On le voit arriver de loin, le petit tramway rouge qui se fraye un chemin au milieu de la foule de l'Istiklal Caddesi, parcourant inlassablement la longue avenue entre la place Taksim et Tünel. Sorti d'une autre époque, le nostaljik tramvay a fêté hier ses 99 ans de service. Pour l'occasion, lepetitjournal.com a sauté dans un wagon, histoire de remonter un peu le temps.
Pour la plupart des Stambouliotes, le nostaljik tramvay (photo MG) symbolise un lien fort entre le passé prestigieux de ce quartier de Beyo?lu et son présent, au c?ur de la vie culturelle d'Istanbul. La métropole a d'abord utilisé le tramway à cheval, entre 1872 et 1914. Le 11 février de cette année-là, le premier tramway électrique est mis sur les rails. Il dessert la rive européenne puis, 15 ans plus tard, la rive asiatique. Les tramways électriques resteront le principal moyen de transport public de la ville jusqu'à leur disparition, en 1966.
Celui de l'avenue Istiklal a été restauré en 1991 par les mécaniciens de l'IETT, réseau de transports en commun d'Istanbul et de sa région. L'expression ?nostaljik tramway" date de cette époque. Les voitures rouges et blanches, vieilles de près d'un siècle, s'accordent parfaitement avec les nombreuses carrioles des vendeurs de simit qui jalonnent les deux kilomètres de l'avenue piétonne. Selon le directeur général de l'IETT, Hayri Baraçl?, le nostaljik tramway n'est pas seulement un moyen de transport sympathique : il véhicule la réputation du réseau et de ses valeurs, celles qui ont permis de protéger une partie du patrimoine d'Istanbul.
Le tramway électrique, dans la première moitié
du XXème siècle (photo IETT)
Bientôt centenaire?
Son caractère désuet ravit aussi les touristes, qui s'y font régulièrement photographier. Les enfants du quartier sont nombreux à s'accrocher à l'arrière du wagon et ne se privent jamais de sauter du tramway alors qu'il est encore en marche! Selon Ye?im, habituée des célèbres "voitures rouges", le tramway est autant utilisé par les locaux que par les touristes. S'il est si populaire aux yeux des Stambouliotes, avance-t-elle, c'est aussi parce qu'il est le seul transport qui relie la place Taksim à Tünel en moins de 15 minutes.
Aux côtés du conducteur (photo MG)
La ?kampana?, cette cloche que fait inlassablement sonner le conducteur, l'aide à se frayer un chemin parmi la foule des passants.
A l'intérieur, les usagers se laissent transporter dans une autre époque, grâce au plafond arrondi, aux encadrements de portes et fenêtres en bois vernis, et aux strapontins en cuir. Les deux seuls wagons en activité se croisent à hauteur du majestueux portail du lycée de Galatasaray, seul endroit de la ligne où le rail se dédouble.
Selon les chiffres fournis par l'IETT, le tramway parcourt l'avenue entre 25 et 30 fois par jour et transporte quelque 2.500 passagers quotidiens. "C'est plus agréable et tranquille pour les gens d'emprunter le tramway, qui est d'ailleurs le moyen de transport le plus économique à Istanbul, que de marcher au milieu de toute cette foule" assure un conducteur, qui espère bien mener son tramway jusqu'en 2014, l'année du centenaire.
Manon Gay (http://www.lepetitjournal.com/istanbul) mardi 12 février 2013