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Yves Bigot (TV5MONDE/Fondation AF) - « L’anxiété était planétaire »

yves bigot TV5MONDE Fondation Alliances Françaisesyves bigot TV5MONDE Fondation Alliances Françaises
Écrit par Damien Bouhours
Publié le 22 juillet 2020, mis à jour le 22 juillet 2020

C’est fort de sa double casquette de directeur général de TV5MONDE et président de la Fondation des Alliances françaises qu’Yves Bigot a accepté de nous parler des conséquences de la crise pour ces deux acteurs majeurs de la Francophonie. Alors que TV5MONDE se développe, le réseau  des Alliances françaises accuse le coup.

 

Comment s’organisent les équipes de TV5MONDE pendant cette pandémie ?

Nous commençons à revenir à peu près à la normale. Nous avons vécu quatre mois compliqués puisque tout le monde était en télétravail pour respecter les mesures de sécurité sanitaire. Cela nous a amené à réduire assez drastiquement notre nombre de productions. Nous avons pu les reprendre progressivement depuis la mi-mai. Mais nous n’avons repris la totalité de nos productions que depuis le 10 juillet. Cela a été difficile. Nous continuons à appliquer toutes les mesures de sécurité sanitaires : le masque, le gel et la distanciation sociale. Nous avons installé du Plexiglas dans les régies de production, de diffusion ou dans les open-spaces. Mais nous ne sommes toujours pas revenus à la situation d’avant la mi-mars.

 

Nous sommes plus forts quand nous sommes ensemble

 

La mission d’information est essentielle pendant une telle crise. Quelles leçons peuvent tirer les médias de cette période ?

Nous pouvons en tirer beaucoup. Nous avons vu combien tous nos services et programmes numériques ont explosé dans leur consommation. Nous avons eu un pic phénoménal pendant la deuxième quinzaine du mois de mars. Nous l’avons constaté en Afrique mais pas uniquement. L’anxiété était planétaire. Les personnes se sont connectées à tous nos services numériques pour essayer de comprendre ce qu’elles avaient à craindre et surtout ce qu’il y avait à faire pour lutter contre la pandémie.

Nous avons également appris que le télétravail a ses avantages mais qu’il est très compliqué de travailler de manière isolée. La télévision reste un travail collectif. Nous avons besoin d’échanger des idées, de s’appuyer sur la connaissance des autres et surtout d’avoir un dynamisme commun. Cette présence crée l’émulation et nous voyons bien que nous sommes plus forts quand nous sommes ensemble.

 

Quels sont les prochains projets de développement de TV5MONDE ?

Nous lançons le 9 septembre prochain la plateforme francophone mondiale TV5MONDEplus. Cette plateforme sera gratuite. Nous travaillons depuis trois ans sur ce projet. Nous sommes heureux d’avoir réussi malgré la pandémie, le télétravail et les handicaps que cela représentait, à maintenir cette date de lancement.

 

En tant que président de la Fondation des Alliances Françaises, pouvez-vous nous parler de la situation des Alliances françaises à travers le monde ?

La situation est très délicate bien qu’elle soit diverse dans le réseau. Il y a 838 alliances présentes dans 132 pays avec des modèles différents. Une grosse centaine d’Alliances se retrouvent aujourd’hui en réelle difficulté, même en France. L’Alliance Française de Lyon a dû licencier les deux tiers de son personnel. Il y a un certain nombre d’alliances en situation difficile aux Etats-Unis, en Russie ou au Brésil. La plupart des Alliances ont été très réactives et ont passé leurs cours en numérique mais certaines prestations n’ont pu être facturées comme les examens et les certifications.

La Fondation des Alliances Françaises les aide à travers des échanges d’expériences ou de modèles existants dans le réseau notamment sur la numérisation. Notre rôle est surtout de remonter leurs besoins, qui sont spécifiques à chacune, auprès du Quai d’Orsay qui, lui, peut intervenir. La situation est délicate pour toutes les Alliances qui n’avaient pas d’avance de trésorerie ou qui étaient déjà sur la corde au niveau budgétaire.

 

Craignez-vous des fermetures ?

Je redoute qu’on ait dans les semaines qui viennent à entériner la fermeture de certaines Alliances. Le mois dernier, nous avons pourtant validé la création de six nouvelles Alliances. Le président souhaitait que l’on crée 10 nouvelles Alliances par an. Nous ne sommes pas loin pour ce qui est des créations mais malheureusement nous allons devoir assister à un certain nombre de fermetures pour des raisons économiques.

 

Nous sommes l’interprète des 838 alliances dans le monde

 

Des aides sont évoquées par certains parlementaires pour venir en aide au réseau culturel à l’étranger. Quelles sont vos attentes ?

Nous sommes très heureux que des parlementaires notamment ceux des Français de l’étranger, se préoccupent de la situation des Alliances françaises dans le monde. Nous ne pouvons qu’encourager ces initiatives. Nous laissons faire le travail des parlementaires en relation avec le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. La Fondation des Alliances françaises est là pour apporter des informations très précises sur la réalité de la situation de chacune de ces Alliances. En fonction des pays, les législations locales et le montage des Alliances ne sont pas les mêmes. Nous sommes l’interprète des 838 Alliances dans le monde auprès des pouvoirs publics français.

 

Le facteur humain est toujours un plus

 

Est-ce que cette période a également permis aux Alliances d’innover dans leur diffusion de la langue et de la culture françaises ?

Oui bien sûr, ne serait-ce car elles avaient le dos au mur. Le numérique est formidable et a permis à tout le monde de pouvoir continuer à fonctionner pendant cette période terrible de laquelle nous ne sommes pas encore sortis. Notre Congrès annuel des Alliances, qui devait se tenir en octobre, est repoussé à 2021. Nous ne pouvons toujours pas fixer la date par manque de visibilité sur l’évolution du virus mais nous allons également tenir un congrès numérique à des dates différentes en fonction des six grandes zones de notre réseau des Alliances françaises. Rien ne remplace pourtant le présentiel. Le facteur humain est toujours un plus que le numérique ne peut changer.