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INTERVIEW – Une nouvelle forme d’abstraction par Bernar Venet

bernar venetbernar venet
Écrit par Lepetitjournal Singapour
Publié le 26 septembre 2012, mis à jour le 22 avril 2019

L'artiste français Bernar Venet a fait le tour du monde avec ses sculptures monumentales, de Séoul au Château de Versailles, de l'Allemagne à l'Amérique, de Shanghai à la Nouvelle-Zélande. De nouveaux reliefs sculptés de sa série Grib sont à découvrir durant deux mois à la Art Plural Gallery

 

Installé à New York, l'artiste français Bernar Venet explore depuis toujours les notions d'indétermination, de désordre, de hasard et d'imprévisibilité.

Il est à l'honneur du 26 septembre au 24 novembre 2012 à la Art Plural Gallery où il expose de nouveaux reliefs sculptés de sa série « Grib », une extension de lignes en bois d'origine indéterminée qui ont été élaborées entre 1979 et 1983. Les travaux inclus dans cette exposition ont été fabriqués à partir de plaques d'acier de 35 mm et coupées à la main.

Autre point fort de l'exposition, sa sélection de peintures représentant des équations mathématiques en plastique, établies dans des formes libres. Il s'agit d'une synthèse parfaite de l'art et des mathématiques. Poussant son processus de peinture au-delà des limites conventionnelles, l'artiste superpose les couches les unes sur les autres et utilise des couleurs pour insister sur le contraste chromatique des murs blancs de la galerie. La couleur a pour vocation de faire ressortir les chiffres sur le mur.

Le petitjournal.com Hong Kong : Votre oeuvre va très loin dans le conceptuel, pouvez-vous nous expliquer la monosémie et ce vers quoi vous tentez de vous approcher par votre travail ?

Bernar Venet -  Le grand événement du XXème siècle a été la découverte de l'art abstrait avec des peintres comme Kandinsky, Malevitch ou Mondrian pour ne citer qu'eux. Pourquoi c'est une grande découverte ? Parce qu'après ces oeuvres d'art, qui par le passé étaient toujours la représentation de quelque chose d'existant, des artistes ont proposé des créations qui n'avaient rien avoir avec ce qui leur était extérieur. Aucune symbolique, aucune représentation. Et c'est dans cette veine-là que je travaille avec des artistes comme Donald Judd (l'objet spécifique) ou Frank Stella qui disait "What you see is what you see ". C'est ce qui m'intéresse depuis mes débuts qui datent de plus de 50 ans où j'avais déjà commencé avec cette radicalité dans ma série de tableaux noirs Goudron. Je n'ai pas calculé tout cela mais toute mon oeuvre ensuite a suivi ce cheminement.
Lorsque je me suis attaqué à l'utilisation de textes mathématiques, j'ai poussé au plus loin cette idée puisque la théorie mathématique est la chose la plus abstraite, la plus en dehors de tout.

Comment se déroule le processus de création et de fabrication de vos sculptures, souvent monumentales ?

J'ai une équipe de 17 personnes en Hongrie qui travaille pour moi en permanence. Je crée d'abord une maquette au petit format où le hasard a parfois sa part. J'improvise des variations tout en sachant vers quelle sculpture je souhaite me diriger. C'est ensuite mon équipe qui fabrique la sculpture à la taille que j'aurais demandé et selon des données très précises.

Adaptez-vous parfois vos sculptures à des lieux lorsque vous avez des commandes de pays ou d'institutions ?

Normalement je travaille pour créer uniquement sans aucun autre objectif mais mon travail étant désormais plus connu, il m'arrive qu'une ville ou une institution souhaite acquérir une de mes oeuvres existantes ou me fasse même une commande, comme cela a été le cas en Corée à Séoul, ou pour une société dans la ville d'Ulm en Allemagne. Je peux alors tenir compte des plans architecturaux du bâtiment en construction pour que mon arc s'insère au mieux dans l'univers en question. Parfois également je fais des photo-montages de mes maquettes grandeur nature dans un lieu proposé. La ville de Berlin a ainsi commandé une de mes sculptures pour célébrer son 750ème anniversaire.

Pourquoi un tel succès à l'international, notamment en Asie, et une relative bouderie dans le milieu artistique français ?

Cela a été un peu exagéré via un journaliste qui a lancé cette rumeur. De par la taille de mes sculptures, il n'est déjà pas toujours facile d'exposer mes oeuvres. J'ai exposé au Musée de Nice, Saint-Etienne, Grenoble, de Toulouse. A Paris, j'ai exposé au Champ de Mars, aux Tuileries et au Château de Versailles, difficile de me plaindre ! En fait, on dit ça car il est vrai que les musées parisiens me font un peu attendre mais je ne suis pas pressé, cela peut arriver même après moi et je suis comblé par la couverture médiatique et le succès de l'exposition au Château de Versailles.

Exhibition: Place d'Armes, Château de Versailles,
Photo credit: Archives Bernar Venet, New York

Et la peinture, que vous avez arrêtée pendant plus de 20 ans, pourquoi l'avoir reprise depuis quelques années et que cherchez-vous à y explorer ?

J'ai arrêté la peinture de 1978 jusqu'en l'an 2000. J'ai décidé de la reprendre à ce moment là en choisissant mes sujets en fonction de tout ce qui n'avait jamais été fait dans ce domaine. Mes peintures ne ressemblent à rien de ce que vous avez vu en art. On sait à quoi ressemble l'art abstrait (de l'art géométrique à l'art lyrique en passant par l'art expressionniste). Si on parle de l'art abstrait, on constate que mes tableaux ne peuvent y être classés dans aucune des cases existantes et qu'ils ont un degré d'abstraction encore jamais atteint jusque là. Du fait de leur contenu mathématique, abstrait, hermétique. Théoriquement, c'est intéressant, et visuellement c'est complètement nouveau.


Propos recueillis par Eric Ollivier (www.lepetitjournal.com-HongKong)  mercredi 26 septembre 2012

*Cette interview a été réalisée par l'édition du petitjournal.com de Hong Kong  en mai dernier dans le cadre du French May Festival.



 

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Publié le 26 septembre 2012, mis à jour le 22 avril 2019

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