Lundi dans la cour du Consulat de France à Madrid, les autorités ont organisé la traditionnelle cérémonie de célébration de l'armistice qui, 106 après la fin de la Grande Guerre, commémore l'engagement pour la Patrie et rend hommage aux morts. Ce recueillement constitue aussi l'occasion de sensibiliser les plus jeunes générations, avec la participation d'élèves des lycées français, et dans un contexte géopolitique tendu, de rappeler la fragilité d'une paix que l'on croyait sur le continent européen, pérenne. Des Espagnols, soldats, membres de la Guardia civil et membres de la Police nationale, ont été décoré par l'Etat français, dans le cadre de la collaboration bilatérale.
Le retour de la guerre en Europe, avec le conflit en Ukraine, est désormais indissociable des cérémonies d'armistice. Les 8 mai et 11 novembre, difficile d'oublier que les énormes sacrifices faits par nos nations n'ont pas définitivement anéanti toute velleité belligérante. La guerre est à nos portes, son bruit légèrement lointain fait partie de notre quotidien et le nouvel ordre mondial qui est en train de se dessiner questionne les certitudes sur lesquelles la construction européenne s'est notamment appuyée. Pour Aymeric Chuzeville, ministre-conseiller de l'Ambassade de France en Espagne, "aujourd'hui plus que jamais le souvenir des conflits passés doit aiguiser nos consciences". Pour garantir la paix et la sécurité sur le Vieux Continent, le diplomate a appelé "une réponse unie" de la part des dirigeants européens, face aux défis auxquels ils sont confrontés, notamment à l'heure d'investir pour une "autonomie stratégique", autrement dit dégager un budget européen de la Défense, à la hauteur des enjeux.
"La France et l'Espagne ont un rôle particulier à jouer dans ce contexte", a déclaré Aymeric Chuzeville, évoquant l'amitié qui unit nos deux pays, récemment scellée dans le Traité de Barcelone, signé en 2023. La solidarité exprimée par la France dans le contexte de la DANA, qui a frappé l'Espagne fin octobre, en est aussi l'exemple. "L'esprit de solidarité" donc, et sur différentes zones de conflit dans le monde, "la fraternité d'armes" qui unit nos deux pays, doit servir d'exemple et de modèle à la dynamique européenne. "C'est en construisant ensemble l'Europe de la Défense que nos pays vont assurer un avenir dans le concert des nations", a précisé le ministre conseiller, qui a conclu son allocution à l'exclamation de "Vive la France, vive l'Espagne, vive l'Europe unie!"
Dirigée par le président de l'association d'anciens combattants Xavier de Crevoisier, la cérémonie a, en outre, été rythmée par des dépôts de gerbes réalisés par les personnalités institutionnelles, politiques et associatives. Et tandis que les plus anciens ayant participé aux combats des guerres passées se font chaque fois plus rares au cours des hommages, les jeunes générations y prennent une place toujours plus importante, appelées à entretenir les valeurs transmises par les aînés. "Dehors il fait un temps merveilleux, finis les canons, la Grande Guerre est terminée" : la lettre d'un Poilu, évoquant l'annonce de l'armistice dans les tranchées, lue par une élève du réseau, a symbolisé lundi cette implication des plus jeunes.
Comme régulièrement au cours des cérémonies d'armistice, des Espagnols ont aussi été décorés par l'Etat français : un geste qui marque la reconnaissance et l'importance du travail fait conjointement par la France et l'Espagne, en matière de défense et de sécurité. Parmi les décorés, Elena Garzón Otamendi, directrice générale des relations internationales au sein du ministère espagnol de l’Intérieur, a exprimé, dans un parfait français, le sens accordé à cette reconnaissance : "Ces décorations témoignent de l'excellente relation entre nos deux nations", a-t-elle déclaré, "de la collaboration que nous entretenons comme pays voisins et partenaires, mais aussi de l'implication de nos ministères de l'Intérieur qui travaillent main dans la main pour maintenir les principes et les valeurs qui ont été rappelées au cours de cette cérémonie et qui nous unissent".