Surtout connu et visité par les touristes, le Marché Russe de Phnom Penh est dans une passe difficile depuis la crise du Covid-19 et l'arrêt du tourisme international.
Un marché d'Asie
Situé dans le sud de la capitale, près des boulevards Monivong et Mao Tse Toung, le Marché Russe, connu des habitants comme le Phsar Tuol Tompoung, est habituellement une visite incontournable des touristes séjournant dans la capitale cambodgienne. Il est à Phnom Penh ce que Cha Tuk Chak, le marché du week-end, est à Bangkok. A la grosse différence que le Marché Russe est ouvert tous les jours. On y trouve de l'outillage, comme cette boutique qui ne vend que des boulons et écrous, des colorants à peintures, des produits électriques, des contenants de toutes formes, mais ce secteur est peu fréquenté par les touristes. Les visiteurs étrangers y viennent pour les tissus, les vêtements, souvent des invendus de marques fabriqués au Cambodge, et bien sûr des souvenirs de toutes natures, bibelots, antiquités plus ou moins vraies, bijoux et objets en argent, vanneries, objets artisanaux en bois et autres poteries, encens, soieries. Un marché comme tous les touristes du monde aiment à parcourir, pour y fouiner et acheter en marchandant l'objet à rapporter, pour soi-même ou pour offrir. On peut naturellement y boire et y manger, de la nourriture locale comme des produits étrangers.
Frappés par la crise, les vendeurs attendent
Malheureusement, le Phsar Tuol Tompoung est aujourd'hui l'ombre de lui-même. Les allées autrefois emplies de foules sont désertes ou presque, les échoppes encore ouvertes emplies de marchandise invendue, et nombre d'entre elles affichent sur leurs rideaux fermés des panneaux annonçant la vente ou la location de ce qui était il y a encore quelques mois un magasin de souvenirs ou une bijouterie. L'absence de touristes se fait cruellement sentir, en particulier pour tous les commerçants dont ils représentent l'essentiel de la clientèle. Chim Pary vend des tissus de soie, de lin ou de coton, et particulièrement des vêtements de type artisanal. On trouve dans sa petite échoppe des vêtements de grande et très grande taille, clairement destinés aux touristes occidentaux. « J'ai perdu depuis le Covid environ 90% de mon chiffre d'affaires. Ce que je gagne aujourd'hui couvre tout juste les frais de la boutique, confie-t-elle, et je ne vends presque plus rien car les touristes n'arrivent plus. » Elle déclare avoir fait deux ventes en tout et pour tout au mois de juillet. Selon elle, il est inutile d'espérer voir se résoudre la crise avant 2021.
Garder confiance et sourire, la sagesse khmère
Sa voisine, Lim Sotheary, présente sur le Marché Russe depuis 1982, tient un vrai petit magasin climatisé où elle propose des bijoux en argent, au détail ou en gros. Elle parvient à garder son lumineux sourire malgré les difficultés qu'elle évoque. « Je vendais surtout aux Singapouriens, Canadiens, Malaisiens et Français, qui se fournissent chez moi pour de la revente dans leurs pays. Mais c'est fini, et mes réserves débordent de stock, parce que j'avais beaucoup commandé comme à l'ordinaire » déclare Lim. Elle arrive à rester confiante, même si la situation est grave. « Bien sûr, c'est très difficile. Mais je reste confiante, car tout cela devra bien finir. Sans doute à la fin de cette année ou au début de l'an prochain. Il faut attendre » ajoute-t-elle en souriant. Elle parvient même, sur le pas de sa boutique, à rendre un peu le sourire à sa voisine. En attendant, profiter des allées désertes du Marché Russe, aller fouiner et marchander, dépenser quelques milliers de riels, c'est tout à la fois le plaisir habituel de chiner et se faire plaisir, mais aussi un moyen d'aider ces petits commerces et artisans qui font tout le charme de Phnom Penh à vivre et dépasser ce moment difficile.