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EcoTree, la start-up qui révolutionne l’investissement forestier

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Thomas Norman Canguilhem
Écrit par Bénédicte Wagner
Publié le 15 novembre 2020, mis à jour le 27 avril 2021

Entretien avec Thomas Norman Canguilhem, co-fondateur et chargé du développement international de la start-up française EcoTree, implantée au Danemark depuis un an, qui propose aux particuliers et aux entreprises d’investir dans les arbres.

 

Forêt investissement arbre EcoTree
Forêt de Pézarches  © EcoTree

 

Pourriez-vous vous présenter brièvement et présenter EcoTree, son activité, son fonctionnement et ses actions?

Je suis franco-autrichien, danois d’adoption et installé depuis quelques années au Danemark. Je suis l’un des cinq associés fondateurs d’EcoTree. J’ai rejoint l’aventure un peu après son lancement et je suis en charge du développement international d’EcoTree, que je pilote depuis Copenhague.

EcoTree a démarré en 2016, avec la proposition alors - et toujours, d’ailleurs ! - unique d’investir dans la propriété d’arbres. L’idée était vraiment de permettre à tout un chacun, particuliers comme entreprises, d’investir dans la forêt avec un bénéfice et un retour sur investissement. Notre fonctionnement est original et se distingue du système classique du don philanthropique : avec notre modèle de gestion forestière, non seulement les propriétaires des arbres ont un impact écologique positif, ils touchent à quelque chose de tangible - leur(s) arbre(s) -, mais ils récupèrent aussi 100% du produit de la coupe.

C’est en digitalisant ce modèle, que l’on est parvenu à populariser et rendre cet investissement accessible à tous, sans distinction, avec différentes offres.

 

Quelles sont, justement, les offres proposées par EcoTree aux particuliers qui voudraient investir dans une forêt ?

Avec EcoTree, le prix d’entrée d’un arbre est d’une quinzaine d’euros, si l’on souhaite n’en acheter qu’un. C’est aussi ce qui rend notre offre unique : on propose d’acheter des arbres à l’unité. C’est la distinction qui existe entre droit du sol et droit de superficie qui rend cela possible. En effet, un arbre, de facto, est considéré juridiquement comme un bien meuble par anticipation. Concrètement, cela signifie qu’on peut le détacher du droit du sol et donc le proposer à la vente en ligne. C’est ce qui permet à EcoTree de vendre des arbres à l’unité et donc de démocratiser l’investissement forestier - qui existe par ailleurs depuis des dizaines d’années, mais sous d’autres formes, souvent par l’achat du foncier, de parcelles, et seulement pour un nombre réduit d’investisseurs.

Contrairement aux micro-contributions d’un ou deux euros qui posent problème, parce qu’elles ne soutiennent pas le système forestier et ne peuvent pas garantir une gestion sur le long terme, les offres d’EcoTree prennent en compte l’importance du travail d’entretien et de suivi de la vie de l’arbre. Ce sont donc environ 40% du prix de vente de l’arbre qui sont consacrés à la garantie de sa gestion dans la durée.

Au cœur de l’activité d’EcoTree, il y a la gestion forestière et la plantation d’arbres. On parle beaucoup, à l’heure actuelle, de CO2 et de séquestration de CO2, mais EcoTree a en réalité 3 objectifs environnementaux, au-delà au de la gestion et de la plantation :

- capturer du CO2

- préserver la biodiversité - par exemple, on ne fait pas de monocultures ultra-intensives, et on laisse aussi des zones en lisière

- pouvoir produire du bois d’œuvre, matériau qui vient en remplacement de l’acier, du plastique, par exemple, dans les domaines de la construction, de la décoration, de l’ameublement, etc. On a alors un ultime impact environnemental avec ce matériau plus respectueux de l’environnement.

On a ainsi un vrai bénéfice environnemental, qui va au-delà de la simple plantation d’un arbre et de la gestion d’une forêt.

 

Forêt langonnet investissement Ecotree
Forêt de Langonnet  © EcoTree

 

Lorsque l’on acquiert un ou des arbres, peut-on suivre leur croissance, aller les voir…?

Oui, le rapport avec son ou ses arbres est au cœur de notre proposition de valeur. On s’engage pour l’environnement, on a un retour sur investissement, on retient du CO2, mais l’idée est aussi d’être local et d’avoir la possibilité de visiter sa forêt. On n’a pas un arbre nominatif, c’est vrai, notamment pour des raisons juridiques : il y a des risques naturels (tempêtes, desséchement, etc.), donc EcoTree propose une mutualisation naturelle et un partage des revenus au prorata des investissements. Mais les arbres sont géo-localisés de façon assez précise et on peut facilement identifier la zone où il y a son ou ses arbres.

EcoTree essaie d’accompagner cela, y compris pour les personnes qui ne peuvent pas forcément se déplacer, avec un univers digital qu’on développe constamment. On peut géo-localiser son arbre, suivre sa croissance et nous sommes en train de tester Forest View, qui fonctionne un peu comme Google View, pour se promener en 3D dans nos forêts. EcoTree est par ailleurs en train d’installer des capteurs pour mesurer les flux de sève dans les arbres, pour que notre communauté visualise le vivant. On a aussi des capteurs pour flasher les animaux qui passent près de nos arbres, comme les chevreuils. Nous sommes très présents sur les réseaux sociaux et nous avons aussi mis en place des modules d’e-learning, pour intéresser notre communauté à notre action et à la vie des forêts.

Cela plaît et notre communauté est assez active ! On compte 35 000 particuliers, plus de 600 entreprises, de la PME bretonne à H&M France, et on a un très bon taux d’engagement des newsletters. On a même fait une étude internationale qui a relevé que pour plus d’un tiers des particuliers, l’achat d’arbres avec EcoTree est leur premier engagement concret en faveur de l’environnement. Cela nous encourage et nous conforte dans l’idée que le lien entre les bonnes intentions et l’action tangible est important.

 

Quel est le lien particulier d’EcoTree avec le Danemark ?

Pour la petite histoire, cette idée d’investir dans les forêts a germé en 2014 à Kerteminde, en Fionie. Deux des cofondateurs d’EcoTree ont une grand-mère danoise et ils viennent régulièrement passer des vacances au Danemark. En 2014, ils ont découvert le système de consigne des canettes et des bouteilles en plastique, qui n’existe plus en France, et ils se sont rendu compte que le Danemark, la Suède et l’Allemagne étaient à plus de 90% de retour des canettes et bouteilles usagées - 92% pour le Danemark, pour être précis ! Techniquement, s’il n’y a pas de véritable retour sur investissement, on y trouve néanmoins un petit avantage financier. Ce modèle de la consigne les a inspirés et l’idée de l’appliquer à la plantation d’arbres a fait son chemin : l’un des fondateurs d’EcoTree étant forestier, ils se sont mis à imaginer l’application de cette méthode de récompense, dont l’efficacité n’était plus à prouver, à l’investissement forestier. Plutôt que de sanctionner une conduite qui ne serait pas écologique selon une logique punitive - on a souvent tendance à montrer du doigt ce qui ne va pas ou à imposer des taxes, ce qui peut décourager -, les fondateurs d’EcoTree ont fait le pari, comme dans ce modèle de la consigne, de récompenser ceux qui adoptent une démarche écologiquement vertueuse. C’est cette philosophie, qui a toujours été au cœur du projet d’EcoTree, qui a fait le succès de notre entreprise.

Et il y a un an, nous avons effectué un « retour aux sources », pour le développement international d’EcoTree, puisque nous avons ouvert un bureau à Copenhague ! Aujourd’hui, nous sommes une dizaine de personnes, avec à la fois un segment dédié aux particuliers, et un segment entreprises. Notre objectif est de démarcher différentes cibles au sein d’un axe nordique qui comprend la Scandinavie, la Grande-Bretagne et le Benelux.

Copenhague était une évidence, à la fois symboliquement, d’un point de vue géographique, puisqu’elle est assez centrale par rapport à notre axe nordique, mais aussi parce qu’on y trouve de nombreux profils internationaux. Notre équipe au Danemark compte ainsi plusieurs nationalités : Anglais, Suédois, Danois, Français et Néerlandais, et chacun est amené à développer et démarcher une zone différente.

 

Quel accueil les Danois, entreprises comme particuliers, ont-il réservé à EcoTree depuis son arrivée à Copenhague il y a un an ?

Nous avons reçu un excellent accueil, dès le début ! Les Danois sont très sensibles à la question écologique et se sont montrés très enthousiastes, notre modèle leur plaît. Nous avons d’ailleurs récemment obtenu un prix, le SDG (Sustainable Development Goal) Tech Awards, dans la catégorie « Public Choice ». C’est vraiment de le remporter dans cette catégorie qui nous a fait le plus plaisir. Pour nous, c’est la confirmation qu’il y a une appétence pour ce qu’EcoTree propose. Nous sommes aussi en lice pour d’autres prix pour la région.

Côté entreprises, plusieurs acteurs danois nous ont déjà apporté leur soutien : par exemple Telia, qui est très engagée dans la sustainability, ou encore Green Mobility avec lesquels nous avons conclu un partenariat en septembre. Green Mobility a mesuré les économies en CO2 que fait leur clientèle en utilisant leurs véhicules, et a doublé ces résultats en achetant des arbres avec EcoTree. Nous avons aussi régulièrement des discussions avec des bureaux d’architectes, avec des banques et des fonds basés ici, et oui, on peut dire que l’accueil est bon !

 

À l’heure actuelle, EcoTree est-elle propriétaire de forêts ailleurs qu’en France - au Danemark, par exemple ?

Pour l’instant, ce sont uniquement des forêts françaises. EcoTree est propriétaire du foncier pour la plupart d’entre elles. Dans notre démarche de développement international, la première étape est de proposer notre modèle et notre offre française à une clientèle internationale. Mais l’idée, à terme, est bel et bien de proposer des arbres locaux à chaque marché : des arbres danois à des Danois, britanniques à des Britanniques, et ainsi de suite. Et c’est en cours, justement !

On a commencé, comme on a l’a évoqué, par le marché nordique, mais EcoTree souhaite se lancer ensuite sur le marché germanophone (Allemagne, Suisse et Autriche), et dans un troisième temps, se tourner vers les pays de langue anglo-saxonne ou le reste de l’Europe.

 

La crise du coronavirus a-t-elle eu un impact, négatif ou peut-être même positif, sur l’activité d’EcoTree ?

Sur le segment des entreprises, la crise a ralenti les discussions qu’on pouvait avoir, surtout pour des raisons de restructuration ou d’adaptations à faire de leur côté, qui les ont beaucoup mobilisées ces derniers mois. Mais nous sommes assez confiants.

Côté particuliers, en revanche, il y a eu une vraie prise de conscience de l’importance d’un modèle d’action comme le nôtre. Le confinement nous a paradoxalement aidés à être très présents et à accompagner nos clients.

 

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Forêt de Pézarches  © EcoTree

 

Enfin, une dernière question, un peu plus anecdotique : puisqu’ici nous avons encore le droit de nous promener au grand air, quelle est votre forêt préférée pour vous ressourcer au Danemark ?

Près de Copenhague, j’aime beaucoup Dyrehaven ! C’est une forêt très particulière parce qu’on y trouve aussi des espaces non boisés, des arbres anciens, on a une grande proximité avec la faune, et tout le monde y est très respectueux. Je trouve que c’est un très bel exemple, assez unique, de forêt.

Et sinon, sans hésiter, les forêts de Fionie, autour de Kerteminde !

 

Encore un grand merci à Thomas Norman Canguilhem pour le temps qu’il m’a consacré.

Envie d’en savoir plus ou d’investir dans une forêt gérée durablement ?

Retrouvez toute l’actualité d’EcoTree ici.

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