Célébrée depuis 1868 et officiellement reconnue depuis 1879, la fête du Canada marque l’entrée en vigueur de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. Le 1er juillet 1867, quatre provinces donnaient naissance à un dominion au sein de l’Empire britannique. Si cette journée est aujourd’hui synonyme d’unité, elle porte aussi les traces d’un passé colonial, de tensions fédérales et de revendications identitaires encore vives, notamment au Québec.


Une date fondatrice sous influence britannique
Le Canada naît officiellement le 1er juillet 1867, par l’effet d’une loi votée… à Londres. L’Acte de l’Amérique du Nord britannique, adopté par le Parlement britannique à la demande des élites coloniales, unit alors l’Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick dans une fédération appelée « Dominion du Canada ». « C’est une construction politique née d’un compromis entre des intérêts divergents, dans un contexte d’instabilité intérieure et de crainte d’une annexion américaine », rappellent les historiens.
Un Dominion est une colonie de l’Empire britannique qui a obtenu une autonomie politique, tout en restant liée à la Couronne pour la politique étrangère et les changements constitutionnels. Le Canada a reçu ce statut en 1867.
Le Canada n’est pas encore pleinement souverain : ses relations internationales demeurent sous la tutelle de la Couronne britannique, et toute modification de sa constitution requiert l’approbation de Londres jusqu’en 1982. La fête du 1er juillet commémore donc d’abord une autonomie relative, dans l’attente d’une véritable indépendance constitutionnelle.
Une célébration multiforme, miroir d’un pays pluriel
Chaque 1er juillet, la fête du Canada se décline en parades, concerts, cérémonies officielles et feux d’artifice, avec son épicentre sur la colline du Parlement à Ottawa. L’événement est aussi marqué par l’assermentation de nouveaux citoyens, symbolisant l’ouverture du pays. « C’est un moment de rassemblement et de fierté, mais aussi de réflexion sur notre histoire collective », affirme un responsable du ministère du Patrimoine canadien.
Cette fête revêt pourtant des formes diverses selon les régions. Au Québec, elle coïncide avec la "journée du déménagement", un rituel bien particulier qui vient atténuer la ferveur nationale. À Wendake ou à Québec, des festivals mettent davantage l’accent sur les cultures autochtones. À l’étranger, les Canadiens expatriés fêtent leur pays sur Trafalgar Square à Londres, ou dans les consulats de Shanghai et Mexico.
Une Constitution à géométrie variable
La fête nationale est aussi l’occasion de revenir sur le socle juridique du pays. Si l’Acte de 1867 posait les fondations d’un système fédéral, il a fallu attendre la Loi constitutionnelle de 1982 pour que le Canada devienne entièrement maître de ses institutions. Ce texte introduit la Charte canadienne des droits et libertés, reconnaît les droits autochtones et consacre la suprématie de la Constitution. Mais le Québec, qui n’a pas signé ce texte, conteste depuis lors sa légitimité.
Le Québec n’a pas donné son accord à la Loi constitutionnelle de 1982, qui a été adoptée sans sa participation aux négociations finales. La province estime que ses revendications — notamment la reconnaissance de son statut de société distincte et un droit de veto sur les révisions futures — ont été ignorées. Cette exclusion, vécue comme une rupture du pacte fédératif, alimente depuis un contentieux toujours vif.
« Le Québec n’a jamais donné son consentement politique à la Loi de 1982 », rappelle un juriste. Le contentieux constitutionnel reste vif : refus d’un droit de veto, non-reconnaissance du statut de société distincte, exclusion des négociations finales... autant de blessures qui nourrissent un nationalisme québécois persistant. La fête du Canada ne fait pas l’unanimité, et elle ne peut ignorer cette fracture.
Le Canada : un pays bâti par étapes, une identité à recoudre
Une célébration en quête de sens
La fête du Canada célèbre bien plus qu’un anniversaire : elle condense les paradoxes d’un pays vaste, divers, bâti sur des compromis historiques et des oublis douloureux. Entre reconnaissance du passé colonial, affirmation des identités autochtones, tensions fédérales et ambitions de vivre-ensemble, le 1er juillet est autant un point d’orgue festif qu’un miroir des défis du pays. Et si, au-delà des pétards et des drapeaux, cette journée devenait l’occasion de penser à ce que signifie être canadien aujourd'hui ?










