Après plusieurs années de vie à Bangkok, plusieurs francophones ont fait le choix de quitter la capitale pour Chiang Mai, un choix sans regret.
Surnommée la Rose du Nord, Chiang Mai est souvent considérée comme le cœur culturel et spirituel de la Thaïlande. Avec son abondance de temples, son artisanat, ses charmants cafés, ses musées et galeries, ses centres commerciaux et ses marchés, ses universités, Chiang Mai est une ville vibrante et dynamique.
En janvier 2021, le magazine Condé Nast Traveller publiait son classement des villes les plus conviviales au monde et sans surprise, Chiang Mai y prenait la première position.
Selon le magazine, “Chiang Mai est une ville où les habitants commencent à vous reconnaître après quelques jours et à vous saluer, où vous pouvez vous attendre à devenir ami avec le marchand de thé du coin de la rue dès le 2ème jour. Peu importe que vous savouriez la cuisine de rue ou que vous exploriez la vieille ville, vous rencontrerez toujours des gens sympathiques et accueillants”.
Pas étonnant dès lors que de nombreux étrangers aient fait de la Rose du Nord leur ville d’accueil. Selon les estimations, Chiang Mai accueille près de 40.000 expatriés toutes nationalités confondues. Parmi eux, l’ambassade de France en Thaïlande compte 765 Français résidents à Chiang Mai inscrits sur ses registres.
Lepetitjournal.com a interrogé des francophones, dont un Thaïlandais, pour comprendre les raisons qui les ont poussés à quitter Bangkok pour s’installer à Chiang Mai.
Un coup de foudre pour Chiang Mai
“Lors d’un week-end à Chiang Mai, nous avons eu un véritable coup de foudre pour la ville”, explique d’emblée, Franck Davinière, propriétaire du restaurant Triplets Eat & Play à Chiang Mai.
Après avoir vécu pendant 9 ans à Bangkok à travailler dans le marketing et l'organisation de séminaires sur la fiscalité et le droit, Franck s’est installé à Chiang Mai en 2016. “Pendant près de 30 ans, j’étais dans le monde des affaires en mode costume-cravate. À Chiang Mai, j’avais envie de faire autre chose et j’ai décidé d’ouvrir un restaurant avec une plaine de jeux. En fait, c’est surtout en devenant père que j’ai choisi de quitter Bangkok, que ce soit en termes de coût pour l’éducation ou de temps passer dans les transports pour aller à l’école, Bangkok n’est vraiment pas une ville pour eux”, ajoute le père de triplés.
Séduit par la qualité de vie à Chiang Mai, la facilité pour circuler et pour se retrouver en quelques minutes dans la montagne ou la campagne ainsi que par les prix moins élevés qu’à la capitale, Franck reste convaincu de son choix et ne s’imagine plus du tout revenir à une vie citadine malgré la pollution ici. “Le smog à Chiang Mai, c’est deux ou trois mois intenses, mais le reste du temps, c’est formidable. Je pense que c’est un problème qui finira par trouver une solution d’ici deux ou trois ans, en attendant tu portes un masque pendant cette période”, relativise-t-il.
Chiang Mai, une ville relax
Après des études de chimie à Paris, Marc Hagelauer a pris une année sabbatique pour voyager. Passant d’un pays à un autre, il a finalement posé ses valises à Bangkok en 1994 où il fonde en 1998 sa compagnie Food by Phone. “Au moment où s’est posé la question de quitter Bangkok, mes filles étaient encore à l’école et donc ce n’était pas envisageable de les faire changer d’écoles mais dès qu’elles sont parties étudier à l’étranger, la montagne a gagné sur la mer et nous sommes venus à Chiang Mai en 2019. Et quand le besoin de voir la plage se fait sentir, des vacances en bord de mer deux ou trois fois par an suffisent”, explique ce Parisien franco-britannique de 52 ans.
Pour l’homme d'affaires, Chiang Mai rassemble tout ce qu’il aime de la Thaïlande sans les inconvénients de Bangkok. “La beauté des paysages, la gentillesse des locaux, la variété des choix de nourriture, tout me plaît à Chiang Mai! Alors qu’à Bangkok, on est confronté à la pollution sonore, le manque d’espaces verts et le stress des habitants. Les Thaïlandais de Bangkok sont là pour le travail, pour l’argent, ils sont loin de chez eux alors que les Thaïlandais de Chiang Mai sont chez eux, en famille, ils sont plus relax”, ajoute Marc.
Heureux de son choix, Marc ne s’imagine pas retourner à Bangkok même s’il continue d’y aller pour des raisons professionnelles et pour y voir des amis. Face au seul point noir de Chiang Mai, la pollution atmosphérique saisonnière, Marc a opté pour la résilience : “c’est dérangeant mais d’une certaine manière nous l’avons acceptée, on ferme les portes et les fenêtres, on fait tourner le purificateur d’air et la vie continue”.
Ville à échelle humaine
Après avoir travaillé dans l’immobilier et la restauration pendant 9 ans à Bangkok, Xavier Bruzaud-Grille s’est installé à Chiang Mai en 2010 alors qu’il était dans une période de transition. “J’en avais marre du trafic, de perdre mon temps dans les trajets même si j’avais un chauffeur et l'Internet dans mon van. J’ai toujours essayé de calibrer ma vie en fonction du temps passé dans les transports. Être coincé dans la circulation, c’est une perte de temps et c’est anti-écologique. De plus, je ne me voyais pas élever mon enfant à Bangkok, je me voyais mal lui imposer des trajets interminables pour aller à l’école. Je voulais un cadre plus sain et une ville à échelle humaine”, confie le quadragénaire qui s’est depuis reconverti dans la permaculture, une passion qui était latente depuis son enfance.
Un climat agréable, une population accueillante bien que Chiang Mai soit une ville touristique, la possibilité de trouver tout ce dont un passionné de bricolage a besoin, une situation bien placée avec des liaisons régulières pour Bangkok ou d’autres villes de Thaïlande sont les atouts de Chiang Mai, selon Xavier.
La seule raison qui pourrait le faire revenir à Bangkok, ce sont ses amis qui habitent toujours dans la capitale. La pollution fait également partie des points noirs. “La seule chose qui me fait regretter de vivre à Chiang Mai et pour laquelle je ne suis pas confiant, c’est la pollution. Je pense qu’à terme, elle va s’estomper, mais on risque de morfler pendant encore 10 ans! La période des brûlis est de plus en plus longue, si ça continue, j’envisage d’adapter mon activité et de vivre ailleurs une partie de l’année”, conclut-il.
Ville de culture
“Je me suis éloigné de la ville parce que je voulais être au plus près de la nature”, raconte Wisit “Lek” Jivakul. Originaire de Bangkok, Lek a passé 40 ans dans la capitale avant de déménager à Chiang Mai avec sa famille en 2017.
“J’ai commencé à travailler à Bangkok, car professionnellement, à l’époque, je n’avais pas vraiment le choix. Mais de nos jours, ma méthode de travail à beaucoup changé avec le développement d’Internet et je n’ai pas de problème à réaliser des projets pour Bangkok ou Koh Samui depuis Chiang Mai”, détaille l’architecte francophone qui a étudié pendant 4 ans en France à Lyon et à Paris.
Avant de poser ses valises à Chiang Mai, Lek a hésité avec Khao Yai pour son côté montagneux, la qualité de l’air et la nature, mais l’aspect culturel et la présence d’un aéroport ont fait penché la balance pour la Rose du Nord. “J’aime aller en ville pour voir une exposition, visiter un temple et manger dans un bon restaurant et, même s’il y a quelques embouteillages à Chiang Mai, ce n’est rien en comparaison à Bangkok”, termine le père de famille qui continue de se rendre à Bangkok tous les mois pour son travail.
Scène artistique
Le besoin d’un changement de rythme et de projet professionnel ont poussé Myrtille Tibayrenc à quitter Bangkok, -après y avoir vécu pendant 12 ans-, à s’installer à Mae Rim, au nord de Chiang Mai. “Depuis 2017, j’expose régulièrement mes œuvres d’art, ce qui demande du calme et du temps à soi pour créer. La nature me manquait cruellement, pour moi, elle marche main dans la main avec l’art”, commente la curatrice et fondatrice de la galerie d’art Toot Yung.
Tout comme Lek, Myrtille a été attirée par le côté culturel de Chiang Mai : “la ville a un potentiel artistique comme en témoigne le fait que de nombreux artistes s’y soient installés”.
Cette jeune quadragénaire était venue initialement pour ouvrir son centre d’art, Toot Yung, à Mae Rim. Celui-ci a fermé ses portes en février 2021 sans pour autant lui donner l’envie de quitter son écrin de verdure. “Je ne pourrais plus vivre à Bangkok, je me suis trop adaptée à la volupté du quotidien de la campagne de Chiang Mai et j’y plonge mes racines chaque jour davantage. J’ai d’ailleurs acheté un terrain avec mon mari, le sculpteur Haritorn Akarapat, pour y construire notre maison et notre atelier”, détaille l’artiste.
Si la solitude, le calme et la nature ainsi que la proximité avec Bangkok grâce aux liaisons aériennes sont les atouts principaux pour Myrtille, elle pointe dans les aspects négatifs la pollution et l’utilisation intempestive des pesticides dans les champs.