

Certains diront qu'Open Wine est une institution culinaire à Phnom Penh, d'autres diront que c'est le restaurant de la capitale avec le plus grand choix de vins au verre. Quoiqu'il en soit, derrière ce nom anglais se cache un restaurant français qui plait aux Cambodgiens. Vous êtes déjà perdus dans ce trio de nationalités ? Nous avons rencontré Frank Sampere, le cofondateur, pour tenter de tout comprendre.
Dès le début de notre rencontre, Frank nous prévient, le sourire en coin : « Vous faites des portraits sur les entrepreneurs qui ont réussi, mais comme n'importe quel entrepreneur, je peux encore faire des erreurs ». Et pourtant depuis douze ans, Frank, 39 ans, tient avec son associé Philippe Veeckmans, Open Wine, restaurant gastronomique de référence à Phnom Penh.
Sa « balade » en Asie
Après sept ans d'école hôtelière en France, il débarque au Vietnam. « Au début, j'y allais pour me balader mais j'ai tout de suite fait mon CV », nous raconte Frank en sirotant son Ricard. Sa balade dure finalement depuis vingt-deux ans. À Hanoi, il rencontre son futur associé. «À l'époque, Philippe sentait que c'était le bon moment pour aller au Cambodge. Ça commençait à frétiller», nous explique le restaurateur. Les deux jeunes associés s'installent alors au pays du Lok Lak avec une entreprise de vin Open Wine puis créent finalement un restaurant gastronomique.
À son arrivée, le chef cuisinier y découvre un pays encore peu développé. Il y avait peu de routes, peu d'éclairage, peu de fiscalité, alors qu'« aujourd'hui, les tours poussent comme des champignons ». C'est dans ce contexte que le chef monte alors sa brigade : « Déjà à l'époque, nous préférions travailler avec du personnel peu expérimenté, nous pouvions ainsi les former à notre sauce », nous souligne-t-il. Une dizaine d'années plus tard, la brigade d'Open Wine « tourne bien » même s'il nous confesse « rester le capitaine du bateau pour éviter qu'il ne coule ». Le restaurateur, dont l'accent sent bon le soleil élabore lui-même ses menus. « Ensuite, je montre les plats à ma chef exécutive et à ma seconde. En trois jours, elles savent les cuisiner mieux que moi » plaisante-t-il. Si Frank est fier des compétences de ses employées gagnées au fil des années, il est aussi fier des conditions qu'il leur offre : «Nous sommes une TPE familiale donc il nous est important de soigner nos employés». Cela lui permet aussi de fidéliser son équipe.
Se développer dans un pays en développement
Depuis sa création, le restaurant a dû faire face à deux défis majeurs. Le premier, c'est la concurrence qui s'est intensifiée ces trois dernières années. « Aujourd'hui, je ne suis pas sûr que j'ouvrirais mon restaurant, il y a déjà trop de monde sur le marché », nous relève-t-il. Cet engouement profitable pour le pays lui permet de réaliser ce qui le motive tous les matins en se levant : pérenniser son restaurant et innover pour rester compétitif. Le deuxième défi est de trouver du personnel qui considère que la restauration est un vrai métier. « Pour beaucoup ici, c'est un job provisoire, en attendant de trouver mieux. La restauration n'a pas bonne réputation », déplore Frank. Là encore, les choses changent peu à peu, et des écoles hôtelières ouvrent dorénavant à Phnom Penh, ce qui permet de « rendre la profession plus crédible ».
Frank est fier que 80% de sa clientèle soit cambodgienne. À travers cette clientèle, le restaurateur-chef d'entreprise voit l'évolution de la société cambodgienne : « Le midi, j'ai de plus en plus de personnes de la classe moyenne émergente qui gagnent entre 600$ et 1200$ par mois au restaurant ». L'évolution et le développement du pays, il les ressent aussi dans ses approvisionnements : « Avant on importait 60% de nos produits (hors boissons), aujourd'hui on en importe plus que 40%, des fruits et des légumes notamment. Le but est de faire baisser ce pourcentage sans négliger la qualité ».
Frank finira cette rencontre en vantant le plaisir de travailler avec des Cambodgiens. «Avoir des équipes qui ont toujours le sourire, ça n'a pas de prix », nous dit-il. Et cela tombe bien, par sa gentillesse et son franc-parler, il nous a, au fil de l'interview, mis le sourire aux lèvres. Espérons qu'il saura aussi vous mettre l'eau à la bouche !

Cet article a été publié pour la première fois dans notre édition spéciale à l'occasion du 14 juillet 2017. Vous pouvez télécharger ce journal en version PDF ici.
La rédaction (www.lepetitjournal.com/cambodge) mercredi 26 juillet 2017


































