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GASTON MÉLIÈS – Le documentaire de Raphaël Millet sur le frère de Georges Méliès, dans la sélection du festival du film de Singapour

Écrit par Lepetitjournal Singapour
Publié le 19 novembre 2015, mis à jour le 19 novembre 2015

A voir le 5 décembre, dans le cadre du Singapore International Film Festival (SGIFF), le documentaire que Raphaël Millet consacre à Gaston Méliès, frère méconnu de Georges. Gaston Méliès fait lui aussi partie des pionniers du cinéma, notamment à travers ce voyage en Asie-Pacifique qu'il fit de juillet 1912 à mai 1913. Sur les 64 documentaires et fictions réalisés à l'époque, Raphaël Millet en a retrouvé 5, ainsi que des photos et affiches, qui documentent un intrigant passage dans la région, notamment à Singapour, il y a un peu plus de 100 ans.

Lepetitjournal.com/singapour: Pourquoi cet intérêt pour Gaston Mélies?

Raphaël Millet - Parce que j'ai été amené, avec des années de distance, à croiser plusieurs fois la route de Gaston Méliès. La première fois, c'était en Polynésie en 2000. A l'époque je travaillais comme conseiller technique en charge de la culture au ministère de l'Outre mer. En déplacement en Polynésie, je me suis intéressé aux films et à la littérature qui avaient un rapport avec la région. Dans une note de bas de page, j'ai trouvé une référence à un certain G. Meliès, sans plus de précision sur le prénom. A l'époque je savais qu'il y avait deux frères Méliès, mais je ne connaissais pas Gaston. Sachant que Georges Meliès n'avait quasiment jamais quitté son studio de Montreuil, il me semblait impossible qu'il ait pu filmer en Polynésie. Il y avait donc là quelque chose d'intrigant.
La deuxième fois, c'est quand je suis tombé sur l'affiche de A day at Singapore, signée ?G. Méliès?, en explorant les ressources de la bibliothèque du Congrès, aux Etats-Unis.

Qu'est-ce qui vous a poussé à entamer des recherches?

- Ce qui m'a alors titillé, c'est que les gens n'aillent pas plus loin pour en savoir plus sur ce G. Méliès, certains se contentant de croire que c'était nécessairement Georges. En 2007, j'ai fait une recherche complète. Je suis entré en contact avec la famille Méliès. J'ai, en particulier, contacté Madeleine, la petite fille de Georges Méliès et petite nièce de Gaston. Dans la famille Méliès, seul le fils de Madeleine, Jacques Malthête, s'était intéressé à Gaston. Il avait réalisé tout un travail de recherche et avait même publié, via l'Association des Amis de Georges Méliès, un ouvrage ? Le voyage autour du monde de la G. Mélies Manufacturing Company - qui présentait toutes les lettres que Gaston avait envoyées à son fils Paul lors du voyage qu'il avait réalisé en Asie et en Océanie en 1912, ainsi que les synopsis de ces 64 films tels que retrouvés dans la presse de l'époque.

J'ai trouvé que c'était une belle histoire. On ne parle jamais des frères Méliès, comme on parle des frères Lumière, ou même des frères Warner, tout simplement parce qu'on ignore qu'il n'y avait pas que Georges, mais qu'il y avait une fratrie active dans le cinéma. Mon envie de travailler sur cette histoire est liée à cette ignorance et aussi à une interrogation : comment  Gaston Méliès a-t-il pu totalement tomber dans l'oubli juste après son décès en 1915? Il disparaît complètement; à tel point que, dans le monde, outre la publication associative mentionnée précédemment, je n'ai trouvé qu'un seul livre qui parlait de lui : un ouvrage américain, relatant l'aventure texane de Gaston

Cet oubli rapide a-t-il à voir avec le déclenchement de la Première Guerre Mondiale?

- C'est vraiment la fin d'une époque et le début d'une autre avec la création progressive d'Hollywood à partir de 1912, et sa montée en puissance pendant la Première Guerre mondiale, tandis que les studios européens s'effondraient.  A l'instar de Gaston Méliès, beaucoup de gens, acteurs, comédiens ou réalisateurs ont disparu au moment de la Première Guerre mondiale. Même Georges Méliès est entrainé dans la tourmente. Il s'arrête de tourner en 1913 et il est rapidement oublié. Georges Méliès vit jusqu'en 1938, mais il ne tournera plus et finira par vendre des jouets du coté de Montparnasse, où il ne sera redécouvert par des cinéphiles passionnés qu'en 1929. Un détail que met en scène le film Hugo Cabret réalisé par matin Scorsese. Dans le film, Georges Méliès est interprété par Ben Kingsley? A la fin du film, Scorsese montre une sélection de films tournés par Georges Méliès entre 1896 et 1913.  Mais aucune mention n'est faite de son frère Gaston.

Comment se présentait ce cinéma de l'époque?

- Ce sont les premiers temps du cinéma. Mais on a d'une manière générale tendance à s'intéresser toujours au début du début, c'est à dire en l'occurrence aux quinze premières années courant grosso modo de 1890 à 1905. Lorsque Gaston Méliès part faire son tour du monde, on est à la fin du début et cela n'intéresse personne. En 20 ans, l'équipement technique a beaucoup évolué. Celui que Gaston Méliès emporte avec lui est de meilleure qualité, mais il reste un matériel sur pied assez lourd et encombrant. Le Cinéma lui-même a déja suffisamment évolué et couvre un spectre allant du documentaire à la fiction. Par comparaison avec les débuts du cinéma où les premiers films des frères Lumière, mais aussi de Georges Méliès, duraient entre 50'' et 2', les films des années 1910-1914 sont un peu plus longs. Au moment où Gaston voyage, la durée des films est, en moyenne, de 10' à 15', parfois un peu plus. Par ailleurs, un réseau d'exploitation et de distribution est désormais en place.

Le Voyage de Gaston Mélies en Asie Pacifique
Comment Gaston Méliès, frère de Georges, devient-il lui-même cinéaste ?

- Lorsque Gaston est envoyé aux Etats-Unis en 1902, il le fait en premier lieu avec la mission de protéger la marque des films de Georges Méliès ? Star film-  sur place. Georges Méliès est devenu très célèbre avec son Voyage dans la lune qui est le premier grand film de science-fiction, une sorte de Star Wars de l'époque. Les Américains, peu respectueux des copyrights, ont commencé à exploiter les films sur place en grattant le logo de la marque Star Film. La mission de Gaston est de déposer les films aux Etats-Unis pour les protéger.

A partir de 1902, Gaston Méliès vit donc aux Etats-Unis, et tout d'abord à Manhattan même. Il se met progressivement à produire ses propres films pour répondre à la demande aux Etats unis à un moment où Georges Méliès est moins actif. Gaston tourne d'abord ses films à Fort Lee, dans le New Jersey, qui est à l'époque une sorte de préfiguration de ce que sera Hollywood après la Première Guerre mondiale. Sur place, d'autres grands studios français ? Pathé, Éclair- sont présents. On l'oublie bien souvent, mais à l'époque, le marché du cinéma est déjà très internationalisé et il est dominé par les Français.

Quels types de films réalise-t-il aux Etats-Unis?

- Gaston fait ce qui se fait alors : des comédies, des drames et des westerns. D'une certaine manière, il paraît soucieux de prendre le contrepied de ce que fait son frère : alors que Georges Méliès tournait en studio, Gaston va rapidement se mettre à tourner autant que possible en extérieur. Il est à la recherche de quelque chose de réel, de vrai, de frais, en choisissant  les décors et en faisant jouer de vrais cow boys et, semble-t-il, même des Indiens. En 1910, il déménage au Texas, à San Antonio, où il tourne la toute première reconstitution de la bataille d'El Alamo, dans laquelle s'était illustrée Davy Crockett, précédant de 50 ans ce que fera John Wayne en 1960.  En cela, Gaston Méliès est un pionnier.

L'année suivante, il déménage à nouveau et s'installe en Californie, à Santa Paula, tout près d'Hollywood, précédant de quelques mois ce qui sera le premier studio hollywoodien (le Nestor Studio).  Et là, je ne sais pas ce qui se passe. Gaston semble être au bon moment au bon endroit, au début de ce qui sera un âge d'or du cinéma. Mais lui prend tout cela à rebrousse-poil et, comme il le confie dans une interview à l'époque, déclare qu'il est ?fatigué  des cowboys?. Probablement avait-il envie d'aller là où les autres n'étaient pas encore allés.

Le Voyage de Gaston Mélies en Asie Pacifique
C'est alors que démarre son fameux voyage en Asie-Pacifique?

?- En 1912, Gaston Méliès s'embarque avec sa femme, une lointaine petite cousine de Sarah Bernardt, et une quinzaine de personnes. Le voyage va durer 10 mois, de juillet 1912 à mai 1913. L'équipe va parcourir la Polynésie, la Nouvelle-Zélande, l'Australie, Java, Singapour, le Cambodge et le japon.

Dans la troupe figurent plusieurs acteurs qui incarnent chacun des stéréotypes. Le gros dur, l'ingénue, le jeune premier? Il y a même avec lui un ?cow boy? : Juan Ortega. Les deux acteurs principaux, ceux qui vont rester avec lui jusqu'au bout, sont Ray Gallagher et Fanny Midgley.

Il se met à tourner immédiatement. L'embarquement sur le bateau fait même l'objet du premier tournage. Gaston Méliès y apparaît lui-même, franchissant la passerelle. Gaston n'apparaît pas comme acteur dans ses films du voyage, mais, à la manière de ce que fera Hitchcock plus tard, il fait des apparitions fugaces à l'arrière-plan. C'est un peu comme une ?signature visuelle? de sa part. Outre la scène de l'embarquement, on retrouve aussi Gaston tout sourire en arrière-plan d'une scène tournée en Polynésie.

Parce que, ce que tourne Gaston Mélies, ce sont des sortes de docu-fictions ?

A la fin de ces premier temps du cinéma, celui-ci cherche encore à affiner son langage. Il explore les différentes veines. C'est un art fondamentalement hybride qui oscille entre le réel et l'imaginaire. Gaston Méliès est complètement dans cette hybridité, embrassant le cinéma dans la totalité de son potentiel. Il fait donc aussi bien de la fiction (en mettant en scène drames ou comédies) que des documentaires (qu'il appelle bien souvent des ?vues éducatives?). Le cinéma est en train de découvrir le monde. Gaston sait qu'en Polynésie, il est l'un des tout premier à tourner des images, et c'est sans doute aussi pour cela qu'il a choisi une telle destination.  En même temps, il a plus d'ambition que de simplement ?enregistrer le réel?, et ne va pas là bas juste pour faire des bandes d'actualité. C'est bien pour cela qu'il amène avec lui une troupe d'acteurs : pour raconter des histoires.

Il a négocié un accord avec des distributeurs et des exploitants de salles. Ses premiers films sont exploités commercialement aux États-Unis, en Angleterre et en France. Les premiers sont d'ailleurs projetés dès début 1913, alors qu'il n'a même pas fini sont voyage. Il les envoie au fur à mesure des étapes à son fils Paul, resté aux États-Unis pour les réceptionner et les commercialiser. Les premiers films du voyage, montrant la Polynésie, la Nouvelle-Zélande, ont, pour certains, beaucoup de succès. Mais, sur le terrain, Gaston Méliès se heurte, notamment à cause du climat, à de nombreux problèmes techniques, qui vont grandissant, particulièrement dans des contrées aussi chaudes et humides que le Nord Queensland ou encore le Cambodge. Certaines pellicules sont abimées, soit au tournage soit au développement, d'autres se détériorent rapidement dans leurs boîtes mêmes.  Autant dire que c'était là une aventure cinématographique qui n'avait rien de facile.

Pour se lancer dans une telle aventure à cette époque, Gaston Méliès était-il un doux dingue?

Gaston Méliès n'avait rien d'un doux dingue. Dans la fratrie, Georges avait sans doute un côté fantasque ou, pour le dire autrement, un esprit incroyablement inventif à même de s'engager dans des voies inattendues. C'était un aventurier de l'imaginaire. Gaston, lui, a toute sa tête. Il aborde le cinéma comme un entrepreneur. Il a gagné suffisamment d'argent aux États-Unis pour financer son voyage. Son objectif est de faire le maximum de films, et de gagner de l'argent avec. Mais en même temps, c'est un esprit sans doute relativement curieux, relativement ouvert, et, de manière assez novatrice, il se met rapidement à tourner avec des acteurs locaux, au gré des étapes de son voyage : des Tahitiens, des Maoris, des Aborigènes, des Cambodgiens, et qui plus est en ne les cantonnant pas à être de simples figurants, mais en leur donnant parfois des rôles de premiers plans. Par exemple, pour le film Hinemoa tourné en Nouvelle-Zélande, le rôle titre, celui d'Hinémoa justement, est joué par une actrice maorie?. C'est extrêmement novateur, à une époque où, aux États-Unis, les rôles de personnes de couleur sont tenus par des blancs ? plus ou moins bien ? maquillés.  En même temps, ne soyons pas naïfs, si Gaston fait certes ici preuve de grande ouverture, sachant aller au-delà des préjugés de son temps, il le fait aussi parce qu'il sait que cette nouveauté attirera le public. Il a d'ailleurs généré beaucoup de publicité sur le fait qu'il avait une actrice maori dans le rôle titre.

Quel cinéaste était-il ?

- Il n'est pas un des grands inventeurs du cinéma et n'avait pas l'imagination folle de son frère Georges qui, au regard de la grande histoire du Septième Art, reste beaucoup plus important. Les fictions et documentaires de Gaston n'ont rien de plus, rien de moins que les fictions et documentaires de l'époque. A la seule différence, qu'il n'hésite pas à faire jouer des locaux, dans ce qu'on appelle encore à l'époque des ?rôles indigènes?. A vrai dire, Gaston n'était pas mécontent de se débarrasser du jeu un peu forcé des acteurs occidentaux, largement hérité du théâtre ou du music-hall. A Singapour, le film qui a été tourné à Pasir Ris l'a vraisemblablement été avec des Malais, si l'on en croit l'une des images publicitaires qui en subsiste. Par conséquent, s'il ne faut pas trop exagérer sa place dans l'histoire du cinéma, il ne faut pas trop la minimiser non plus : Gaston Méliès a été le premier (et parfois, je me demande aussi s'il n'a pas été le dernier? donc le seul?) a faire un voyage de ce type, aussi long, en embauchant les gens du cru, en leur donnant de vrais rôles, et donc en leur offrant leur première chance d'exister pleinement à l'écran. Il a sa place dans la mécanique en marche du cinéma, sachant que ces derniers films tournés en 1913 sont distribués tout début 1914 et correspondent en cela à la toute fin des premiers temps du cinéma. C'est bien là qu'il faut historiquement resituer Gaston Méliès et son oeuvre.

Le Voyage de Gaston Mélies en Asie Pacifique
Combien de films Gaston Méliès réalise-t-il pendant ce voyage?

Au total, il a tourné 64 films pendant ce voyage. Je n'ai pu retrouver la trace que de 5 d'entre eux. Ce qui correspond hélas à un ?taux de survie? normal puisque les historiens du cinéma s'accordent à considérer que 90% des films muets ont disparu. Deux des films que j'ai retrouvés ont été tournés en Polynésie. Le premier est le tout premier de la série puisqu'il commence sur le bateau et finit à Papeete. C'est un documentaire sur son propre voyage auquel Gaston ajoute de la fiction. Ces images sont, sauf erreur, parmi les plus anciennes de Tahiti.

Deux autres films ont été réalisés à Angkor. Le site avait été redécouvert en 1859 par le français Henri Mouhot. À l'époque du voyage de Gaston, l'Ecole Française d'Extrême-Orient, créée en 1900, venait tout juste de se voir confier en 1907 la conservation du patrimoine archéologique du site d'Angkor. Lorsque Gaston Méliès arrive cinq ans plus tard, l'EFEO avait donc tout juste commencé à faire les premiers travaux de déblaiement. Mis à part Angkor Wat, l'ensemble du site n'avait pas encore été dégagé de l'emprise de la jungle, chose que l'on peut voir si l'on regarde avec attention les images tournées par Gaston Méliès au Bayon, au centre d'Angkor Thom  Ces images sont d'un immense intérêt historique et archéologique, car elles permettent de voir le site tel qu'il se présentait il y a cent ans.

Le cinquième film  que j'ai retrouvé porte sur le judo au Japon. Il était détenu par la famille Méliès elle-même. Mais il n'avait jamais été numérisé, et demeurait donc largement inconnu. Dans son genre, c'est un véritable petit joyau. Les images ont été tournées en extérieur dans le dojo même où a été créé le judo. On y voit le maître Kano Jigoro, fondateur du judo. Les responsables du Dojo actuel, qui existe toujours, m'ont dit qu'ils avaient une copie vidéo du film en question. Toutefois, même en me rendant sur place au Japon pour les rencontrer, je n'ai pu visionner la dite cassette, et n'ai donc pu vérifier qu'il s'agit des mêmes images que celle du film retrouvé chez la famille Méliès. Ce qui est certain, c'est que sur ce film, que j'ai fait numériser chez Éclair,  on peut voir, en pleine démonstration de judo, les premiers praticiens de cet art martial, qui ont contribué à en poser les bases. Certains d'entre eux sont d'une élégance, et presque d'une ?légèreté? étonnante, si bien qu'il y a presque une dimension chorégraphique dans le judo qu'ils pratiquent.

100 ans après le voyage de Gaston Méliès en Asie pacifique, réaliser un  documentaire sur ce sujet a semble-t-il été, aussi, une grande aventure?

J'ai essayé de refaire le voyage aujourd'hui et j'ai constaté que ce n'était pas si simple que ça . Mon objectif était de repartir sur les traces de Gaston Méliès pour mieux comprendre ce qu'il a essayé de faire. J'ai commencé par faire des recherches. J'ai écrit le projet et le script qui va avec. Lorsque j'ai commencé je n'avais encore retrouvé aucun film du voyage, je ne savais même pas s'il en existait.

Vous êtes allé tourner dans les différents pays où Gaston Méliès avait séjourné ?

J'ai filmé des images sur les lieux où Gaston Méliès avait fait ses tournages. Dans un certain nombre de cas, je suis parti avec un opérateur, car j'avais obtenu que la société Angénieux, qui a bien voulu soutenir le projet, mette à ma disposition deux objectifs professionnels d'une très grande qualité, permettant un rendu artistique de haut niveau. La luminosité particulière, et parfois la beauté des paysages polynésiens, néo-zélandais, australiens, l'imposaient presque. Dans d'autres cas, j'ai tourné les images moi-même : toutes celles à Singapour, au Cambodge, au Japon, à Java, mais aussi des images complémentaires en Polynésie, Nouvelle-Zélande et Australie.  Et même quelques images en Corse, car c'est en quelque sorte là que le film se termine, puisque c'est sur l'île de Beauté que Gaston Méliès décéda en avril 1915.

A Singapour, je suis allé filmer à Pasir Ris, précisément là où Gaston Méliès avait tourné sa fiction intitulée The Poisoned Darts. Cette histoire de ?fléchettes empoisonnées?, dans laquelle un naufragé est sauvé par les habitants, joués par des acteurs malais, est très intéressante. Méliès tourna une autre fiction, intitulée His Chinese Friend, qui parle de l'amitié entre Charlie, un Américain, et Wing, un Chinois de Singapour, que l'on voit à trois âges différents de leur vie.  A cela s'ajoutent deux documentaire tournés également à Singapour, dont un intitulé ?A Day at Singapore? qui fait le tour des endroits les plus pittoresques de l'époque. De ce dernier il ne reste que peu de choses, hormis des photos prises sur le tournage et un très beau poster en couleur (cf illustration) qui est vraisemblablement le plus ancien poster de cinéma montrant Singapour ! Une rareté.

Me rendre sur place m'a permis de comprendre la géographie du voyage et de resituer les photos et les films dans leur contexte. En Nouvelle-Zélande, j'ai rencontré un étonnant spécialiste du cinéma des premiers temps qui détenait une foule de petites informations liées à l'aventure néo-zélandaise de Gaston. Mieux encore, en Polynésie, j'ai pu retrouver des descendants des personnes avec qui il avait tourné. Mais je ne les ai pas intégrées dans le documentaire qui sera projeté à Singapour, pour ne pas le déséquilibrer avec un angle qui n'aurait été traité que pour la Polynésie.  J'ai gardé cela pour un autre documentaire, uniquement centré sur le voyage de Méliès à Tahiti.

Comment produit-on un documentaire comme celui-ci?

J'ai créé ma propre société audiovisuelle, Nocturnes Productions, en 2007, avec un associé, Olivier Bohler, qui partage avec moi une passion profonde pour le cinéma, et particulièrement pour son histoire. En raison de cela, nous nous sommes spécialisés dans les documentaires, souvent d'assez long format, sur le cinéma. A notre catalogue se trouvent des films consacrés à des cinéastes comme Jean-Pierre Melville, Jean-Luc Godard, Pierre Schoendoerffer, etc. Nous en avons aussi produit un sur le grand cinéphile qu'est Edgar Morin, d'une durée de 82', qui est sorti en salles en France en avril dernier (chose assez rare pour un documentaire). Et au bout du compte, les années passant, les productions s'enchaînant avec régularité, ce tout dernier film sur le voyage de Gaston Mélies en Asie?Pacifique est déjà notre 9ème documentaire.

Quand pourra-t-on le voir à Singapour?

Le documentaire a été sélectionné par le Festival international du film de Singapour (le SGIFF) pour une projection le 5 décembre 2015. Ce sera sa ?première asiatique?, comme on dit ! Et comme il sera montré dans la toute nouvelle salle de la National Gallery, à quelques mètres de l'hotel Adelphi où était descendu Gaston Méliès lors de son passage à Singapour, c'est vraiment ramener celui-ci sur les lieux mêmes où il était venu une centaine d'années auparavant. Parfait pour un documentaire dont l'intention première est de faire redécouvrir ce patrimoine cinématographique partagé entre la France et tous les autres pays, dont Singapour, par lesquels est passé Gaston Méliès!

?Propos recueillis par Bertrand Fouquoire (www.lepetitjournal.com/singapour) vendredi 20 novembre 2015

La page du film sur le site du festival : http://sgiff.com/browse-all-films/gaston-melies-and-his-wandering-star-film-company/
Le trailer international du film :

 

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Publié le 19 novembre 2015, mis à jour le 19 novembre 2015

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