

Le 26 novembre 1992, Eric Cantona s'engage avec le club de Manchester United. En à peine cinq saisons chez les Red Devils, le Frenchie devient une légende, toujours vénérée vingt ans plus tard. Eric Cantona a été élu meilleur joueur de tous les temps par les supporters de Manchester United. Encore aujourd'hui, les hymnes à la gloire du King retentissent régulièrement dans les travées de Old Trafford
"I'm not a man, I'm Cantona." Cette phrase culte du film Looking for Eric (Ken Loach) peut paraître prétentieuse et prêter à sourire. Mais pour les fans de football, et en particulier les supporters de Manchester United, elle a un sens. Jamais un footballeur n'a auparavant été autant vénéré que le King Eric. Une légende, un mythe, un artiste? "Canto" a surtout été le symbole du renouveau de Manchester United au début des années 1990.
Quand il s'engage avec Manchester, Eric Cantona sort d'une période compliquée. Certes, il vient de remporter le championnat avec le club de Leeds mais l'entente avec le manager du club, Howard Wilkinson, est loin d'être cordiale. Au c?ur du problème : le comportement du Frenchie. Déjà dans ses précédents clubs (huit en dix saisons), ses relations avec les différents joueurs, entraîneurs et responsables avaient été difficiles, dues à la personnalité complexe du Marseillais. Quelques mois auparavant, à seulement 25 ans, Eric Cantona avait même annoncé sa retraite sportive : alors qu'il joue à Nîmes, il jette un ballon sur l'arbitre de la rencontre. La fédération française de football le condamne à quatre matches de suspension. Réponse de Canto : "Ce sont des idiots". La sanction passe à deux mois de suspension. Incompris, Cantona décide de raccrocher les campons en décembre 1991. C'est sur les conseils de Michel Platini, alors sélectionneur des Bleus, qu'Eric Cantona signe en Angleterre.
Ici, une personnalité comme la sienne devait être mieux acceptée. Avec le titre de Leeds United, le premier depuis dix-huit ans, la Cantomania est lancée en Angleterre. Les fans lui pardonnent ses excentricités, largement compensées par son talent sur le terrain. Pas la direction du club. Le 26 novembre 1992, malgré un bon début de saison, Eric Cantona est transféré à Manchester United.
Eric the Red
Il ne faut pas longtemps au Français pour laisser s'exprimer son talent. Dès sa première saison, Manchester United remporte le titre de champion d'Angleterre, le premier après une disette de vingt-six ans. Cantona devient ainsi le premier joueur à gagner deux titres consécutifs avec deux clubs différents. Le Frenchie devient rapidement une des stars du championnat. Son maillot, floqué du numéro 7 (qui sera repris par Beckham et Ronaldo), s'arrache à la boutique du club. Les supporters, signe de reconnaissance extrême dans les stades anglais, créent plusieurs chansons à sa gloire, comme "Eric the King" ou "Ooh Ah Cantona". La Marseillaise est également régulièrement chantée à Old Trafford.
Mais en janvier 1995, Eric Cantona donne un violent coup de pied à un supporter de Crystal Palace. C'est le débordement de trop. Convoqué par la justice britannique, le King sera condamné à des travaux d'intérêt général. Sa réaction : "Quand les mouettes suivent le chalutier, c'est qu'elles pensent qu'on va jeter des sardines à la mer." Ses fans crient au génie, ses détracteurs le pensent fou. Sa personnalité unique attire les publicitaires. En 1996, Nike sort une publicité qui restera dans les mémoires : "66 was a great year for english football, Cantona was born." En seulement cinq saisons, Eric Cantona et Manchester United remportent quatre championnats et deux coupes d'Angleterre.
Manchester forever
Sa réputation de sportif intello, un peu artiste, pas toujours facile à suivre, en fait une personnalité unique qui a marqué le club de son empreinte. Aujourd'hui encore, l'hymne français est repris à Old Trafford et les maillots réédités du King se vendent toujours comme des petits pains à la boutique du stade. Selon Hugh Dauncey, professeur de culture populaire à la Newcastle University, si la Cantomania a continué à travers toutes ces années, c'est parce que le Français a "toutes les qualités que recherche le public anglais : fidélité à son club, goût de l'effort, technicité, charisme et romantisme." Et pour Stuart Mathieson, journaliste sportif au Manchester Evening News, la folie Cantona n'aurait pas pu exister ailleurs qu'à Manchester, ville qui respire par le football. "Ici, le foot est plus qu'un jeu, c'est un antidote à la pauvreté et au chômage. Les gens veulent des héros le dimanche pour oublier la réalité de la semaine."
Vingt ans après sa première apparition avec Manchester United, Eric Cantona reste le joueur de référence des supporters, devant George Best ou David Beckham. Un amour sans faille et réciproque. Lors d'une interview en 2010, l'ancien footballeur affirme : "C'est une ville où on aime le beau jeu, les beaux joueurs?où une personnalité dite complexe par certains est là-bas aimée. (?) J'ai été transcendé là-bas." L'an dernier, quand le rival City a remporté le championnat dans les dernières secondes, Cantona, toujours amoureux de son club, a explosé : "On était devant la télé. Il a détruit la table basse d'une prise de kung-fu. Elle était en morceaux sur le tapis ", témoigne Raphaël, son fils au Mirror. Cantona et Manchester United, c'est pour l'éternité.
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