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Petite chronique indienne : Royal Enfield, une moto de légende à travers les siècles

« Fabriquée comme un pistolet, elle file comme une balle».

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Écrit par Anaïs Pourtau
Publié le 2 décembre 2025

 

Bien plus que les voitures et bien davantage que les vélos, les rues et routes indiennes débordent de scooters et de motos qui se frôlent, se bousculent et se faufilent. Pas de casque sur les têtes au Tamil Nadu et à Pondichéry.

Comme le dit un ami railleur et automobiliste, « ils tiennent plus à ce qu’ils ont sur la tête que dans la tête ».

Mon jeune ami fait partie de cette catégorie. Le casque reste à la maison, oui, parce que comment savoir qui est le conducteur si celui-ci  porte un casque ? Dit-il, en lissant d'une main ses cheveux en arrière, tenant le guidon de l'autre et en admirant son image dans le rétro. Il est tellement fier...

Pourquoi cette moto plutôt qu’une autre? Parce que c’est un rêve de gosse pauvre; parce qu’au cinéma, les acteurs chevauchent tous des Royal Enfield et parce qu’un gars qui possède une telle moto force l’admiration de ses collègues, de ses amis et de sa famille.

 

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Bénédiction d'une moto Royal Enfield après son achat.

 

Il ajoute que l’ayant achetée à crédit sur plusieurs années, il a pris un risque qui parfois l’inquiète.

Je suis allée visiter « un Royal Enfield showroom » par curiosité. Et bien on rentre dans un autre monde qui mérite le détour : tout est calme, luxe et rutile. 

Sans être motophile, je suis impressionnée : elles ont "du chien ces motos!"

 

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Des aiguilles à coudre à la moto Royal Enfield

Angleterre, 1891. Albert Eadie et Bob Walker Smith rachètent la société Townsend Cycle Company, située dans la petite ville de Redditch, dans le comté du Worcestershire. Pendant des siècles cette société était mondialement connue pour sa production d’aiguilles à coudre.

Elle change alors de nom et devient la Enfield Cycle Company et se spécialise dans la fabrication de pièces pour vélos, puis par la suite de vélos entiers.

Deux ans plus tard, l’entreprise signe un contrat avec la Royal Small Arms Factory ( RSAF),  à Enfield dans la banlieue nord de Londres, pour la fourniture de pièces de précision pour des armes à feu.

Pour célébrer cette association prestigieuse, Messieurs Eadie et Walker Smith rebaptisent leur entreprise Enfield Manufacturing Company Ltd et nomment leur premier vélo «Enfield », l’année suivante, les nouveaux vélos prennent le nom de «Royal Enfield ».

 Ils adoptent le slogan « Made like a gun » (fabriqué comme un pistolet).

 

Les motos Royal Enfield dans les deux guerres mondiales.

Après plusieurs essais, la première moto Royal Enfield est conçue par Bob Walker Smith et Jules Gobiet en 1901. Elle est présentée au salon de Stanley Cycle, à Londres, avec la particularité d’avoir un moteur Minerva monté à l’avant de la moto et d’avoir la roue arrière entraînée par une courroie de cuir.

1914, début de la première guerre mondiale. La première moto 2 temps Royal Enfield, la plus grande, passe alors en pleine production pour fournir l’armée britannique.

En 1928, Royal Enfield innove, adopte des réservoirs de selle et équipe ses motos de fourches télescopiques.

L'année 1932 voit arriver la légendaire Royal Enfield Bullet. Ce modèle qui deviendra un emblème durable de la marque et qui lui vaut le fameux slogan :

« Made like a gun, goes like a bullet », « Fabriquée comme un pistolet, elle file comme une balle ».

 

1939-1945, durant la seconde guerre mondiale, l’entreprise Royal Enfield produit une grande quantité de motos et bicyclettes. Le modèle militaire le plus connu est la Flying Flea ( puce volante). Ce modèle à 2-temps de 125 cc, pouvait être parachuté avec les troupes aéroportées à l’arrière des lignes ennemies allemandes.

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1947, l’Inde accède à son indépendance

 

Changement de continent, la Royal Enfield s’installe en Inde

En 1949, K R Sundaram Lyer et son neveu K Eswaran Lyer, tous deux originaires du district de Tirunelveli dans le Tamil Nadu, lancent Madras Motors.

Ils sont déjà connus dans la vente de vélos de marque et espèrent importer des motos britanniques comme Norton, Matchless et Royal Enfield.

En 1952 Madras Motors décroche un contrat avec l’armée indienne qui cherche à acquérir des motos capables de circuler sur les terrains accidentés des frontières indiennes.

L’armée commande alors 800 exemplaires du modèle Royal Enfield Bullet de 350cc, considéré comme le plus robuste et le plus fiable. La condition étant cependant que les engins soient fabriqués localement.

L’entreprise fait alors construire une usine d’assemblage de pièces de motos à Tiruvottiyur, près de Chennai.

En 1955 Royal Enfield s’associe donc à Madras Motors, en Inde, pour former Enfield India. Cette co-entreprise donnera naissance à : Royal Enfield India.

En 1970 la société mère du Worcestershire, au Royaume Uni arrête définitivement sa production tandis que son homologue en Inde prospère.

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1977-1989, le déferlement d’un symbole de style et de liberté

1977, Royal Enfield India commence à exporter le modèle « Bullet 350 cc » vers le Royaume Uni et l’Europe. Les motards britanniques s’enthousiasment pour le modèle et les ventes connaissent une croissance fulgurante.

Les jeunes indiens ne sont pas en reste et voient son design classique comme un symbole de style et de liberté. Plus de la moitié des acheteurs de la moto ont moins de trente ans.

Au fil du temps, la marque continue à évoluer et à innover, elle intègre des améliorations technologiques pour répondre aux normes modernes de performance et sécurité.

Mais, malgré sa popularité, à la fin des années 1990, Royal Enfield India est sur le point de s’éteindre. Les motos sont considérées comme peu fiables et gourmandes en essence.

L’entreprise perd de grosses parts de marché avec l’arrivée des motos japonaises, plus légères et moins coûteuses.

 

La Royal Enfield Motors Limited, à l’assaut des montagnes de l’Himalaya.

1994, le groupe indien Eicher acquiert Royal Enfield India et rebaptise la société Royal Enfield Motors Limited, créant ainsi la marque emblématique indienne de la moto.

En 1997, gros coup de publicité de l’entreprise : 

Quarante Royal Enfield effectuent une expédition au Ladakh, vers le col de Khardung La à 5600 mètres d’altitude. À l’époque, c’est la plus haute route carrossable du monde. 

L’expédition jette les bases d’un événement qui regroupe des centaines de motards chaque année: « l’Himalayan Odyssey ».

Ce premier événement est assez extraordinaire et aura des retombées économiques sur la marque qui prouve ainsi la robustesse de ses motos, capables de rouler à très hautes altitudes et en terrains accidentés.

La prochaine Trans Himalayan Odyssey aura lieu du 15 au 22 juin 2026. Mais d’autres nombreux événements existent, pour les motards amoureux des Royal Enfield, qui veulent s’affronter aux cols et pistes himalayennes.

 

Entrée dans le 21e siècle, la moto rétro d’une élégance intemporelle a le vent en poupe.

En 2025, le fabricant Royal Enfield a vendu 1 million de motos dans le monde, soit 11% de progression par rapport à 2024.

Royal Enfield India Limited, qui a récemment fêté son 125e anniversaire, exporte des motos dans le monde entier. L’introduction de la gamme Classic a un énorme succès avec son style rétro auquel se rajoute une technologie moderne.

En 2001, Enfield lance l’Electra et se repositionne comme une marque de motos de loisirs : la selle est devenue plus confortable, des clignotants ont été rajoutés, des garde-boue ont été remodelés.

Avec sa nouvelle palette de couleurs et son démarreur électrique elle est devenue LA moto des passionnés. Son moteur de 350 cc, répond aux exigences du marché international. Elle est la seule vintage Classic d’entrée de gamme au monde.

 

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La dernière Bullet baptisée Classic C-5 est lancée en 2010. Avec sa selle à ressorts et son cadre peint à la bombe, elle est l’incarnation de l’esprit Vintage de la moto 1951. La simplicité du modèle, les graphismes classiques et surtout le battement caractéristique du moteur avec piston vrombissant, rend la Bullet reconnaissable partout dans le monde.

 

Le rendez-vous annuel des inconditionnels

2011, l’entreprise organise son premier « One ride » qui deviendra annuel. Tous les motards de Royal Enfield à travers le monde, sont encouragés à faire un tour dans leur région respective et à partager leur passion en « célébrant la liberté et le plaisir de rouler ». En 2025, il a eu lieu le 21 septembre, réunissant plus de 40000 amoureux de la marque mythique dans plus de 60 pays.

 

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2015, ouverture de la troisième usine ultramoderne de Valam près de Chennai dans le Tamil Nadu, qui permet une relance indispensable de la marque.

2016, voit arriver le fameux modèle Himalayan, une moto pour l’aventure tout terrain, robuste, et qui peut tout affronter.

2020, l’entreprise annonce la fin de la production des moteurs de 500 cc qui ont fait sa renommée. Pour l’occasion, une édition limitée « Classic 500 Tribute Black » est produite à 1000 exemplaires en Europe, pour célébrer la fin d’un mythe.

Et qui mieux que le jeune Maharadjah Padmanabh Singh de Jaipur pour être l’ambassadeur de cette légendaire et cependant si moderne moto ?

Le jeune homme né en 1998, a succédé à l’âge de 13 ans à son grand père comme héritier du trône de Jaipur.

Il est élégant, célibataire, instruit, riche propriétaire du City Palace (palais historique des Maharadjahs de Jaipur), champion de polo et est, de plus, une incontournable figure de l’aristocratie mondiale.

En associant le patrimoine royal indien à l’héritage de la marque mythique, Sawai Padmanabh Singh de Jaipur est probablement l’incarnation idéale de ce qui caractérise la Royal Enfield, à savoir la continuité d’une tradition à laquelle se rajoute la force de la jeunesse et sa modernité.

À travers de belles photos et vidéos, on peut voir le jeune Maharadjah parcourir les paysages emblématiques britanniques et européens au guidon de la Royal Enfield Classic 350, la Classic 650 et la Goan Classic 350. 

 

 

 
 
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