Trois enfants ont été sauvés vendredi, mais l'espoir de trouver d'autres survivants s'amenuisait vendredi en Turquie et en Syrie, une centaine d'heures après le violent séisme qui a tué plus de 22.300 personnes dans l'une des pires catastrophes survenues dans la région depuis un siècle.
L'aide humanitaire internationale afflue en Turquie - l'Allemagne a notamment annoncé vendredi l'envoi de 90 tonnes de matériel par avion - mais l'accès à la Syrie en guerre, dont le régime est sous le coup de sanctions internationales, est beaucoup plus compliqué.
La quasi-totalité de l'aide humanitaire destinée aux zones rebelles est acheminée depuis la Turquie par le point de passage de Bab al-Hawa, le seul actuellement garanti par l'ONU.
La diplomatie turque dit s'employer à ouvrir deux autres points de passage "avec les régions sous contrôle du gouvernement" de Damas, "pour des raisons humanitaires".
L'ONU avait indiqué mardi que l'acheminement par ce poste-frontière était perturbé en raison des routes endommagées.
De son côté, le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, a annoncé jeudi être "en route pour la Syrie". La présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Mirjana Spoljaric, est arrivée le même jour à Alep, en Syrie.
- "Livrés à nous-mêmes" -
De part et d'autre de la frontière, des milliers d'habitations sont détruites et les secouristes redoublent d'efforts pour rechercher des rescapés, même si la fenêtre cruciale des 72 premières heures pour retrouver des survivants s'est refermée.
Pourtant, vendredi à Antakya (sud), "à la 105e heure" après le séisme, les secouristes ont extrait vivants un nourrisson de 18 mois, Yusuf Huseyin, des débris d'un immeuble de trois étages, puis 20 minutes plus tard son frère Muhammed Huseyin, selon la chaîne NTV.
Et deux heures auparavant, Zeynep Ela Parlak, une fillette de trois ans, avait déjà été secourue dans cette ville anéantie par le séisme.
La situation, aggravée par un froid glacial, est telle que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), en lutte armée contre l'armée turque depuis 1984, a décidé vendredi "de ne conduire aucune opération tant que l'Etat turc ne nous attaque pas", selon Cemil Bayik, un responsable cité par l'agence Firat, proche du PKK. "Des milliers de nôtres sont encore sous les décombres. (...) Tout le monde se doit de mobiliser tous ses moyens".
A Antakya, une trentaine de mineurs sont arrivés jeudi après avoir parcouru un millier de kilomètres pour prêter main-forte, munis de pioches, pelles, masses, scies à métaux et barres à mine.
Jeudi à Samandag, dans la province de Hatay, les secours avaient pu dégager vivants un bébé de 10 jours et sa mère, après 90 heures sous les décombres, selon le maire d'Istanbul, Ekrem Imamoglu.
Nombre de survivants critiquent la lenteur de la réaction gouvernementale. "Je n'ai vu personne avant 14H00 le deuxième jour du séisme", soit 34 heures après la première secousse, accuse Mehmet Yildirim. "Pas d'Etat, pas de police, pas de soldats. Honte à vous! Vous nous avez laissés livrés à nous-mêmes".
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a esquissé une forme de mea culpa vendredi. "Les destructions ont affecté tellement d'immeubles (...) que malheureusement, nous n'avons pas pu conduire nos interventions aussi vite qu'espéré", a déclaré le chef de l'Etat en visite dans la ville d'Adiyaman (sud), très affectée par la catastrophe.
A Chypre, les premiers corps des victimes chypriotes-turques dégagés des décombres après le séisme en Turquie ont été rapatriés sur l'île vendredi, dont ceux de sept adolescents volleyeurs qui participaient à un tournoi, a annoncé la télévision locale.
L'hôtel dans lequel le groupe (24 jeunes âgés de 11 à 14 ans, quatre de leurs professeurs, un entraîneur et 10 parents) séjournait à Adiyaman, dans le sud de la Turquie, s'est totalement effondré. Selon la chaîne turque NTV, "les corps de 19 jeunes (du groupe) ont été découverts sous les décombres".
- Risque de choléra -
Selon les derniers bilans officiels, le séisme, d'une magnitude de 7,8, suivi de plus d'une centaine de secousses, a fait au moins 22.368 morts, dont 18.991 en Turquie et 3.377 (bilan inchangé depuis jeudi) en Syrie.
L'OMS estime que 23 millions de personnes sont "potentiellement exposées, dont environ cinq millions de personnes vulnérables", et redoute une crise sanitaire majeure qui causerait plus de dommages que le séisme.
Les organisations humanitaires s'inquiètent particulièrement de la propagation du choléra, qui est réapparu en Syrie.
L'UE a envoyé de premiers secours en Turquie quelques heures après le séisme lundi. Mais elle n'a initialement offert qu'une aide minimale à la Syrie par le biais des programmes humanitaires existants, en raison des sanctions internationales en vigueur depuis le début de la guerre civile en 2011.
Mercredi, Damas a officiellement sollicité l'assistance de l'UE. La Commission européenne a demandé aux Etats membres de répondre favorablement.
La Banque mondiale a annoncé jeudi qu'elle apportera une aide de 1,78 milliard de dollars à la Turquie et Washington une enveloppe de 85 millions de dollars à la Turquie et à la Syrie. Le département du Trésor américain a également annoncé la levée temporaire de certaines sanctions imposées à la Syrie, avec l'objectif de voir l'aide être acheminée aussi vite que possible auprès des populations touchées.
La France, dont quatre ressortissants ont péri dans le séisme, débloquera une aide d'urgence à la population syrienne à hauteur de 12 millions d'euros. De son côté, Londres a annoncé jeudi une aide financière supplémentaire d'au moins 3,4 millions d'euros, soit un montant total de près de 4,3 millions d'euros alloués aux Casques Blancs, organisation opérant dans les zones rebelles.
Le président syrien Bachar al-Assad et son épouse Asma se sont rendus vendredi au chevet de victimes du séisme à Alep, pour la première fois depuis le séisme, selon la présidence.
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