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Les entreprises espagnoles souffrent d’un déficit d’image en Amérique Latine

Deux tiers des entreprises espagnoles souhaitent augmenter leurs investissements en Amérique Latine. C’est ce que nous apprenait le XVI rapport annuel sur les investissements espagnols en Amérique Latine présenté par l’IE University le mois dernier. Un sujet que lepetitjournal.com avait eu l’occasion d’approfondir avec le professeur Juan Carlos Martínez Lázaro, directeur de publication du rapport en question. Une seconde enquête réalisée par le think tank “MESIAS“ apporte un nouvel éclairage sur le sujet: malgré cette tendance accrue à l’investissement, la réputation des entreprises espagnoles serait encore à faire en Amérique Latine.

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Écrit par Lucas Bonnière
Publié le 28 mai 2024, mis à jour le 11 juin 2024

Fondé en 2013, l’Instituto MESIAS est un observatoire de recherche économique et politique dont les recherches se concentrent principalement sur l’image de l’Espagne et de ses entreprises à l’international, une notion qui impacte grandement les comportements des consommateurs et in fine, la compétitivité de ces entreprises dans le monde entier.

Deux tiers des entreprises espagnoles investiront plus en Amérique Latine en 2024

Pour cette enquête, l’observatoire a fait appel à 400 universitaires, spécialisés dans les domaines de l’économie, de l’administration et de la direction des entreprises, provenant de vingt pays d’Amérique Latine. Avec leurs réponses, MESIAS a créé plusieurs indicateurs de réputation des entreprises espagnoles (gestion, relation du patron avec les employés, prestige…), chacune notée sur 100 points. Décryptons ensemble ces résultats :

Le prestige et la compétitivité espagnole à l’épreuve du choc culturel

Commençons avec le score global des entreprises espagnoles selon le barème de l’observatoire. Ce dernier se situe dans la moyenne haute, autour des 61 points sur 100, avec 53% des critères présentant des scores supérieurs à 60 points. Une moyenne qui s’explique par la rencontre de plusieurs facteurs.

Premièrement, la plupart des professeurs interrogé(e)s lors de cet étude reconnaissent le prestige (63,56/100) et la bonne gestion des entreprises espagnoles (62,04/100). Ils s’accordent aussi sur le fait que les entreprises espagnoles contribuent à la création de nouvelles opportunités de développement économique (72,60/100) et de nouveaux emplois (88,44/100). 62,72% des interrogés qualifient d’ailleurs ces emplois de stable et de bonne qualité.                                                                                                                                                                                    
Les entreprises espagnoles sont donc considérées dans l’ensemble comme des acteurs de la modernisation des pays d’Amérique Latine (62,9% des réponses) et de l’amélioration du bien-être de la population (57,97% des réponses).

 

Les relations entre les cadres espagnols et leurs employés constituent toutefois l’ombre sur ce tableau. Bien qu’ils se distinguent par un niveau de qualification et de professionnalisme élevé, les patrons expatriés sont perçus comme n’accordant pas assez de respect à leurs employés locaux (43,49 des réponses), tout en manquant d’honnêteté (40%) et de proximité (30%) envers ces derniers. MESIAS explique en partie ce ressenti par les différences entre les cultures du travail latino-américaines et espagnoles.

Les patrons expatriés sont perçus comme n’accordant pas assez de respect à leurs employés locaux

De plus, malgré leur rôle dans la modernisation de l’économie des pays d’Amérique Latine, l’enquête révèle que les entreprises espagnoles ne sont pas perçues comme des acteurs importants de l’amélioration de la vie de la communauté locale (parrainage de programme de santé publique, éducatifs, culturels…). De ce fait, seulement 48,81% des interrogés déclarent vouloir travailler au sein d’une entreprise espagnole s’ils en avaient la possibilité. L’écart est frappant avec les universités espagnoles, 76% des interrogés recommandant d’y étudier.

La “marque-pays“ espagnole doit se réinventer

En analysant ces résultats, les chercheurs de l’Institut MESIAS se sont rendus compte que seulement 34% des professeurs interrogés (des spécialistes du domaine de l’économie, de l’administration et de la gestion des entreprises) affirmaient avoir un niveau de connaissance élevé ou très élevé à propos des entreprises espagnoles. De plus, la perception que les locaux ont des entreprises espagnoles semble être biaisée et l’attitude positive envers l’Espagne semble être beaucoup plus importante que celle envers les entreprises espagnoles.

L’attitude positive envers l’Espagne semble être beaucoup plus importante que celle envers les entreprises espagnoles.

Les entreprises espagnoles souffrent donc d’un déficit d’image en Amérique Latine.
Pour y remédier, l’Institut MESIAS propose de s’appuyer sur la “marque-pays“ de l’Espagne. Inventée en 1996 par le conseiller politique indépendant Simon Anholt, la notion de Nation Brand ou “marque-pays“ représente l’ensemble des valeurs transmises par les actions d’un pays qui vont lui forger une image à l’international. Selon l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (WIPO), cette image peut être forgée sur le plan économique, politique, juridique, social, ou encore culturel.                                   

 

Au sujet de la marque-pays espagnole, l’institut MESIAS nous dit ceci : “L’absence d’une stratégie de marque-pays claire et définie, et les conséquences qui en découlent {…} {sont} identifiés comme l’une des principales faiblesses de l’Espagne dans l’environnement international.“

 

Dans la dernière partie du rapport, MESIAS suggère que les entreprises expatriées ne sont pas assez soutenues par leur maison mère dans leur processus d’internationalisation et qu’elles pâtissent souvent de la mauvaise gestion de l’image de marque espagnole. L’Espagne a donc besoin d’une nouvelle stratégie de marque-pays si elle veut améliorer la situation de ces entreprises en Amérique Latine, et ailleurs.

 

Au-delà du développement d’une “intelligence culturelle“ pour s’adapter aux réalités locales (culture, respect des codes, traitement des membres de la communauté), l’un des principaux pilier de cette stratégie serait “la consolidation d’une politique étrangère stable {…}, dépourvue de déséquilibres conjoncturels“ dans le but d’accroître la crédibilité du pays à l’étranger. Pour y arriver, les chercheurs de MESIAS proposent une réforme du “Red Exterior“ (réseau extérieur), avec une meilleure coordination entre les 98 organismes éparpillés autour du globe qui lui sont rattachés.

 

L’enquête souligne également le rôle des communautés autonomes, qui doivent “rester sous un même parapluie international“ pour “éliminer les inefficacités en termes d’image {pour l’Espagne} qui sont actuellement générées sur les marchés internationaux“.

Que l’on parle politique, culture, économie ou international, la problématique principale en Espagne semble rester celle de la cohésion.                          

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