Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 1

Le 1er institut de sommellerie au Vietnam raconté par Justine Ollivier

Institut franck thomas Justine OllivierInstitut franck thomas Justine Ollivier
Justine Ollivier, présente l'Institut Franck Thomas lors de la dégustation intuitive.
Écrit par Loanne Jeunet
Publié le 21 octobre 2019, mis à jour le 6 mars 2020

À l’occasion du lancement de l’Institut Franck Thomas, premier centre de formation de sommellerie au Vietnam, lepetitjournal.com Ho Chi Minh Ville a rencontré Justine Ollivier, représentante du projet, installée depuis 2 ans dans le pays. 

Le 25 septembre dernier avait lieu le lancement de l’Institut Franck Thomas, premier centre de formation de sommellerie au Vietnam, dont l’inauguration devrait se faire en novembre 2019. Cet évènement inédit s’est déroulé autour d’une dégustation intuitive, cette façon totalement instinctive et subjective de découvrir le vin. Le meilleur sommelier de France et d’Europe et MOF en sommellerie Franck Thomas, dont sa marque porte le nom, était présent pour animer cette soirée d’exception, devant une vingtaine d’entrepreneurs désireux d’en apprendre plus sur la lecture du vin, et de comprendre ce qu’ils boivent. 

lepetitjournal.com Ho Chi Minh Ville a rencontré Justine Ollivier, à l’origine du projet au Vietnam. Cette pétillante jeune femme de 26 ans d’origine bretonne, passionnée par son métier, a monté de toutes pièces l’Institut Franck Thomas à Saigon. En lien avec le groupe Marie-Claire qui a racheté la marque deux mois auparavant, et surtout avec les précieux conseils de son mentor Franck Thomas, Justine a servi de véritable passerelle entre la France et le Vietnam, et s’est occupée de faire connaître le concept auprès de la communauté locale et expatriée. Interview d’une Française solaire qui n’a pas froid aux yeux. 

institut franck thomas justine ollivier
Justine Ollivier, représentante de l'Institut Franck Thomas au Vietnam.

lepetitjournal.com HCMV : Quel est votre parcours ? 

Justine Ollivier : J’ai été élevée en Bretagne dans une ferme. On ne buvait pas forcément vin à la maison, et je n’avais pas d’intérêt particulier pour ce sujet. Ce n’est que lors d’un repas que j’ai goûté à un vin et que j’ai vraiment ressenti quelque chose. C’est là que je me suis dit qu’il fallait que je travaille là-dedans. Je suis rentrée dans le monde de la gastronomie et du vin avec mes études. J’ai fait d’abord les vendanges en Australie, avant de trouver une alternance à Angers dans une école de viticulture. J’ai pu vendre du vin sur les salons internationaux, avec de petits vignerons locaux. Ensuite, j’ai fait un master à Avignon. A ce moment-là, je cherchais un stage, mais les offres en France me semblaient ennuyeuses. J’ai donc trouvé une opportunité à Bangkok. Pendant cette période, je suis venue voir un ami au Vietnam pour le week-end. C’est là que j’ai rencontré les gens travaillant dans le secteur viticole, et 3 mois plus tard, on m’a proposé un poste de commerciale. Pendant un an et demi, j’ai vendu du vin pour une entreprise. Beaucoup de managers me demandaient des conseils, je leur donnais des petits cours en off, autour d’un café, et c’est comme ça qu’on s’est rendu compte qu’il y avait un réel besoin. On ne peut pas demander à un serveur de vendre du vin, s’il n’en a jamais bu ! Il y avait quelque chose à faire.

Avez-vous rencontré des difficultés particulières lors de votre expatriation ? 

J.O : Au début, ce n’était pas toujours facile. Parfois, on a l’impression qu’on ne connaîtra jamais vraiment la mentalité du pays, et c’est frustrant. Il y a des moments où l’on partage des choses géniales avec les locaux, et d’autres fois où l’on a l’impression de ne pas être pleinement intégré(e), et ce sera toujours le cas, j’en ai conscience. Mais je ferai quand même en sorte de pouvoir faire quelque chose de bien ici. J’ai aussi fait des rencontres formidables, notamment des femmes vietnamiennes et françaises, avec lesquelles j’aimerais développer un networking de working business women. Elles savent ce qu’elles veulent et m’inspirent beaucoup. 

Concernant l’Institut Franck Thomas, tout le monde m’a aidée ici, parce qu’il y a un besoin, et que c’est un projet porteur, pour tout le monde.

Comment s’est passée votre rencontre avec Franck Thomas, dont l’Institut porte le nom  ? 

institut franck thomas justine ollivier
Franck Thomas, MOF en sommellerie et meilleur sommelier de France et d'Europe.

J.O : Au Vietnam, on m’a conseillé de rencontrer Franck Thomas. Je suis donc rentrée en France, et là, il y a eu un gros match entre nous. Il a changé ma vie, professionnelle et personnelle, et c’est grâce à lui que j’ai trouvé ma voie. Il s’est battu pour réussir, sans aller à l’école, il a tout appris sur le terrain. Il a enchaîné les concours sur plusieurs années avant de décrocher ses titres. Il était toujours finaliste mais ne gagnait jamais : on lui reprochait de ne pas savoir parler du vin avec du coeur. Après avoir pris quelques mois de cours de théâtre, il a enfin réussi à transmettre son émotion, et a été élu MOF en sommellerie, et meilleur sommelier de France et d’Europe. 

On ne peut pas aimer le vin sans aimer les humains

 

Parlez-nous de l’Institut Franck Thomas

J.O : Franck Thomas a créé une franchise, institut de sommellerie d’abord en France. Les établissements sont présents dans plusieurs villes : Paris, Bordeaux, Angers, Lyon, Antibes, Ajaccio, Rennes, Montpellier etc. Basé sur une pédagogie similaire aux écoles Montessori, on préfère se focaliser sur la sensibilité de chacun. Il y a des cours  théoriques sur les vins de France et du monde entier, mais aussi sur comment vendre, attirer l’attention du client, des cours de théâtre, de lâcher prise. On organise des groupes de travail, où les étudiants font leurs propres recherches et expliquent après ce qu’ils ont fait, et s’assurent que tout a bien été compris. L’apprenant devient formateur, ce qui lui permet de développer sa confiance en lui, ses capacités orales et managériales. Le but est qu’il soit capable de transmettre. Cette formation est reconnue au niveau des professionnels et enregistrée au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP).

Au Vietnam, je vais m’occuper de louer des locaux pour l’Institut, développer des partenariats avec des universités et organiser des ateliers chez les restaurateurs. Pour l’instant, j’en suis à la phase d’étude du marché, implantation de l’entreprise, démarchage de partenaires, de distributeurs et de restaurateurs. Je tiens à préciser une chose : nous Français, ne formerons jamais les particuliers. Nous voulons former les professionnels vietnamiens pour qu’eux, puissent former à leur tour. Ce sera à eux de transmettre, et le marché  du vin pourra ainsi évoluer. 

Quelles sont les formations proposées et leur coût ? 

J.O : Nous avons plusieurs formules : la certification sommelier niveaux 5 - celle que j’ai passée -, qui comprend  le Wine knowledge, Wine selling, Wine purchasing, Wine promotion et Wine management. Elle se déroulera sur 40 jours. La formation plus courte sera constituée d’un module d’entrée et du Wine knowledge sur 3 niveaux, pendant 10 jours. Les tarifs dépendront de la certification choisie, mais devraient tourner autour de 10 à 12$ de l’heure. J’aimerais que les intervenants soient à la fois expatriés et locaux, aussi bien représentés par des hommes que par des femmes et de tout âge : il faut que les étudiants puissent prendre le meilleur de chacun pour s’élever. 

Comment s’est passé le lancement de l’Institut Franck Thomas ? 

J.O : Lors de l’évènement, où un peu plus d’une trentaine de personnes étaient conviées, nous avons procédé à une dégustation intuitive à partir de 18h. Nous nous sommes bandé les yeux avant de gouter au vin, pour un lâcher prise total. Chacun a dû dire ce qu’il ressentait, si le goût lui évoquait un fruit, un gâteau, un souvenir d’enfance. Lors d’une dégustation intuitive, on fait confiance à son instinct. Et nous sommeliers, nous intervenons pour mettre des mots professionnels sur le symbole. De manière générale, on dit souvent aux étudiants « Tu dois sentir le chêne, la fleur etc. », mais c’est totalement subjectif. Il est possible qu’un étudiant sente la saveur d’un chocolat ou souvenir d’un feu de cheminée ce qui représente en réalité l’élevage en fût de chêne. Il pourra ainsi mieux lire un vin grâce à son propre ressenti.  On donne envie aux gens d’acheter et de boire du vin en arrêtant d’en parler de façon trop académique. 

Comment voyez-vous l’avenir ?

J.O : Je compte rester ici quelques années pour mener ce projet à terme. J’aimerais qu’un Vietnamien ou une Vietnamienne prenne ma place, et que des managers franco-vietnamiens puissent transmettre la pédagogie, en adéquation avec la mentalité locale. Nous aimerions développer l’Institut également dans d’autres villes du Vietnam, et dans d’autres pays d’Asie.