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Au Cambodge, il est temps de nourrir ses morts

Avant la grande fête de Pchum Ben, les Cambodgiens observent le Bei Ben, une période de quatorze jours marquée par des offrandes aux moines et aux esprits des défunts. Entre traditions bouddhistes et croyances populaires, ces rituels nourrissent symboliquement les âmes errantes et renforcent le lien entre vivants et ancêtres.

bei benbei ben
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Écrit par Raphaël FERRY
Publié le 9 septembre 2025

Au Cambodge, la fête de Pchum Ben est l’un des moments les plus sacrés de l’année. Souvent appelée la Fête des Morts, elle dure quinze jours et trouve son apogée lors du dernier jour, célébré dans tout le pays. Mais avant cette grande journée, se déroule une période essentielle appelée Bei Ben (ou Kan Ben), au cours de laquelle les Cambodgiens rendent hommage aux esprits de leurs défunts.

Une tradition profondément enracinée

Selon la tradition bouddhiste khmère, les âmes des morts, en particulier celles qui n’ont pas trouvé la paix, reviennent errer parmi les vivants pendant cette période. Les cérémonies de Bei Ben, qui s’étendent sur quatorze jours, sont l’occasion pour les familles de leur venir en aide.

Chaque nuit, les fidèles se rendent dans une pagode différente, apportant nourriture et offrandes aux moines. Le mets le plus emblématique sont de petites boulettes de riz gluant. Celles-ci sont offertes aux moines mais aussi déposées à l’extérieur, ou jetées au sol, afin que les esprits errants puissent s’en nourrir.

Des rites particuliers dans les pagodes

Les cérémonies du Bei Ben ne se limitent pas aux offrandes. La nuit, les fidèles effectuent des processions autour des pagodes, souvent en silence, en déposant des boulettes de riz à chaque tour. On croit que ces gestes permettent aux âmes affamées de trouver la nourriture laissée à leur intention. Les fidèles déposent également des plats traditionnels sur les autels et brûlent de l’encens pour guider les esprits dans l’obscurité.

Ces rituels nocturnes confèrent au Bei Ben une atmosphère à la fois solennelle et mystérieuse, où la frontière entre le monde visible et celui des esprits semble s’effacer.

Nourrir les fantômes et accumuler des mérites

Ce geste symbolique exprime une croyance essentielle : les vivants peuvent transférer leurs mérites (bon karma) aux défunts. Nourrir les esprits, c’est leur offrir non seulement de la nourriture mais aussi une libération temporaire de leurs souffrances.

Les Cambodgiens croient également qu’un ancêtre privé d’offrandes peut se sentir oublié et provoquer le malheur. En accomplissant ces rituels, les familles assurent la protection spirituelle des vivants tout en honorant la mémoire des disparus.

Le point culminant : Pchum Ben

Le quinzième jour marque le sommet de cette période : le Pchum Ben proprement dit. Ce jour-là, toutes les familles se retrouvent dans les pagodes pour des prières solennelles et des offrandes collectives. C’est un moment de rassemblement national où s’exprime la solidarité entre générations et le respect des ancêtres.

Une fête à la croisée du bouddhisme et des traditions populaires

Si Pchum Ben est une célébration bouddhiste, ses pratiques révèlent une fusion entre la doctrine religieuse et des croyances populaires liées aux esprits. Elle illustre la manière dont les Cambodgiens conçoivent la continuité entre les mondes des morts et des vivants.

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