Mardi 24 septembre, Carmen Calvo, ancienne vice-présidente du gouvernement espagnol et ministre de l'Égalité, a présenté son livre "Nosotras : le féminisme dans la démocratie", lors d'un événement organisé au sein des locaux du cabinet d'avocats Pérez-Llorca, à Madrid. L’initiative, portée par l'association d'amitié hispano-française Mujeres Avenir, a regroupé une soixantaine de personnes venues écouter la responsable socialiste, référence du féminisme en Espagne. Au cours de cette présentation, Carmen Calvo a révélé son ambition de réformer la Constitution espagnole pour y intégrer une réelle égalité entre hommes et femmes, marquant ainsi une étape cruciale dans son engagement féministe.
Qui est Carmen Calvo ?
Carmen Calvo est une figure incontournable de la politique espagnole, avec toute une carrière au service de la démocratie et de l’égalité des sexes. Ancienne ministre de la Culture, puis vice-présidente du gouvernement et ministre de l'Égalité, elle occupe aujourd'hui le poste de présidente du Conseil d'État, une des plus hautes instances juridiques en Espagne. Tout au long de sa carrière, elle s'est distinguée par son engagement en faveur des droits des femmes et des réformes sociales. Militante féministe convaincue, elle s'efforce d'inscrire l’égalité des sexes au cœur des politiques publiques espagnoles.
Un livre au service de la lutte féministe
"Nosotras", l'ouvrage de Carmen Calvo, explore l’histoire du féminisme en Espagne tout en offrant une réflexion personnelle sur les combats qu’elle a menés tout au long de sa carrière. Loin d’être une simple autobiographie, ce livre est un véritable manuel pour comprendre les enjeux du féminisme dans la démocratie moderne. Lors de la présentation, María Luisa de Contes, présidente fondatrice de Mujeres Avenir, a décrit ce travail comme un "guide sur la manière dont les femmes féministes doivent participer au débat public" tout en insistant sur la solidarité féminine comme un moteur de transformation sociale. Pour María Luisa de Contes, "Carmen Calvo est une femme extraordinaire, une référence, pleine des valeurs humaines les plus importantes : l'éthique, la solidarité, le sens de la justice et la tolérance".
Vers une réforme constitutionnelle pour l'égalité des sexes
L’une des annonces les plus marquantes de l’intervention de Carmen Calvo a été son appel à une réforme complète de la Constitution espagnole. Elle a souligné que l'égalité entre les sexes était mal reflétée dans le texte actuel. Pour cette raison, elle a révélé qu'un groupe de femmes travaille actuellement sur une proposition de révision constitutionnelle visant à intégrer l'égalité des sexes comme principe directeur dans tous les domaines de la vie publique. Selon elle, cette réforme doit garantir que femmes et hommes soient traités de manière égale dans tous les aspects de la société.
Les défis féministes d'aujourd'hui
Carmen Calvo a également profité de l’événement pour souligner les nombreux défis qui restent à relever en Espagne malgré les avancées féministes. Elle a évoqué la question de l'avortement, encore entravé par l'objection de conscience de nombreux médecins dans certaines régions, et dénoncé la réglementation de la prostitution qu’elle considère comme une atteinte à la dignité des femmes. "Il est inacceptable qu’en 2024, la prostitution ne soit toujours pas abolie en Espagne", a-t-elle déclaré. Un sujet qu'on retrouve largement évoqué dans son livre : "Jusqu'à quel point les hommes peuvent ils comprendre ce qui se passe dans le corps des femmes ?", s'interroge-t-elle notamment dans une partie du livre dédiée à la mercantilisation du corps des femmes. "Peuvent-ils par hasard s'ériger comme porte-paroles ou marchands de notre réalité physique?".
Son discours a également rappelé la nécessité de poursuivre la mobilisation féministe, en mettant en avant l’idée que le féminisme n’est pas un combat individuel, mais collectif : "Nous avons un des mouvements féministes les plus exemplaires au monde, mais il reste encore beaucoup à faire pour éradiquer un patriarcat qui demeure profondément enraciné", a-t-elle déclaré.
Un féminisme ancré dans la solidarité et le socialisme
Carmen Calvo a insisté sur le lien fondamental entre féminisme et socialisme, affirmant que l’un des objectifs du féminisme est de redéfinir les règles du jeu social, historiquement conçues pour favoriser les hommes. "Si nous ne transformons pas les structures de pouvoir et les règles du jeu, nous n'atteindrons jamais une véritable égalité", a-t-elle affirmé. Elle a également exprimé son optimisme quant au pouvoir du collectif, déclarant que le féminisme est avant tout un projet de solidarité et non de division. Dans "Nosotras", l'auteure exprime : "Le féminisme n'est pas un simple ajout lié à la réalisation de l'idéal démocratique. Cela en est au contraire l'épicentre"
L'avenir de l'égalité en Espagne
Malgré les nombreux défis évoqués, Calvo a conclu sur une note optimiste, rappelant que la lutte pour l’égalité des sexes est loin d’être terminée, mais que des progrès considérables ont déjà été réalisés. Elle a appelé à une vigilance continue et à une participation active des femmes, et des hommes, dans la poursuite de cette lutte. "Nous devons continuer à nous battre pour transformer la société, et cela nécessite la participation de tous, femmes et hommes, pour déconstruire les inégalités et bâtir un avenir meilleur". Il reste du cheminà parcourir, à tous les niveaux de la société, y compris en entreprise. María Luisa de Contes a à cet égard outre conclu : "J'observe que la peur persiste dans l'univers de l'entreprise. Il est temps de mettre fin à cette peur et de nous imposer".