettes électriques à la japonaise avec les fonctionnalités basiques, à savoir un jet d’eau avant et arrière, et une baignoire, d’une vague tonalité crème, d’un bloc avec le sol, comme c’est fréquemment le cas au Japon – la salle entière faisant office de douche, de bain, de séchoir et ici de sanitaires. Après une bonne grasse matinée, je me relave, puis je scrute méticuleusement mes pieds en insistant bien sur la zone entre mes orteils pour m’assurer de sa guérison. Je pose mes pansements orthopédiques, composés d’une matière souple proche de celle d’une peau synthétique qu’on trouve sur certains jouets. Sûrement du latex.

Vers 13 heures, je me décide à utiliser la laverie de l'hôtel pour une lessive ô combien nécessaire ! Prenant mon courage à deux mains, je descends, vêtu d’un kimono prêté par le service de l’hôtel, les quelques étages me séparant de la salle des machines à laver pour en lancer plusieurs, suffisamment pour ne pas avoir à faire trop d’allers-retours hors de mon antre. J’insère sept cents yens, de quoi faire sept cycles de trente minutes sur trois machines différentes : certains de mes vêtements ont bien besoin d’une heure de nettoyage… Je m’achète une eau aromatisée à la pêche dans un distributeur placé à l’usage des clients avant de remonter la boire devant la télévision.

FLÂNERIE

Je grignote des biscuits soufflés au chocolat aussi légers que volumineux, en prenant un plaisir enfantin à briser les aériens cylindres de céréales à la seule pression de ma langue contre mon palais, exerçant une succion régulière presque douloureuse à la longue. Trop fatigué pour sortir m’acheter de la vraie nourriture, je reste là, à buller les yeux rivés sur le plafond, étendu sur le lit.

Sur NHK, plus grosse chaîne publique japonaise, une émission pour enfants m’apprend à utiliser les fractions en japonais en comptant les parts de pizzas volées dans une enquête policière. Je prends note. En France, on est en plein mouvement des gilets jaunes. Le sujet du débat est trop complexe pour que j’en saisisse les détails, mais je suis surpris de voir que, dans un premier temps, les médias locaux semblent soutenir les manifestants ! J’en suis d’autant plus perplexe que le gouvernement de Shinzo Abe – tout comme ses quelques prédécesseurs – suit une ligne clairement néolibérale conservatrice, économiquement très agressive pour la population, et qu’il n’hésite pas à user de la force pour imposer sa volonté sur les groupes récalcitrants, comme c’est actuellement le cas pour les manifestations anti-occupation militaire d’Okinawa. Le gouvernement vient de décider le déplacement et l’agrandissement de la base américaine de Futenma, au détriment de la population locale craignant les débordements occasionnels des soldats états-uniens en permission et la destruction importante de l’environnement.

Ma lessive étant terminée, je flâne encore quelques heures. Le soir tombe alors que je rattrape mon retard dans mes notes de parcours. Après ma troisième douche depuis mon arrivée, je me rase enfin, retrouvant mon visage juvénile pour quelques jours. Pleinement reposé, je m’endors à la même place que celle de mon réveil en fin de matinée. Une sensation rassurante qui ne tarde pas à me plonger dans un sommeil réparateur.

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