Édition internationale

À Los Angeles, l'équipe de Sandfall Interactive savoure le succès de « Clair Obscur »

Ce jeudi 11 décembre, le jeu vidéo français « Clair Obscur : Expedition 33 » a tout raflé aux Games Awards, les « Oscars » du jeu vidéo, au Peacock Theater de Los Angeles, en remportant 9 statuettes. Un record absolu que la jeune équipe du studio montpelliérain Sandfall Interactive a fêté ce vendredi à la Résidence de France de Beverly Hills. Pour Lepetitjournal.com, Tom Guillermin, co-fondateur de Sandfall Interactive, décrypte les raisons de ce succès XXL.

Tom Guillermin Sandfall Interactive Clair Obscur Los AngelesTom Guillermin Sandfall Interactive Clair Obscur Los Angeles
Pour Tom Guillermin, co-fondateur du studio Sandfall Interactive, leur jeu vidéo Clair Obscur parvient à toucher les gens dans leur vie personnelle. © Agnès Chareton
Écrit par Agnès Chareton
Publié le 13 décembre 2025

 

Dans les jardins ensoleillés de la Résidence de France de Beverly Hills, certains portaient encore les bérets rouges qu’ils arboraient la veille aux Games Awards, sur l’estrade du Peacock Theater de Los Angeles. Ce vendredi 12 décembre, l’équipe de Sandfall Interactive était invitée au grand complet - soit une trentaine de personnes - par le Consul Général de France à Los Angeles Adrien Frier et son épouse Camille, tous deux férus de jeux vidéos, à célébrer leur triomphe lors d’une réception à la Résidence de France de Beverly Hills. 

La veille au soir, le jeune studio montpelliérain a tout raflé, en remportant un record de 9 awards - dont celui du meilleur jeu vidéo de l’année - pour « Clair Obscur : Expedition 33 », sa toute première production sortie en avril 2025. Porté par une musique envoûtante, une esthétique visuelle unique et des personnages touchants, le jeu de rôle s’est déjà vendu à plus de 5 millions d’exemplaires à travers le monde. Pour Lepetitjournal.com, Tom Guillermin, directeur technique et co-fondateur de Sandfall Interactive, revient sur cette soirée mémorable et décrypte les raisons de cette consécration. 

 

Sandfall Interactive Clair Obscur Los Angeles
Les trois co-fondateurs de Sandfall Interactive, Guillaume Broche, François Meurisse et Tom Guillermin, posent aux côtés de Camille et Adrien Frier, Consul Général de France à Los Angeles, lors d'une réception le 12 décembre à la Résidence de France de Beverly Hills.

 

Comment avez-vous vécu la soirée d’hier aux Games Awards ? Avec 11 nominations, vous étiez très attendus, mais ces 9 awards ont clairement dépassé toutes vos attentes ? 

 

« On y allait en n’attendant rien de particulier, même si beaucoup de gens autour de nous nous disaient : “Mais c’est sûr, vous allez gagner !” Ça nous paraît tellement surréel, depuis le lancement du jeu, à commencer par le "score Metacritic". C’est une plateforme qui agrège les différentes revues presse et qui les note sous la forme d’un score sur 100. Ce score était au-delà de ce que l’on imaginait obtenir. Et ça nous a hissés immédiatement auprès de jeux qu’on admire, puisque nous sommes tous des joueurs dans l’équipe. Dès le premier jour, nous nous sommes retrouvés aux côtés des grands, alors qu’on avait juste l’impression d’être dans notre petit studio à Montpellier, de faire nos trucs presque un peu dans notre chambre. Il y avait un côté très intimiste et d’un coup, le jeu se retrouve propulsé sur le devant de la scène mondiale… C’est notre premier jeu, personne ne nous connaissait ni ne nous attendait. C’était déjà complètement fou dès le lancement, et là c’est juste le prolongement de ça.» 

 

Vous avez déjà vendu 5 millions de copies à travers le monde… 

 

« Oui, et nous n’avons pas encore les chiffres à jour depuis la cérémonie d’hier soir. Les "jeux de l’année", ce sont des jeux que les gens vont offrir, commander, qui vont se retrouver sur les listes de recommandations. Pour nous, c’est une super façon de rentrer dans cette liste de joueurs potentiels qui seront curieux de découvrir l’univers, et ce jeu qui a raflé neuf awards au cours de la cérémonie. C’est inespéré ! » 

 

SandFall Interactive
L'équipe au complet de SandFall Interactive à la Résidence de France de Beverly Hills. © Agnès Chareton

 

Qu’est-ce qui explique ce succès de Clair Obscur selon vous ? Il y a la musique, l’univers, l’image, et cette fabrication artisanale… 

 

« Depuis le début, on l’a fait vraiment de manière artisanale, et tout était fait avec le cœur. Forcément, tout n’est pas parfait dans le jeu. On n’avait pas les moyens de tout faire, de faire chaque caillou parfaitement, comme on peut l’avoir dans certains jeux Triple-A qui visent le photoréalisme complet. Mais on s’est focalisés sur l’essentiel, sur ce qui amenait le plus d’émotion au jeu. On pense que c’est ça qui a résonné chez les gens. Et l’histoire aussi. On a un ton qui est très mature pour un jeu vidéo. Le public cible est plutôt proche des personnes qui ont 25-30 ans, parce que ça aborde des sujets complexes. On parle de deuil, de famille, de choix, de libre arbitre. Ce sont des sujets assez profonds et qui peuvent vraiment résonner chez les gens. On reçoit beaucoup de mails et de courriers de personnes qui nous racontent comment le jeu s’est fait une place dans leurs vies dans des moments familiaux difficiles. Et ça, c’est très touchant en tant que créateurs. Il faut saluer Guillaume et Jennifer (ndlr Guillaume Broche et Jennifer Svedberg-Yen) qui ont fait un travail incroyable sur l’écriture, les acteurs de motion capture, qui ont donné vie aux personnages que l’équipe avait créés et derrière, les doubleurs qui viennent poser leur voix, autant en anglais qu’en français… »

 

Le jeu va-t-il être traduit dans d’autres langues ? 

 

« On considère d’autres langues, car c’est une façon de toucher un public plus large. Là, on regarde un peu, on évalue un peu ce qu’on peut faire pour ajouter de nouvelles localisations sous forme de textes pour les sous-titres et les menus dans le patch (ndlr la mise à jour) qui est sorti hier soir. On sait que c’est une très belle façon de partager le jeu. Tout le monde ne parle pas forcément anglais et on a envie de pouvoir retranscrire la finesse de l’histoire et des dialogues dans les langues des joueurs où qu’ils soient. »

 

L’industrie du jeu vidéo souffre en ce moment. Comment parvenez-vous à tirer votre épingle du jeu ? 

 

« C’est chouette qu’il y ait encore de la place dans l’industrie pour un jeu que personne n’attendait, en particulier qui n’est pas issu d’une grande licence, ni du jeu vidéo, ni du cinéma. Le fait qu’on ait eu l’opportunité de gagner autant de récompenses, c’est un bon signal envoyé aux équipes à travers le monde, un encouragement à essayer des choses, à être créatifs, à tenter des choses différentes. Même s’il y a un “biais du survivant” par rapport à nous, car il y a beaucoup de studios qui n’atteignent même pas la sortie. Développer un jeu, c’est un projet qui s’imposait de longue haleine, avec tous les enjeux de créer une entreprise. C’est une chose d’être une équipe de créateurs, mais il faut aussi gérer une entreprise sur le long terme, et il faut que ce soit viable. »

 

Comment s’est passée votre semaine à Los Angeles ? Avez-vous eu le temps de faire du tourisme en plus de vos rendez-vous de networking ? 

 

« C’était la première fois à LA pour moi. J’ai pu faire un petit date avec ma fiancée sur le Santa Monica Pier. C’est une ville iconique, que l’on retrouve dans la pop culture. Etre ici, c’est unique. On a pu rencontrer Riot Games, qui sont implantés ici, ils ont un très gros campus. C’est assez fou. Ils étaient fans de notre jeu, ils nous ont réservé un accueil incroyable, avec une chorale qui a réinterprété des morceaux de notre jeu. C’est cool de voir que notre petit studio et notre petit jeu résonnent aussi auprès de pros de l’industrie qui sortent des jeux que l’on admire. »

 

Y a-t-il une "French touch", une patte française, dans Clair Obscur ? 

 

« On ne le fait pas exprès. Le jeu s’assume français. Le joueur commence dans la ville de Lumière, qui est inspirée de Paris, même si c’est une version plus dystopique. Il y a ce côté français déjà dans l’histoire. Après, oui, dans l’écriture, les dialogues, il y a des pointes d’ironie, ce qui est quelque chose de typiquement français. On a juste laissé s’exprimer notre "inner french", notre français intérieur. On a joué cette carte-là pour l’annonce des doublages français. On avait ressorti un trailer en habillant tous les personnages avec des marinières, des bérets et des baguettes. Et hier soir, c’était la tenue que toute l’équipe avait adoptée ! On a joué la carte des Français volontairement, mais je pense que c’est présent dans le jeu sous des formes plus subtiles d’écriture, avec la musique et l’esthétique, comme par exemple l’architecture hausmanienne. C’est un ensemble de choses qui, combinées ensemble, donnent cette esthétique française. On a essayé de rester subtils là-dessus, et je pense que c’est ça qui fait que ça résonne à l’international. Le jeu est sincère dans son côté français. »

Commentaires

Votre email ne sera jamais publié sur le site.

Sujets du moment

Flash infos