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Amitiés entre expats : est-ce que ça dure ?

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Écrit par Damien Bouhours
Publié le 28 février 2019, mis à jour le 28 février 2019

Amitié d'un jour, amitié toujours ? Pas facile à dire pour les expats dont le séjour à l'étranger présente souvent une date péremptoire. Relations intracommunautaires superficielles ou réels liens d'affection, l'amitié entre expats résiste-t-elle à l'épreuve du temps et de la distance ?


Si l'expatriation est une ouverture sur le monde, cela ressemble le plus souvent à une vie en communauté. L'éloignement de la mère patrie rapproche en effet ceux qui partagent le même passeport, le même patrimoine culturel ou encore la même langue. Les réseaux d'expatriés facilitent les rencontres. L'expatrié isolé et perdu du début se retrouve rapidement entouré d'une ribambelle de nouveaux amis.
 

Seconde famille...


L'amitié entre expats est souvent la plus évidente lorsque l'on arrive dans un pays méconnu. Rencontrer des expatriés installés depuis plus longtemps permet, grâce aux anecdotes racontées et autres expériences partagées, d'accélérer le processus d'assimilation des us et coutumes du pays d'adoption. L'amitié devient alors une arme d'intégration massive. Ces nouvelles relations amicales comblent le vide affectif et le manque des siens aujourd'hui à des milliers de kilomètres. "En ce qui concerne les expatriés à demeure, donc installés dans un autre pays, la fréquentation des autres expatriés est une nécessité, ils deviennent pour toujours une deuxième famille", nous explique Maité (Espagne).

Ce clan reconstitué est également une source de réconfort pour l'expatrié qui sait qu'il peut partager sans crainte toutes ses questions et observations sur son pays d'accueil et sur l'expérience de l'expatriation. "Comme notre famille est très loin, nous partons en weekend avec quelques amis bien choisis, et les aventures que nous partageons lors de vacances ensembles dans des régions reculées de Chine par exemple, créent des liens indéfectibles. On est presque dans la fraternité à ce niveau là, on s'attache aussi très fortement aux petits bouts de chou que l'on voit grandir. D'autant que ceux que l'on aime, restés dans l'Hexagone, ont souvent du mal à comprendre ce que nous vivons (au mieux) ou s'en moquent (au pire)", confirme ainsi Jules de Pékin.  


...ou relations superficielles


Avoir les mêmes galères, ressentir les mêmes plaisirs, c'est sûr que ça rapproche. Pour autant, toutes les amitiés ne sont pas sincères. "Nous avons sympathisé parce que nous étions francophones et qui plus est, du même pays mais nos caractères, au fil du temps se sont révélés, et nous étions trop différents pour pouvoir nous comprendre. Nos attentes n'étaient pas les mêmes, nos choix de vie non plus", confie ainsi Danielle. Ainsi pour Jules, les rencontres professionnelles sont difficilement transposables en véritable amitié : "après de nombreuses expatriations, notre carnet d'adresse est très étoffé. Pourtant je crois qu'à force, je sais distinguer assez vite les personnes qui resteront de simples relations, et celles qui deviendront importantes. Nous avons la chance d'être, malgré les responsabilités, dans un système un peu moins formel que ne l'était celui de nos parents par exemple, et j'évite le plus possible les soirées "networking" en costard-cravate, car j'estime que je voyage suffisamment et consacre assez de temps à mon travail pour pouvoir me détendre avec de vrais potes en toute simplicité".

La vie en communauté a aussi ses inconvénients indéniables : les ragots ! Difficile en effet de ne pas se faire le véhicule plus ou moins volontaire des rumeurs circulant au Lycée français ou dans différents évènements au sein de la communauté sur la situation familiale ou professionnelle de telle ou telle famille. Qui a dit que Gossip girl était un phénomène purement anglo-saxon ?

 

L'épreuve ultime : la distance !


De l'avis général, le vrai test de l'amitié entre expatriés s'effectue lors de son départ vers une autre destination ou du retour en France. Le tri entre amitiés sincères et artificielles s'opère alors rapidement. "Cela fait maintenant 4 ans que nous avons quitté le Vietnam où nous fréquentions beaucoup de monde. Pas un week end sans invitation, pas un restaurant sans croiser une connaissance. Des amis ? Et bien, c'est notre départ qui a fait que nous avons su qui étaient réellement nos amis, les vrais. Nous avons toujours des relations très proches avec deux couples d'amis qui sont toujours là bas. Et puis, pour les autres, je conserve un bon souvenir de ces personnes sur qui au fond je n'avais pas "misé grand-chose"", nous explique Laura.

Et quand les kilomètres ne permettent pas de se voir souvent, Internet (Skype, réseaux sociaux) reste le meilleur moyen de se tenir au courant. "Je peux affirmer qu'ils gardent des liens durables avec des vrais expatriés qui rentrent en France ou repartent dans d'autres pays, maintenant surtout par internet. C'est mon expérience et de nombreuses Françaises de mes amies, fixées en Espagne, peuvent le confirmer", souligne Maite. "Skype nous aide beaucoup mais nous essayons de nous croiser en France chaque été", ajoute également Laura.


Les amis expats aujourd'hui loin deviennent alors aussi importants que ceux restés en France. On leur parle de temps à autre, on partage ses photos, on donne des nouvelles de la communauté, on ne s'oublie pas et puis on espère se retrouver au hasard des voyages, des retours dans l'Hexagone ou bien de leurs visites dans leur petit paradis délaissé. "Pour ceux qui peuvent venir nous voir, les semaines passées ensemble à leur faire découvrir notre quotidien remplace avantageusement quelques diners par ci par là, et finalement, là encore, on a l'impression qu'on peut gagner en intensité...", confirme Jules.

Malgré l'éternel va-et-vient des expatriés, une amitié durable est donc possible entre routards de la mobilité internationale. Comme le souligne justement Delphine du Japon, les amitiés entre expats ne sont pas si différentes des autres : "Certaines sont "à vie", d'autres "de passage", comme pour tout le monde, expat' ou non..."


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