CONDUIRE EN GRANDE-BRETAGNE - Une aventure pas si insurmontable

L'une des premières appréhensions à laquelle un Français doit faire face en débarquant en Grande-Bretagne est sans doute d'avoir à conduire à gauche. Pourtant, en suivant quelques conseils avisés et après quelques minutes d'hésitation, tout roule normalement?ou presque

(© Colin Hawkins/cultura/Corbis)

Rouler à droite ou à gauche, qui a raison? On pense souvent que les Anglais, avec cette nouvelle différence, ont tout simplement voulu une fois de plus faire preuve d'esprit de contradiction. Pourtant, selon l'explication la plus répandue, c'est bien Napoléon qui a compliqué les choses.

Un peu d'histoire

Au temps des chevaliers, ces derniers, majoritairement droitiers comme la plupart des gens vivant sur la planète à cette époque, portaient leur épée à la hanche gauche pour pouvoir la sortir de leur meilleure main. Pour éviter d'entremêler leurs épées, il était plus simple de se croiser à gauche. Cette règle permettait aussi aux cavaliers de tirer efficacement leur épée contre un ennemi venant à leur rencontre. Tout le monde semblait donc sur la même longueur d'onde. Mais Napoléon, ayant conquis quasiment toute l'Europe à la fin du 18ème et début 19ème siècle, imposa à celle-ci la conduite à droite. Seule l'Angleterre résista à l'empereur et donc à la conduite à gauche?Quant aux explications concernant ce changement voulu par Napoléon, elles sont multiples et difficiles à vérifier.  

Il serait bien trop dangereux aujourd'hui de décider en Grande-Bretagne d'un changement de règle. Imaginez 60 millions de conducteurs, cyclistes ou piétions se réveiller un matin et changer de sens de circulation! Impossible ou presque. Seul la Suède a fait ce pari un peu fou le jour du Dagen H, dimanche 3 septembre 1967. Aucun accident mortel n'a été attribué au changement à l'époque mais certaines personnes âgées ont quand même décidé d'arrêter de conduire plutôt que d'avoir à gérer le nouveau sens de circulation.

Une habitude facile à prendre

Pour nous, Français exilés de l'autre côté de la Manche, une seule solution : s'habituer. Une épreuve finalement loin d'être insurmontable à en croire les nombreux témoignages. La "première fois" occasionne finalement plus de peur que de mal. "À Londres, c'est très facile de s'habituer, les automobilistes sont moins stressés qu'à Paris et la courtoisie règne encore, ce qui aide" explique Caroline, installée dans la capitale depuis plus de dix ans. Pour certains, il serait même plus simple au début de conduire en Grande-Bretagne avec une voiture française et donc un volant à gauche. "Le volant à droite et la boite de vitesse à gauche paraissent naturels au premier abord. En revanche, les rétroviseurs sont durs à trouver au premier coup d'?il mais surtout, l'appréciation des proportions de la voiture demande un temps d'adaptation. Le passager aura certainement quelques petites frayeurs au début puisque le conducteur aura tendance à oublier que son passager est à gauche et pas à droite ! Il n'est pas rare que le rétroviseur de gauche trinque un peu?" justifie Édouard. Autre problème signalé avec le changement de côté du volant : une confusion quasi-systématique entre clignotants et essuie-glaces?

La "technique du lièvre"

Certaines situations demeurent quand même difficiles à appréhender au début et demandent un maximum de concentration. "La première fois que j'ai conduit, c'était tôt le matin donc je n'avais pas d'autres voitures à suivre. Conséquence : j'ai pris mon premier rond point à l'envers" témoigne Stanislas. Rappelons d'ailleurs par la même occasion que la circulation déjà engagée sur un giratoire est toujours prioritaire, sauf quelques cas rarissimes. Autre point délicat : ne pas oublier de se ranger dans la file de gauche et de dépasser par la droite sur les voies multiples. Pour beaucoup, le meilleur conseil est d'adopter la "technique du lièvre" pendant les premières minutes :  suivre une voiture immatriculée "UK". Comme les Anglais respectent le code de la route, aucun risque d'être en infraction.

Un sens du respect des règles très British qui permet d'éviter non seulement les accidents mais aussi les amendes liées aux excès de vitesse. Les radars automatiques sont très nombreux en Grande-Bretagne.

Une politesse bienvenue

D'une manière générale, tout comme ce sens du respect des règles, une autre grande caractéristique des Anglais se retrouve dans leur conduite : la politesse. En voiture comme dans la vie, le conducteur britannique est courtois et patient ce qui rend la conduite agréable. Caroline raconte : "Je me suis retrouvée dans les bouchons dans la banlieue de Londres sous une pluie battante. À un feu devant moi, il y avait quatre voitures. Le feu passe au vert, la première voiture ne démarre pas et met ses warnings. Pas un seul coup de klaxon et les trois personnes sont sorties de leurs véhicules pour aller porter secours au conducteur. Là je me suis dit qu'on était bel et bien en Angleterre car quasi impossible de voir ça en France et plus encore à Paris". Le respect des "Keep clear" à certaines intersections peut par exemple s'avérer un avantage non-négligeable quand le trafic est chargé. Autre point important : le piéton est roi et toujours prioritaire. Attention donc à le laisser traverser, quel que soit l'endroit.

Il semblerait finalement qu'il fasse bon conduire de ce côté-là du "channel". Une petite remarque néanmoins : certains Britanniques seraient parfois un peu moins agréables avec les conducteurs immatriculés en France?Entre nous, Frogs and Rosbifs, c'est de bonne guerre.

Simon Gleize (www.lepetitjournal.com/londres) lundi 14 novembre 2011