Alors qu'une crise sanitaire sans équivalent secoue la planète, lepetitjournal.com est allé à la rencontre des députés des Français de l'étranger. Alexandre Holroyd, député de la 3e circonscription, s'est exprimé sur les conséquences de la pandémie de coronavirus sur les expatriés d'Europe du Nord.
Quelle est la situation dans votre circonscription ?
Alexandre Holroyd - La stratégie de lutte contre le virus est différente d’un pays à l’autre dans ma circonscription. En Islande, le gouvernement a procédé à un dépistage systématique. Au Royaume-Uni et en Suède, en raison d’une forte tradition libérale, la logique de confinement s’est imposée plus tardivement ou selon des modalités non contraignantes.
Sur le plan humain, cette crise a obligé de nombreux compatriotes à rentrer en France, qu’ils soient touristes et/ou étudiants quelquefois dans de conditions très difficiles. Dès le début de la crise et travaillant de concert avec les équipes des consulats et des ambassades dont je tiens à saluer ici la mobilisation exemplaire dans des conditions très compliquées, nous avons mis en place la capacité de soutenir les cas particuliers qui rencontraient des difficultés. Une crise comme celle que nous traversons fait rapidement émerger un grand nombre de situations particulières qui s’ajoutent au défi du rapatriement à grande échelle. Nous essayons de répondre aux besoins de ces premiers tout en réussissant ce deuxième exercice dans la mesure du possible.
Constatez-vous des difficultés particulières rencontrées dans certains pays par les expatriés ?
Il est important de faire la distinction entre Français résidant à l’étranger et Français de passage à l’étranger (touristes, étudiants, voyages d’affaires, etc).
Pour les premiers et dans une circonscription comme l’Europe du Nord, il s’agit avant tout de s’assurer que les pays dans lesquels ils résident mettent en place des mesures sanitaires à la hauteur des enjeux, souvent au travers d’échanges exigeants avec les autorités locales. Il est également essentiel de s’assurer que tous ont accès aux soins qui leur sont nécessaires. Cela peut paraître évident, mais il y a des subtilités d’affiliation aux régimes de sécurité sociale à prendre en compte. Chaque jour, j’échange avec le Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères et ses équipes pour résoudre des problèmes qui me remontent. Urgences absolues et immédiates mises à part, il est nécessaire également d’assurer la continuité de certaine services publics (identité) ou des démarches nécessaires (pour les retraites par exemple). C’est ce à quoi nous travaillons avec l’ensemble des parlementaires élus par les Français résidant hors de France.
Pour les seconds, la fermeture progressive de l’offre commerciale de transport pose un vrai défi. C’est dans ce cadre que le ministère des Affaires étrangères s’est mobilisé pour assurer que certaines routes restent ouvertes le plus longtemps possible, notamment au travers de collaboration avec certains transporteurs aériens.
Constatez-vous des problèmes de rapatriement pour les touristes bloqués sur place ?
La fermeture de liens aériens et ferroviaires est un problème conséquent, par exemple pour rapatrier des touristes en Laponie. À ce stade et grâce au travail titanesque du centre de crise du Quai d’Orsay, ce problème a été en large partie résolu en Europe du Nord. Mais il reste des touristes français qui cherchent à rentrer en France. Ceux-ci doivent impérativement se signaler le plus rapidement possible auprès des consulats et sur Ariane, le service du ministère des Affaires étrangères et du Développement international dédié à cet effet.
Dans ma circonscription, presque tous les pays ont mis en place des mesures économiques fortes pour soutenir leur économie.
Des aides ont-elles été mises en place (ou en négociation) pour aider les entrepreneurs présents dans votre circonscription et pour qu'ils se protègent de cette crise sanitaire qui pourrait se prolonger en crise économique ?
Dans ma circonscription, presque tous les pays ont mis en place des mesures économiques fortes pour soutenir leur économie. Au Danemark par exemple, l'État a pris des mesures d'urgence pour soutenir les PME, les professions indépendantes ainsi que les secteurs vitaux (énergie, eau, médicaments). Autre exemple, en Norvège la TVA a été abaissée de 12% à 8% et son paiement a été repoussé de deux mois pour les entreprises, tout comme l'Impôt sur les sociétés. D’une manière générale, je constate que la coordination européenne a bien fonctionné sous l’impulsion du Président de la République et que le soutien à l’économie est au cœur de la gestion de cette crise. Je serai également attentif à la reprise de l’activité, car il faut déjà se projeter dans l’après. Actuellement missionné par le Premier ministre sur le développement de la finance verte, j’anticipe d’ores et déjà que le plan de relance européen va permettre d’accélérer la transition écologique à tous les niveaux.
Quel message souhaiteriez-vous communiquer à nos lecteurs en cette période difficile ?
D’abord et avant tout que je suis à leurs cotés et à leur disposition dans ce moment difficile.
Ensuite d’implorer chacune et chacun de respecter les règles sanitaires mis en avant par les autorités locales : confinement, distanciation sociale et gestes barrière. C’est seulement ensemble et en respectant celles-ci que nous serons en mesure de surmonter la crise. Comme a pu le dire le Président de la République, cette crise sanitaire est un test pour notre solidarité, notre Etat-Providence et notre vivre-ensemble. Nous sommes dans une situation inédite ou chacun est responsable de l'autre dans ses déplacements, ses précautions. C’est aussi une situation ou un petit geste de solidarité peut avoir un impact immense sur la vie des plus fragiles d’entre nous.
Enfin, quand cette crise se finira, viendra l'heure d’en tirer des conclusions : la relocalisation de certaines activités stratégiques, la sanctuarisation de certains services qui avaient été sous-traités, parfois à l'étranger, la valorisation de la solidarité et de l'entraide dans notre pays.
Ce que nous vivons est inédit depuis la Seconde Guerre mondiale, la réponse publique doit être ambitieuse et adaptée aux enjeux de notre temps. Je suis convaincu que nous saurons apprendre de cette crise pour mettre à l’agenda les enjeux qui jusqu’à présent n’étaient pas partagé par tous.