Être femme, être née dans une famille pauvre d’une tribu de l’Odisha, voilà au moins deux handicaps pour devenir Présidente de la République indienne.
Et pourtant, c’est chose faite depuis le 25 juillet 2022, date à laquelle Droupadi Murmu a prêté serment pour être la 15ième présidente de la république indienne.
Emotions lors de l’intronisation de Draupadi Murmu
La cérémonie, ouverte par vingt et un coups de canon, s’est tenue dans la grande salle du parlement à Delhi. Vêtue du sari traditionnel de son village, Droupadi Murmu a commencé son discours par un « Johar », le mot de bienvenue des tribus d’Odisha et du Chhattisgarh.
Ses premières paroles ont été pour les siens :
C’est une grande satisfaction de voir ceux qui ont été dégradés pendant des siècles, écartés du progrès et du développement, les pauvres, les opprimés, les laisser pour compte, les membres des tribus, se reconnaitre en moi.
La nouvelle présidente a affirmé que son élection n’était pas une victoire personnelle, mais la victoire de la démocratie qui a porté au plus niveau de l’Etat une femme née dans une famille pauvre et tribale.
Elle a salué son prédécesseur Ram Nath Kovind, lui-même né « intouchable ».
Qui est Droupadi Murmu ?
Droupadi Murmu a 64 ans. Elle est née dans un petit village de l’Odisha. Sa famille fait partie de l’ethnie « Santhal ». Les Santhals sont originaires de l’Est de l’Inde dans l’actuel état du Jharkhand. Leur langue, le Santali, serait parlée par 6 millions de personnes, dispersées sur une bonne partie de l’Est et du Nord de l’Inde (West Bengal, Jharkhand, Odisha et Bihar).
Les Santhals sont aujourd’hui connus pour leurs magnifiques peintures, en particulier les rouleaux de dessins qui racontent les histoires et la mythologie de la communauté.
Droupadi Murmu est née dans un contexte où suivre des études pour une jeune fille ne pouvait être qu’un rêve. A force d’obstination, elle a pourtant suivi un cursus universitaire et commencé sa carrière comme institutrice.
De 2000 à 2009, elle est élue membre de l’assemblée législative d’Odisha (MLA). Elle devint ensuite gouverneur du Jharkhand de 2015 à 2021.
Son entrée en politique a été favorisée par la loi de 1992. D’une part, cette loi a permis la mise en place d’institutions élues au niveau des municipalités, les Panchayats, avec des sièges réservés à des candidats issus de communautés défavorisées (les Scheduled castes). D’autre part, la même loi a fixé un quota minimum d’un tiers de femmes dans les assemblées. Trente ans après, l’impact est visible. Vingt états ont même étendu le quota minimum de femmes passant d’un tiers à 50 %. En septembre 2020, 45,6 % des 3 187 320 personnes élues dans les municipalités indiennes étaient des femmes.
Pendant sa mission de gouverneur du Jharkhand, Droupadi Murmu s’est illustrée en s’opposant à un projet de loi permettant de « commercialiser » les terres des tribus.
Soutenue par le BJP (ndlr : le parti de Narendra Modi), Droupadi Murmu a largement battu son adversaire, pour être élue avec 64 % des voix.
Selon les politologues, cette victoire est un moyen pour Narendra Modi d’attirer les voix des communautés tribales lors de la prochaine élection de 2024.
Quels rôles a le(a) président(e) de la république indienne ?
Le(a) président(e) de la république indienne est élu(e) pour cinq ans par les parlementaires des chambres haute et basse ainsi que par les membres des assemblées législatives des Etats et Territoires.
Officiellement, le(a) président(e) dispose du pouvoir exécutif et du commandement suprême des armées. Cependant, son rôle est essentiellement honorifique, car l’article 74 de la constitution déclare qu’il n’agit que sur l’avis du conseil des ministres dirigé par le Premier ministre. Le Président nomme le Premier ministre, mais la loi l’oblige à choisir la personne qui disposera de la majorité à la chambre basse du Parlement (la Lok Sabha).
En clair, les pouvoirs du Président(e) sont très limités.
Dans son discours d’installation, Droupadi Murmu a parlé de la nécessité de préserver l’environnement.
Je suis née dans un milieu tribal traditionnel qui vit en harmonie avec la nature depuis des milliers d’années. J’ai réalisé l’importance des forêts et de l’eau. Nous utilisons les ressources de la nature, mais ce doit être dans le respect et l’équilibre. C’est un impératif aujourd’hui.
Espérons qu’elle usera de sa position pour influencer les décisions du Premier ministre en faveur de la protection de l’environnement.
Jagdeep Shankar, nouveau Vice-président de la république indienne
Le 6 août 2022, Jagdeep Shankar a été élu 14ième vice président de l’Inde par un collège électoral qui comprend des membres des deux chambres du Parlement (la Lok Sabha et la Rajya Sabha). Il était auparavant gouverneur de l’Etat du Bengale occidental, où il a entretenu des relations très tendues avec la ministre en chef du Bengale occidental, Mamata Banerjee. Celle-ci l'avait accusé d'interférer dans le processus décisionnel d'un gouvernement d'État élu et avait également demandé à de multiples reprises qu'il soit retiré.
Le vice-président est mandaté par la constitution pour agir en tant que président ex officio de la chambre haute du Parlement (Rajya Sabha). Le président préside la chambre, dirige ses travaux et rend des décisions sur les questions de désaccord et de friction entre les bancs de l'opposition et du Trésor au sein de la chambre.
Le vice-président agit en tant que chancelier de toutes les universités centrales en Inde. L’anniversaire du premier vice-président de l'Inde, le Dr Sarvepalli Radhakrishnan, né le 5 septembre et qui est devenu plus tard le deuxième président de l’Inde, est célébré comme la Journée des enseignants.
President Droupadi Murmu administered oath of Office of Vice President to Shri Jagdeep Dhankhar at a Swearing-in-Ceremony at Rashtrapati Bhavan pic.twitter.com/Vrum223CXj
— President of India (@rashtrapatibhvn) August 11, 2022