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Qui fait la loi à Hong Kong?

Manifestation Hong KongManifestation Hong Kong
Écrit par Didier Pujol
Publié le 20 novembre 2019, mis à jour le 9 décembre 2019

La polémique sur la loi anti-masque, jugée anticonstitutionnelle par la Haute Cour de Justice de Hong Kong ce Lundi et aussitôt réfutée par Pékin, relance la question de la valeur de la "Rule of Law" qui fait la singularité de Hong Kong par rapport au reste de la Chine.

"Basic Law"

Héritée du système anglais, la "Basic Law" est sorte de mini constitution de Hong Kong, censée garantir un traitement égal des citoyens et des entreprises au regard de la loi. C’est donc à cette base que l'on se référe en permanence lorsque l’on doit arbitrer les décisions juridiques ou économiques à Hong Kong. En appliquant récemment des mesures d’exception pour faire face aux événements violents comme la loi anti-masque ou précédemment lors de la tentative de passation de la loi d’extradition, le gouvernement a, par deux fois, challengé le système existant en invoquant des changements de contexte. Plus précisément, la notion de "sécurité nationale" soutenue par Pékin est désormais régulièrement invoquée lorsqu'il s'agit de pousser à la hâte des lois restrictives des libertés individuelles, allant en général à l'encontre des accords validés par la Chine au moment de la rétrocession. Sur ce plan l’arbitrage rendu par la Haute Cour sur l’inconstitutionnalité de la loi anti-masque est un rappel de ce qu’à Hong Kong, on n'est pas censé faire ou défaire les lois selon les circonstances et l’actualité. La prise de position de Pékin, par l'entremise de Zang Tiewei, le porte-parole du NPCSC (National People's Congress Standing Commitee), la plus haute instance chinoise en matière de lois, qui se déclare seul juge de ce qui est constitutionnel ou non à Hong Kong est donc une attaque directe des fondements de la SAR dont les institutions se trouvent balayées d’un revers de main.

 

Manifestations Hong Kong
La loi d'exception anti-masques a été finalement déclarée anti-constitutionnelle

 

Hong Kong Human Rights and Democracy Act

Par ailleurs, le fait que les États Unis se posent aussi en juge de paix international en votant ce Jeudi le "Hong Kong Human Rights and Democracy Act", dont le rôle est de décider de ce qui est admissible ou non à Hong Kong en matière de liberté d'expression et de droits de l'homme, par référence aux accords de rétrocession, peut tout à fait être considéré par le camp conservateur comme un défi à la souveraineté nationale. De plus, le sénat américain met en perspective de cette loi, le suffrage universel à Hong Kong pour 2020, la mesure qui a probablement le moins de chance d'être un jour mise en place à Hong Kong! Les sanctions qui seraient appliquées en retirant à Hong Kong la possibilité d'échanger dans un système exempt de droits de douanes auraient des conséquences importantes sur une économie déjà malmenée par les événements récents. Le fait qu'un pays tiers s’arroge le droit de décider de ce que telle ou telle opération de police ou décision du gouvernement locale est contraire ou non au droit est pour le moins difficile à admettre pour les pro-Pékin.

 

Manifestations Hong Kong
Le sénateur Marco Rubio annonçait le 19 novembre le vote de la "Hong Kong Human Rights and Democracy Act"

 

La police fait sa loi 

Enfin, lorsque la Hong Kong Chief Executive se mure dans le silence pendant de longues périodes, refusant de prendre position quand la population est dans la rue, l'arbitraire vient combler cette absence de leadership. En effet, les décisions sont prises au jour le jour par le chef de la police qui autorise ou interdit telle ou telle marche sur des critères pragmatiques tels que "les événements récents ont montré qu’il y avait des risques de débordement" ou "interdiction pour des raisons de sécurité dans un quartier fortement peuplé". Les conséquences légales sont que les participants aux marches non autorisées se retrouvent souvent arrêtés et condamnés, la loi dans ce cas devenant un instrument de l’arbitraire, liée à l'appréciation d'un civil servant. Pour terminer, les changements de cap incessants de la dirigeante de Hong Kong qui selon son agenda de rencontre avec Pékin propose ou refuse la mise en place de la commission d’enquête indépendante sur les violences policières demandée par les manifestants, achève de donner le sentiment que la loi est appliquée ou bafouée selon les circonstances politiques du moment.

Lorsque l’on sait que l’activité économique de l’ancienne colonie britannique repose précisément sur la confiance dans sa solide base juridique, qui la différencie du reste de la Chine, on peut légitimement se poser des questions sur l’avenir de Hong Kong.

 

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