Le 16 mars, pour faire face à la pandémie de Covid-19, le président Joko Widodo a décrété l’état d’urgence en Indonésie jusqu’au 19 avril. Le confinement total n’est pas à l’ordre du jour, mais il est demandé aux habitants de rester chez eux, de travailler s'ils le peuvent depuis leur habitation et de prier à la maison. Dans un pays de 260 millions d’habitants et où 70 millions travaillent dans le secteur informel, le confinement est une mesure qui semble difficile à appliquer.
Les cas d’infections au Covid-19 se multiplient particulièrement dans la capitale qui semble être l’épicentre de la pandémie. Jakarta et sa grande banlieue représentent 30 millions d’habitants selon les chiffres officiels : sur les 7621 tests réalisés, 1790 sont confirmés positifs et 181 décès enregistrés principalement à Jakarta. Il est à noter que le nombre de tests effectués sur l’archipel est de l’ordre de quelques milliers, ce qui peut laisser penser que les chiffres réels sont sous-estimés.
La situation économique :
L’adoption de l’État d’urgence permet au gouvernement d’avoir un cadre législatif afin de prendre et d’adopter des mesures pour venir en aide aux différents secteurs économiques touchés par la crise et d’apporter un soutien aux plus défavorisés. Parmi les mesures prises par le gouvernement : laisser filer le déficit budgétaire à 5,07% au lieu de 1,76% , alléger les taxes et débloquer 405.000 milliards de roupies soit 22,6 milliards d’euros pour lutter contre la pandémie. 31 millions de foyers ne paieront pas l’électricité en Indonésie et à Jakarta 3,6 millions d’’habitants vont bénéficier d’un programme leur permettant d’avoir accès à de la nourriture de base.
Confinement ou pas ?
Malgré l’appel du secteur médical au confinement, le président indonésien a choisi l’option de distanciation sociale. "Nous devons tirer les enseignements des expériences des autres pays, mais nous ne pouvons pas les copier, chaque pays a ses propres caractéristiques " a-t-il expliqué. Dans un pays où 70 millions d’indonésiens vivent dans le secteur informel et ne perçoivent qu’un revenu journalier, le confinement total semble illusoire.
Depuis le 16 mars, le gouverneur de la capitale Anies Baswadan a décrété la fermeture des écoles, bureaux, marchés, centres commerciaux et lieux de divertissements. Cette interdiction a été renouvelée et est maintenue jusqu’au 19 avril. Ne peuvent rester ouverts que les magasins d’alimentation, les pharmacies ; ce qui est dans l’ensemble assez bien respecté dans la capitale. Anis Baswadan a demandé le confinement total de la capitale, mais cela n’a pas été accepté par le gouvernement.
Des plans de restrictions d’accès à Jakarta sont à l’étude et sont prêt à être mis en place. Plusieurs quartiers résidentiels de la capitale mais aussi Surabaya et Yogyakarta ne permettent plus l’accès à des personnes extérieures. Des villes comme Balikpapan à Kalimantan pratiquent le couvre-feu. A Bali, tous les lieux touristiques, plages, de nombreux restaurants, hôtels et lieux de divertissements sont fermés.
Grâce au maillage des RT, responsables de quartiers créés à l’époque du président Suharto pour faire remonter les informations, la formation aux gestes barrières se fait, les messages passent et certains n’hésitent pas fermer l’accès à leurs rues, résidences, complexes...
« Certaines villes comme Cianjur à coté de Bogor n’acceptent plus l’entrée dans la ville aux personnes venant de Jakarta » nous explique Dede qui vient de perdre son beau-père et qui ne peut se rendre aux funérailles.
Mudik ou pas Mudik ?
Le mudik est le voyage que font les familles à la fin du Ramadan depuis Jakarta pour retrouver leur famille en province. Chaque année, plus de 20 millions d’habitants de la capitale retournent dans leur village familial célébrer la fin du ramadan. A cause de la fermeture des bureaux et des écoles, de nombreux habitants de la capitale sont déjà rentrés dans leur famille, ce qui fait craindre le pire au niveau de la dispersion du virus. Le niveau sanitaire dans de nombreuses provinces de Java n'est pas comparable à celui de Jakarta. Afin de diminuer ce phénomène de retour, cette année de nombreux trains ont été supprimés, les bus privés qui devaient être mis en place sont aussi annulés. Néanmoins, le président ne se prononce pas sur une interdiction totale du mudik mais semble vouloir responsabiliser les gens en leur demandant de rester chez eux ou bien de faire un auto-confinement de 14 jours en arrivant dans leurs familles. Cependant, de nombreuses provinces commencent à réfléchir à ces arrivées massives et Tegal, ville située au centre de Java, a décidé la fermeture de son accès jusqu'au 31 juillet.
Libération des détenus pour éviter les contaminations
Le système pénitencier indonésien compte 522 prisons et 270.000 prisonniers. Afin de limiter la propagation du virus dans des prisons surchargées, les autorités pénitentiaires ont libéré 18.000 détenus ce jeudi. « L’objectif est de 30.000 libérations » a expliqué la porte-parole du directoire général des prisons. Sont concernés les jeunes détenus et les adultes qui ont fait le deux tiers de leur peine.