Originaire de Chine, le thé est introduit en Europe par les colons à l’époque des Grandes Découvertes. Les Portugais puis les Hollandais, en rapportant la petite feuille de leurs pérégrinations, vont lancer une vraie passion en Angleterre.
Avant le thé, la vogue du café en Europe
Et voilà en effet qu’avec la Renaissance, les voyages de découvertes et les missions religieuses, les premiers Européens entrent dans la danse. Le contact se fait d’abord par le truchement des missionnaires portugais puis des marchands hollandais. Dès 1606, la première cargaison de thé est attestée d
ans le port d’Amsterdam.
Or, les Anglais ont découvert entre temps le café et montent leurs premières maisons pour déguster la boisson dans le dédale de ruelles de la City de Londres. Une jolie pancarte bleue rappelle d’ailleurs le flair de Rose Pasqua, ce Grec d’origine qui ouvrit sur St Michael Cornhill la première de ces maisons de café : le premier café donc.
Ces maisons deviendront bien vite des lieux d’échange. L’un de ces cafetiers, M. Lloyd a même l’idée de transformer sa maison de café en lieu d’échanges d’informations financières.
Du coup, il faut attirer. Rien de tel pour cela que la nouveauté. Rapidement, les Anglais flairent la bonne affaire dans ces feuilles qui parfument l’eau chaude. Un certain Thomas Garway annonce le nouveau breuvage magique. En dépit des peurs du corps médical, la mode prend, d’abord mollement. Puis aidée par le mariage de Charles II en 1662, elle s’empare des élites. La mariée, Catherine de Bragance, une princesse portugaise, ne se déplace pas sans son thé et lance la vogue. Elle apporte aussi dans sa dot Bom Bahia, comptoir portugais qui deviendra Bombay.
Les Anglais et la vogue naissante du thé
Les Anglais se lancent alors dans une course poursuite pour accaparer ce commerce qui promet d’être lucratif. Ils suppriment le monopole hollandais et créent leur Compagnie des Indes orientales.
Puis, ils fondent sur la production chinoise. Ils en profitent pour taxer considérablement cette denrée de luxe que s’arrache l’aristocratie anglaise. Exaspérés par cette politique de taxation sur leur boisson, les Bostoniens décident de la boycotter. Cet épisode de désobéissance civile en 1773 annonce la guerre d’indépendance américaine.
Surtout, face à la croissance du marché, la qualité de la marchandise baisse. Parallèlement, la Chine, en situation de monopole, augmente ses tarifs. En Angleterre, où le thé reste très taxé, la contrebande bat son plein. Pour la contrer, le gouvernement Pitt décide d’abaisser ses tarifs douaniers et légifère avec la fameuse loi de 1784. Le prix du thé baisse et la consommation britannique explose.
Le thé et le reste : lait, sucre, boites précieuses et services à thé
Jusque-là, le thé restait un produit de luxe. Dans les bonnes maisons, il était conservé dans des boites précieuses et consommé dans des services de plus en plus sophistiqués et raffinés. Les manufactures de porcelaine et de poteries se développaient à mesure que le gout du thé s’affirmait. La Manufacture de Wedgwood est un exemple
Les feuilles de thé étaient si couteuses qu’on les réutilisait d’abord dans les étages nobles, puis à la cuisine chez les domestiques et à mesure que leur parfum s’estompait, elles descendaient l’échelle sociale. Ce ruissellement du thé, si l’on peut dire, permit peu à peu à l’ensemble de la société britannique de s’habituer à cette boisson exotique. Et à mesure que les Anglais prenaient gout au thé, ils l’accompagnaient d’une consommation croissante de sucre, en provenance cette fois des Antilles.
La vogue du thé en Angleterre s’accompagna ainsi de changements dans la façon de le boire, non plus pulvérisé mais infusé et accompagné du lait crémeux anglais et du sucre d’Amérique. La consommation augmentant, le besoin de récipients s’accrut et fut à l’origine du développement local de services à thé fabriqués localement.
Tout cela coutant fort cher, les Anglais conçurent peu à peu l’idée d’échapper au monopole chinois et de créer leurs propres réseaux de thé.
Prochain épisode : "L'Inde entre en scène"
Du XVIe au XVIIIe siècle, les Anglais se prennent d’amour pour le thé qu’ils sont obligés d’aller chercher en Chine et souvent de payer au prix fort. Pour éviter de déséquilibrer leur précieuse balance des changes, les Britanniques prennent pied en Inde au moyen de leurs comptoirs de St George (Madras), Fort William (Calcutta) et Bombay...