Le déconfinement s’organise, les frontières des pays rouvrent, mais qu’en est-il des étudiants qui doivent partir étudier à l’étranger pour le semestre d’automne ? Si les perspectives restent encore floues, nous avons interrogé les grandes écoles pour savoir comment elles envisageaient la reprise des échanges.
Après l’annonce du confinement, la majorité des jeunes en mobilité à l’étranger ont été rapatriés en France. Quant à d’autres, ils ont opté pour une mobilité virtuelle. Les déplacements au sein de l’espace Schengen reprennent de plus belle, permettant aux étudiants, Français et internationaux, d’entrevoir des perspectives de départs à l’étranger pour la rentrée prochaine.
Partir étudier à l’étranger : pour le premier semestre 2020 ou pour plus tard ?
Partir ou ne pas partir à l’étranger ? La question de la mobilité pour la rentrée prochaine est au cœur des préoccupations des étudiants et pour cause, faut-il encore pouvoir obtenir un visa ou ne pas se voir refuser l’entrée aux frontières d’un pays.
Comme nous l’a confié Richard Perrin, directeur international de l’EDHEC Business School : "De nombreux étudiants ont choisi de rejoindre une école pour les opportunités à l’international qu’elle offre comme, par exemple, la possibilité d’effectuer un double diplôme." EDHEC Business School s’est engagée auprès de ses étudiants des programmes BBA et Master afin qu’ils puissent partir à l’étranger réaliser une mobilité en toute sécurité. Ces échanges seront toutefois effectués s’ils regroupent trois conditions : la possibilité d’obtenir la lettre d’acceptation de l’école partenaire, la recommandation du ministère des Affaires étrangères qui évalue la situation épidémiologique de chaque pays et la faisabilité d’obtenir un visa si le pays d’accueil est situé hors de la zone Schengen. Les jeunes qui obtiendront un visa avant la mi-juillet pourront s’envoler pour l’étranger. Richard Perrin, nous a précisé : "Nous attendons de voir la capacité des chancelleries à absorber la demande de visas des étudiants qui va être très forte."
HEC Montréal qui collabore avec 141 partenaires situés dans 44 pays, a choisi de reporter les mobilités de ses "étudiants sortants" pour le semestre d’hiver. Faustine Chevet, directrice du Bureau Europe d’HEC Montréal, nous a confié : "Certains étudiants nous ont demandé de repousser leur mobilité au semestre d’hiver, en janvier 2021, tandis que d’autres, ont préféré la reporter à l’année prochaine." À l’issue de la crise sanitaire, ces jeunes souhaitent pouvoir saisir plus d’opportunités et avoir accès aux différentes destinations proposées par l’école. Dès janvier 2021, environ 450 étudiants d’HEC Montréal partiront à l’étranger étudier. Quant aux étudiants qui réalisent un double diplôme, par exemple, à l’Université Bocconi à Milan, à EM Lyon en France, à l’ESCP Business School en France ou encore à l’Université de Melbourne, ils pourront continuer à suivre un enseignement en classe.
Pour la rentrée de septembre, les 7 campus de SKEMA Business School présents dans le monde seront ouverts et des mesures de distanciation sociale seront appliquées au sein de chaque classe. L’école de commerce a décidé de repousser la rentrée scolaire de deux semaines afin de faciliter les déplacements de ses ses étudiants sur les différents campus. Les cours débuteront le 14 septembre. Patrice Houdayer, directeur des Programmes, de l'International et de la Vie étudiante à SKEMA Business School nous a confié "Jusqu’à aujourd’hui, nos campus sont ouverts, conditionnés aux décisions gouvernementales de réouverture des frontières, à l’octroi des visas et à la croissance des liaisons aériennes."
Des départs encore incertains selon les destinations visées
Les frontières extérieures de l'espace Schengen sont rouvertes, cependant certaines universités intra-européennes ont choisi d’annuler leurs mobilités étudiantes, comme c’est le cas des universités hollandaises. Dans des pays où le virus est encore fortement présent, comme aux États-Unis, en Amérique latine et en Inde, il est encore difficile d’imaginer des prochains départs pour les étudiants.
En Europe, l’IÉSEG a décidé de maintenir l’ensemble de ses échanges afin que les étudiants puissent bénéficier d’une expérience professionnelle à l’étranger. En Corée du Sud, au Japon et en Chine, en accord avec les partenaires de l’IÉSEG, les mobilités étudiantes seront réalisables. En revanche, en Amérique du Sud, "la décision a été bilatérale" nous a expliqué Antonio Giangreco. En dépit de la forte propagation de la pandémie mondiale de Covid-19, les étudiants ne pourront pas être accueillis. Les universités partenaires proposent toutefois aux jeunes de réaliser une mobilité virtuelle. En septembre, les étudiants pourront commencer leur échange en ligne, puis, par la suite se rendre dans le pays d’accueil pour continuer l’enseignement en physique. Antonio Giangreco nous a expliqué que grâce au réseau de l’école et dans la mesure du possible, "nous avons trouvé des places supplémentaires au sein de nos partenaires européens pour réaffecter certains étudiants qui souhaitaient réaliser une mobilité au premier semestre."
SKEMA Business School, qui émet ses propres visas étudiants aux États-Unis, n’est pas impactée par la décision prise récemment par Donald Trump de geler de nombreux visas jusqu’à 2021. Patrice Houdayer nous a expliqué "Nous pouvons délivrer des lettres d’invitation, le certificat d'éligibilité I-20, qui permet aux étudiants de se rendre au consulat pour obtenir le visa F-1." En revanche, l’école de commerce mettra en place des mesures sanitaires strictes pour assurer la sécurité de ses étudiants.
Flexible, hybride ou à distance, l’âge d’or de l’enseignement
Les écoles du supérieur se préparent à toutes les alternatives possibles pour assurer une continuité pédagogique auprès des étudiants qui réalisent une mobilité, à travers l’utilisation de plateformes ou de logiciels numériques.
SKEMA Business School a prévu de mettre en place un enseignement hybride et flexible. Patrice Houdayer a précisé "Si à la mi-septembre dans un pays précis, la situation épidémique est favorable, nous augmenterons le nombre d’interactions. À l’inverse, si nous sommes sur des pics de propagation du virus, nous mettrons en place plus d’enseignement à distance." Les cours seront systématiquement enregistrés pour que tous les étudiants, quel que soit le fuseau horaire puissent y avoir accès. Les rythmes d’apprentissage seront différents puisqu’un équipement spécifique sera disposé dans chaque salle et les enseignants interagiront avec des étudiants en face-à-face et à distance.
L'IÉSEG prévoit également de se réajuster quotidiennement selon l'évolution de la situation. Antonio Giangreco a affirmé "Nous sommes prêts à toutes les solutions possibles. Nous pourrons revenir à un enseignement en présentiel dès qu’il n’y aura plus la problématique de la distanciation sociale. S’il y a cette nécessité, nous ferons de l’enseignement hybride, à distance et en physique selon les exigences pédagogiques." Seulement dans le cas d'un autre confinement, IÉSEG prévoit de faire de l’enseignement 100 % en ligne.
Une trentaine d’"étudiants entrants" d’HEC Montréal, pourront réaliser un échange sur la base de cours en ligne. "Certains partenaires nous ont confié qu’ils n’avaient pas les moyens de reporter la mobilité de certains étudiants puisqu’ils sont en dernière année d’étude." a précisé Faustine Chevet. Ces jeunes sont désireux de se confronter à un nouveau modèle d’enseignement en choisissant HEC Montréal : la pédagogie inversée. Les étudiants sont autonomes, ils se préparent en amont du cours en consultant les lectures et les capsules vidéo afin de pouvoir manier et appliquer les concepts pendant le cours synchrone. Faustine Chevet a affirmé : "C’est souvent ce que les étudiants viennent chercher car c'est une approche différente."
Une cinquantaine d’universités partenaires de l’EDHEC ont choisi d'annuler les mobilités étudiantes, tandis qu’une trentaine proposent un dispositif d’enseignement 100% en ligne. Celui-ci permettra aux étudiants d’effectuer leur semestre avec l’université partenaire de leur choix depuis la France. "Pour la première fois, nous avons validé le suivi d’un semestre exclusivement en ligne." nous a confié Richard Perrin.
Le retour des étudiants internationaux ?
Le ministère des Affaires étrangères a annoncé que les étudiants internationaux seront désormais autorisés sur le territoire français, quel que soit leur pays d’origine. Leurs modalités d’accueil seront même favorisées, ainsi, leurs demandes de visas ou de titres de séjours seront traitées en priorité.
SKEMA Business School a 40% d’étudiants internationaux avec 120 nationalités différentes, principalement de nationalités chinoise, indienne et marocaine. Selon Patrice Houdayer, le second point à surveiller est "la manière dont l’ensemble des pays vont réouvrir leurs frontières pour l’arrivée des étudiants internationaux." Il poursuit : "Nous attendons avec impatience la décision du gouvernement américain par rapport à la réouverture du consulat, même chose pour le Brésil, pour la Chine et pour l’Afrique du Sud."
Pour l’ensemble des étudiants internationaux souhaitant suivre les programmes de EDHEC Business School dès le semestre d’automne, l’école de commerce a mis en place un dispositif de blended-learning. Ce modèle pédagogique couvrira des cours en physique, des cours à distance et des projets de groupes réalisés à distance et en présentiel. "Nous avons identifié les masters où nous avions le plus d’étudiants internationaux ou d’étudiants en échange. Nous allons être en capacité de proposer 100% du premier semestre en ligne." L'enseignement se réalisera en asynchrone et en synchrone via l’outil Collaborate Ultra de Blackboard.
Partir à l’étranger doit être fait avec sérénité et aucun étudiant ne doit se sentir obligé de partir. Malgré la crise sanitaire, une étude réalisée par QS World University Rankings relève que 90 % des étudiants européens restent déterminés à l’idée de partir étudier à l’étranger. "Les étudiants sont impatients de reprendre "une vie normale" et de pouvoir bénéficier pleinement des propositions d’échanges à l’étranger." a affirmé Faustine Chevet.