Édition internationale

MICRO PARTIS – Ou comment détourner la loi en toute légalité

Les micropartis sont tout à fait légaux. Et pourtant, leur fin est claire : ils permettent de contourner la loi sur le financement des partis politiques. Un système adopté même par le parti au pouvoir, et qu'il n'est pas question d'abolir

 

(Photo AFP)

''Toute personne qui en France veut exprimer une opinion politique, qui veut créer une structure politique, engager une réflexion politique a le droit de le faire et a le droit de se faire financer. L'important, c'est que ce soit transparent, et c'est transparent'', s'est insurgé le Premier ministre François Fillon contre ceux qui ont osé parler d'abolition du système des micropartis. Quoi de plus convaincant que d'évoquer alors la ''conception de démocratie et de la liberté'', pour défendre le financement public de ces petites structures, face à des élus dénonçant un problème d'éthique ? Le microparti est une structure légale, autant que le don versé par l'héritière L'Oréal à l'Association de soutien de l'action d'Eric Woerth (ASAEW), qui place aujourd'hui le ministre du Travail au c?ur d'une affaire de conflit d'intérêt.


A chacun sa liberté d'expression

La loi fixe à 7.500 euros le plafond des dons que font les particuliers aux partis qu'ils soutiennent. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) notait, dans son dernier rapport d'activités, que douze partis monopolisent 90 % des dépenses électorales (UMP, PS, PCF, Modem, FN, Verts, UDF, LCR, LO, PRG, MPF, et Nouveau centre), mais il existe en fait 283 partis en France, soit dix fois plus qu'il y a vingt ans. L'un d'entre eux s'appelle l'Association de soutien à l'action de Nicolas Sarkozy (ASANS), un autre soutient Eric Woerth (ASAEW), ou encore François Fillon, Christian Estrosi, Michèle Alliot-Marie ou Laurent Wauquiez. Chacun a son parti, son ''club'' d'idées. Mais trois députés verts, Yves Cochet, Noël Mamère et François de Rugy, inquiets de la prolifération de ces petites structures, ont demandé jeudi dernier, la création d'une commission d'enquête parlementaire sur ces micros-partis qui posent, selon eux, des problèmes éthiques et de conflit d'intérêt.


Les lois sont faites pour être détournées

''La liberté de création des partis politiques a pour conséquence de faciliter le détournement de la loi en favorisant la création de partis 'satellites': une même personne physique peut ainsi financer plusieurs partis, en versant à chacun le montant plafond des dons autorisés, les partis bénéficiaires reversant ensuite l'argent récolté au 'parti central' '', note la CNCCFP. Et c'est ainsi que Nicolas Sarkozy a pu bénéficier d'une somme totale de plus de 9 millions d'euros pour financer sa campagne présidentielle en 2007, face à une Ségolène Royal qui n'avait récolté que 743.000 euros de dons de personnes physiques. Et pour cause, le PS interdit à ses adhérents d'être membres d'autres partis politiques. A elle seule, l'ASANS aurait amassé 270.000 euros en 2006, dont 250.000 versés au compte de campagne de Nicolas Sarkozy l'année suivante et 134.000 euros en 2007.


Alors d'accord, les micropartis n'ont, en soi, rien d'illégal. Le conflit d'intérêt en revanche, n'est pas un acte toléré en République française. Mais peut-il l'être s'il est bénéfique au parti au pouvoir ? Selon le Nouvel Observateur, Eric Woerth aurait reversé 66.000 euros de dons destinés à son association de soutien à l'UMP. Problème : le leader de l'association n'est autre que le trésorier de l'UMP.
Lauriane Rialhe (www.lepetitjournal.com) mardi 20 juillet 2010

En savoir plus :

Le Monde, Nicolas Sarkozy aussi a son micro-parti
20minutes, Financement des partis politiques, les micro-partis peuvent rapporter gros
Marianne2, Enveloppes, micro-partis et pressions : Sarkozy est-il un imposteur ?

Commentaires

Votre email ne sera jamais publié sur le site.