Et si nos villes étaient pensées pour toutes et tous, en tenant compte des besoins spécifiques des femmes ? C’est le message porté par l’association d’amitié hispano-française Mujeres Avenir, à l’occasion de l’événement “L’importance de l’urbanisme avec une perspective de genre”, organisé à l’ESCP Business School de Madrid.


Ouvert par María Luisa de Contes, présidente fondatrice de Mujeres Avenir, et inauguré par Rebeca Ávila, présidente exécutive de l’association, le rendez-vous a rassemblé un public nombreux. Devant cette assemblée, des expertes en architecture, urbanisme et études de genre ont échangé sur les effets d’une planification urbaine historiquement centrée sur les hommes, et sur les pistes pour rééquilibrer l’espace public. L’objectif : promouvoir un urbanisme plus équitable, pensé pour la diversité des usages et des trajectoires de vie.
“L’intégration de la perspective de genre dans l’urbanisme n’est pas seulement une question de justice sociale. C’est aussi un choix rationnel et efficace, bénéfique pour l’ensemble de la société”, a affirmé l’architecte française Anaïs Aimé, qui a présenté des exemples de bonnes pratiques en France et dans d’autres pays européens.
À propos de Mujeres Avenir : l’association d’amitié hispano-française Mujeres Avenir œuvre pour une égalité réelle entre femmes et hommes, soutenue par l’Ambassade de France en Espagne, le ministère espagnol de l’Égalité et le ministère des Affaires étrangères. Elle favorise la création de réseaux professionnels féminins et renforce les liens entre la France et l’Espagne dans une démarche de coopération, de visibilité et de transformation sociale.
Résilientes et invisibles : ces femmes qui transforment la ville
Historiquement, les villes ont été conçues autour d’un modèle linéaire et productiviste : des trajets domicile-travail, des espaces publics dominés par des usages masculins (sport, transport, loisirs). Un modèle qui ne correspond pas à la réalité de nombreuses femmes, souvent responsables de tâches de soin (enfants, personnes âgées), multipliant les trajets et les usages au sein d’un même quartier.

Reyes Gallegos, docteure en architecture et réalisatrice du documentaire Ellas en la ciudad, a rappelé que ce schéma exclut de nombreux parcours de vie : “Les femmes des quartiers périphériques de Séville que j’ai interrogées témoignent d’une grande résilience. Par leurs luttes, leurs manifestations, leurs actions de terrain, elles ont contribué à transformer la ville, à la rendre plus humaine.”
Des inégalités jusque dans le nom des rues
Pour Eva Tobías, ancienne adjointe au maire de Logroño, il est urgent de repenser l’espace urbain en y intégrant pleinement la vie quotidienne : “Il faut sortir d’un urbanisme standardisé. Nommage des rues, accès aux services, sécurité, mobilités… autant d’aspects où une approche genrée change la donne.”
Elle a notamment plaidé pour des actions concrètes : augmenter le nombre de rues portant des noms de femmes, visibiliser leur présence dans la ville, développer des itinéraires plus sûrs et accessibles, et collecter des données différenciées par sexe pour mieux comprendre les besoins de chacun.

Repenser la ville pour mieux vivre ensemble
La modératrice de la table ronde, Magdalena Suárez, professeure de droit et spécialiste en stratégie de conformité, a résumé l’enjeu : “L’urbanisme féministe questionne les logiques dominantes et propose une alternative : des villes plus sûres, inclusives et fonctionnelles pour toutes et tous.”
En clôture de l’événement, un échange nourri avec le public a permis de faire émerger des témoignages poignants sur l’insécurité ressentie dans certains espaces, le manque d’infrastructures pour les tâches de soin ou encore la faible représentation des femmes dans les métiers de l’urbanisme et de l’architecture.
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