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Serge Fohr: "Le rayonnement de la France passe d’abord par la Culture"

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Écrit par Vincent GARNIER
Publié le 26 avril 2018, mis à jour le 26 avril 2018

Pendant 10 ans, de 2003 à 2013, il a été à Madrid, un acteur éminent au service de la langue et de la culture française, en Espagne et dans le monde hispanophone.

 

Après 35 ans de carrière dans le réseau et au service du ministère des Affaires étrangères, il vit désormais à cheval entre la capitale espagnole et le Pays Basque français, où, depuis cette année, il a pris la présidence du Festival Biarritz Amérique. Un engagement bénévole pour une manifestation qui, depuis 1991, propose tous les mois de septembre un parcours cinématographique, littéraire et musical au travers de la culture latino et où cette année l'Uruguay sera à l'honneur. Serge Fohr, Directeur des affaires culturelles de la Ville de Biarritz entre 2000 et 2003, entend bien tisser des liens entre le festival et les structures espagnoles, afin d'élargir les partenariats et de faire valoir les mécanismes qui font aujourd'hui encore de la Péninsule, une véritable passerelle -humaine, culturelle et économique- vers le nouveau continent. 
 
 
Il a dirigé l'Institut français de Madrid de 2007 à 2010, après quatre ans en poste comme Attaché culturel dans la capitale espagnole : une longévité peu commune dans une même ville qui lui a valu une floppée de rencontres et beaucoup de plaisir, en dépit d'une conjoncture adverse, la crise espagnole, qui à partir de 2008 a largement bouleversé les modalités de la coopération franco-espagnole en la matière. "Le rayonnement de la France à l'étranger passe d'abord par la Culture", tranche Serge Fohr avec le recul d'un parcours qui, outre la décennie madrilène, de Mexico à Quito, de Lisbonne à Buenos Aires et de Biarritz à Cuba, où il a terminé sa carrière comme Directeur de l'Alliance française, a conduit ce professeur agrégé d'espagnol à promouvoir la langue de Molière aux quatre coins de l'hispanité. "En Amérique latine, on a aujourd'hui encore de la France une image mythique, véhiculée par son cinéma, sa littérature et ses artistes, qu'on ne soupçonne même pas en métropole", évoque-t-il. "En Espagne et dans toute l'Europe, le volontarisme du modèle culturel français constitue une véritable source d'inspiration", continue-t-il. "On fait à l'international des économies de bouts de chandelle, sans avoir conscience de la formidable projection dont bénéficie notre pays grâce à la Culture", déplore encore l'ex diplomate, rompu aux codes et aux modes du rayonnement de la France à l'étranger. 

 

On fait à l'international des économies de bouts de chandelle, sans avoir conscience de la formidable projection dont bénéficie notre pays grâce à la Culture


 
C'est peut être une parenthèse au SEGIB, le Secrétariat Général Ibéroaméricain à Madrid, de 2010 à 2013, qui lui aura permis de disposer d'un regard renouvelé sur le réseau culturel français. Conseiller du Secrétaire Général Ibéroaméricain pour les Affaires Francophones et européennes, il y a notamment œuvré à la première participation de la France comme pays observateur au Sommet Ibero-américain de 2010. Sorte d'équivalent de l'OIF (Organisation internationale de la francophonie) au service de l'influence et du rayonnement hispanique, le SEGIB est aussi un formidable moteur de réseautage entre l'Espagne et l'Amérique latine, où se tissent des liens au profit de l'action culturelle, économique et universitaire entre le vieux et le nouveau continent. Une passerelle aux rouages bien huilés, qui pratique le maillage public-privé devenu indispensable à la mise en œuvre des politiques culturelles et qui offre un panorama certain des fondations entrepreneuriales impliquées dans ce domaine. A l'instar de Repsol, de Telefónica ou du Banco Santander, pour n'en citer que trois, "tous les grands groupes espagnols sont présents en Amérique latine", confirme Serge Fohr, qui a pour ambition de profiter de la proximité géographique pour développer et approfondir, via des partenariats espagnols, les liens que le Festival Biarritz Amérique entretient avec les acteurs ibéro-américains. "La ville de Biarritz jouit outre-Atlantique d'un prestige extraordinaire", se réjouit le Président du festival, qui évoque encore les rencontres "Europe-Amérique latine" organisées depuis l'an 2000 par la ville balnéaire, comme un autre vecteur d'échanges essentiel.

 

Développer et approfondir, via des partenariats espagnols, les liens que le Festival Biarritz Amérique entretient avec les acteurs ibéro-américains


 
Avec quelque 35.000 visiteurs chaque année, formés par un public essentiellement régional et partiellement universitaire, le Festival Biarritz Amérique est le second grand rendez-vous culturel français portant un regard sur le 7e art hispano-américain, après le festival de Toulouse. Avec des partenaires publics, dont la région Nouvelle Aquitaine, l'Institut français ou le CNC, et privés, il assure avec un budget s'approchant du million d'euros une programmation mêlant rencontres littéraires, rencontres animées par l’IHEAL (Institut des Hautes Etudes de l’Amérique latine), expositions et concerts, tout en préservant une place prédominante au cinéma. Il propose trois compétitions de films longs-métrages, courts-métrages, et documentaires. Outre les films en compétition, le festival présente chaque année des focus autour de différentes thématiques, proposant au total près de 70 films sur une semaine (du 24 au 30 septembre cette année). "Je travaille désormais pour le plaisir", précise Serge Fohr. L'humain, cette expérience au cœur du métier qu'il a pendant 35 ans exercé, relégué trop souvent au second plan, constitue à présent la matière principale de son labeur. Tandis que les rencontres avec Denis Podalydès, Blanca Li, Bernard Pivot, Rodrigo Garcia ou Carmen Maura auront marqué son étape à la direction de l'IFM, ce sont les lectures de Juan Rulfo, Rafael Chirbes ou Leonardo Padura qui auront forgé son admiration pour les Lettres hispaniques. "La richesse de la culture mexicaine, sa capacité à réaffirmer ses racines indiennes, sa puissance politique et idéologique m'ont profondément marqué", évoque-t-il à propos de ses séjours en Amérique latine. "Le festival de Biarritz participe, à son humble échelle, à prouver l'ouverture de notre pays sur la culture latino, mais aussi à la reconnaissance et à la diffusion de son cinéma en France : je suis heureux de pouvoir ainsi donner une continuité à mon investissement sur le continent", déclare-t-il.