Mercredi à 8h45, finalistes et jury, entourés de l’ambassadeur de France en Suède, se réunissaient à la Résidence de France pour désigner le vainqueur de l’édition 2021 du meilleur croissant de Stockholm. Après dégustation et délibération, c’est la boulangerie Fosch qui a décroché le graal.
Un concours de croissants, gastronomique et convivial
L’ambiance dans les jardins de l’ambassade était légère et bon enfant entre les différents invités. Chacun était arrivé avec ses croissants frais, dans l’espoir de déclencher chez les juges le déclic tant attendu. Après un discours insistant sur le sérieux de cette occasion, qui mêle gastronomie et art, Sébastien Boudet a introduit le prestigieux jury, composé notamment de Monsieur l’ambassadeur, de Sébastien Boudet lui-même, ou encore de la cheffe française Léa Marion. Huit tables individuelles étaient disposées pour chaque membre, puis les plateaux de viennoiseries sont arrivés.
En observant les juges, on comprend aisément que tout est pris en compte. L’odeur, l’aspect, la texture, et bien sûr le goût.
La texture est très importante. On doit retrouver du croustillant à l’extérieur et du fondant à l’intérieur. Quant au goût, il faut sentir le beurre, pur et bien marqué ».
Léa Marion, cheffe de partie au restaurant étoilé Oaxen Krog
Les matières premières sont importantes. Il faut une profondeur, qui s’obtient entre autre avec du sel de mer, des farines pas trop blanches, un beurre de qualité, et un sucre pas raffiné. Néanmoins, le tour de main permet d’obtenir une bonne texture de pâte.
Sébastien Boudet
Après avoir goûté toutes les créations, la délibération dure quelques minutes, le temps pour tout le monde d’échanger dans la bonne humeur. D’ailleurs, Per Lundberg, gagnant de cette édition avec Fosch, l’affirme « je rencontre d’autres confrères de ce milieu, ce qui est enrichissant ». Pour le pâtissier français Sébastien Boudet, « ce genre d’évènements est génial, surtout après ces mois de coronavirus. Les gens sont en mal du pays et d’interactions sociales. On réapprend le contact et c’est important d’intégrer la culture suédoise à celle française et inversement ». Chaque juge dispose d’une feuille à remplir, avec le nombre de points attribués à chaque participant. Vers 10 heures, le verdict tombe :
5 - À la Lo
4 - Ritorno
3 - Skeppsbro Bageri
2 - Svedjan Bageri
1 - Fosch
Le vainqueur n’est autre que le seul concurrent bleu blanc rouge. La boulangerie Fosch a été cofondée par Damien Foschiatti, qui se décrit comme "un Français créatif fou". Depuis l'ouverture en 2016, l'établissement a raflé de nombreux prix : meilleur café de l'année 2019/2020 du White Guide, Prix de la gastronomie suédoise "Konditoriernas Konditori" de 2017 à 2019, ou encore le Guldraken "café de l'année" 2018 de Dagens Nyheter. Pourtant, ses adversaires peuvent être fiers, « sur les cinq finalistes, quatre sont des Suédois, ce qui prouve que les Français n’ont pas le monopole du croissant exceptionnel. Le classement était d’ailleurs très serré sur le podium », déclare Sébastien Boudet. Pour la jeune cuisinière française Léa Marion, tous les candidats « étaient très bons, peut-être même meilleurs que certains en France », même si « quelques-uns se sont clairement dégagés », elle assure que le niveau était très élevé.
Dans tous les cas, Per Lundberg a du mal à se rendre compte de sa première place avec Fosch, « j’espérais gagner mais je ne m’y attendais pas vraiment, car les autres concurrents sont d’excellents pâtissiers. Je suis encore en train de me pincer pour me rendre compte que c’est réel » dit-il en rigolant. Plus sérieusement, il reconnaît une certaine bienveillance au cours de cette matinée, et affirme que « ce sacre est une chance inouïe. C’est appréciable de voir son travail récompensé par ces professionnels de renom ».
Célébrer l’artisanat, les bons produits, et le métier de boulanger
Etienne Le Harivel de Gonneville, ambassadeur de France en Suède souligne que « le succès a été important en ligne, avec les votes du public. La compétition est devenue sérieuse, avec différentes boulangeries qui se sont lancées dans la course. Cela s’est transformé en concours gastronomique, célébrant un art, un artisanat, et un travail ». L’ambassade insiste bien sur l’intérêt de ce projet, qui est également de lutter contre l’afflux des croissants industriels sur le marché.
Même constat du côté de certains invités, comme Cecilia Ekfeldt, chargée d’affaires export agro / tech chez Business France, qui avance que « cette initiative permet de mettre en avant la France et ses bons produits ».
Enfin, Sébastien Boudet nous confie que ce concours vise aussi à promouvoir une profession entière, « nous ne mettons pas à l’honneur qu’un produit, mais aussi un métier : boulanger. C’est une profession dure, faite de sacrifices personnels. Mais lorsqu’on la fait avec passion, cela se ressent sur le produit fini ».
Le choix du croissant pour représenter la France n’a pas été anodin non plus. Pour Léa Marion, ce produit est un indicateur culturel, « on retrouve le croissant dans toutes les boulangeries. Presque 100 % des touristes qui viennent en France vont en manger durant leur séjour ». Sébastien Boudet la rejoint d’ailleurs, estimant que le croissant réunit tous les Français à travers le monde, « Quel Français à l’étranger n’a pas essayé de trouver un petit croissant pour se réconforter au petit-déjeuner ? C’est un symbole de la simplicité mais de l’artisanat ».
Pour Etienne Le Harivel de Gonneville, l’occasion se présente de mettre en avant des produits de choix, nécessaires pour obtenir un produit fini de qualité. « Dans le cas du croissant, le secret est dans le bon beurre, c’est pourquoi nous avons choisi Isigny-Sainte Mère comme partenaire. On met ainsi en valeur des fournisseurs français autour de cette pâtisserie » déclare-t-il.
Et pour la suite ?
Dans un futur proche, les vainqueurs du meilleur croissant vont être invités pour la cérémonie du 14 juillet 2021 à la Résidence de France. Une belle récompense pour ces artisans, synonyme de reconnaissance de leur implication quotidienne pour faire rayonner la pâtisserie.
En ce qui concerne une édition en 2022, la plupart des intervenants semblent unanimes : il en faudra une. Sans espérer une telle affluence pour le concours de cette année, Monsieur l’ambassadeur nous confie « nous n’avions pas forcément de projets pour la suite en démarrant cette édition, mais le succès étant, on aura probablement une seconde compétition en 2022. Il faudrait alors passer au stade supérieur : le meilleur croissant de Suède ». Sébastien Boudet va dans son sens, en expliquant que la Suède compte énormément de boulangeries de qualité, et il estime qu’« étendre l’édition 2022 à l’ensemble du territoire est possible, il ne faut pas manquer d’ambition ».
En tout cas, participants comme jurés seraient motivés à concourir de nouveau, comme l’assume Léa Marion « une nouvelle édition étendue à la Suède serait un beau projet. Cela permettrait de montrer que le savoir-faire français s’est bien exporté dans tout le pays ! ».