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LIVRES – Roberto Garcia Saez : l’humanitaire et le bling-bling sont-ils compatibles ?

Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 1 mars 2012, mis à jour le 15 novembre 2012

Peut-on conduire une Jaguar et travailler honnêtement dans le monde de l'humanitaire ? C'est la question que pose Roberto Garcia Saez dans ONU soit qui mal y pense, premier roman plein d'humour et inspiré d'une histoire vraie. L'auteur, de passage à Phnom Penh pour une signature, nous explique sa démarche : faire connaître le système onusien au grand public.

Roman à clefs lorgnant vers le polar, Onu soit qui mal y pense oppose deux personnages hauts en couleur. D'un côté, Patrick Romero, quadra un poil flambeur et missionné sur un gros programme de lutte contre le Sida en Afrique, dont les méthodes ressemblent davantage à celles d'un chef d'entreprise. De l'autre côté, Paul Harrisson, un flic carré et plutôt rigide, dont l'obsession est de chasser les corrompus du milieu. Persuadé de la culpabilité de Romero, celui-ci se met à le traquer?

''C'est une histoire qui m'est vraiment arrivé, explique Roberto Garcia. Un policier de l'unité anti-corruption de Scotland Yard est remonté jusqu'au Congo, où je travaillais à l'époque. Il est tombé sur mon nom, un peu partout dans la presse. Et il a cru qu'il tenait là son affaire Dreyfus.'' Le contenu de l'ordinateur de Roberto Garcia est alors réquisitionné à son insu par les services de police. Après avoir décortiqué et (mal) interprété ses emails, même les plus personnels, le policier en charge de l'enquête rédige un rapport accusateur de trente pages. Roberto Garcia ne le découvrira que quelques mois plus tard, après avoir été évincé sans raison apparente d'une mission de l'ONU. Pas de doute, c'est là une sacrée histoire à raconter...

''Je voulais le rendre plus ambigu : est-ce qu'il a pris du pognon ou pas ?''

Plutôt qu'un récit autobiographique, il a choisi la fiction, une ''forme d'exutoire'', qui permet aussi d'exacerber les caractères de ses deux personnages antinomiques. Ainsi a-t-il voulu faire de Patrick Romero quelqu'un d'amoral et de relativement ambigu. ''Romeo fait bien son boulot, il veut innover. Le reste, il s'en fout. Il peut se payer une jaguar, il le fait.'' Un trait qui est d'ailleurs mis en exergue dans l'adaptation du roman au théâtre (La Jaguar et l'éléphant), et qu'il développera encore davantage dans le tome 2 : ''Je veux le rendre encore plus borderline. Par rapport au sexe, ou à l'argent. Il est encore trop gentil là. Je veux le rendre plus coupable, qu'on se demande : est-ce qu'il a pris du pognon ou pas ?''

S'il tenait à aborder dans son livre le sujet de l'éthique dans l'humanitaire, Roberto Garcia voulait aussi évoquer l'une de ses dérives : ce qu'il appelle la ''dictature de la transparence''. ''Dans toutes les organisations aujourd'hui, il se développe une vraie paranoïa. Les auditeurs aujourd'hui sont des investigateurs. S'il y a des investigateurs à la base, c'est bien sûr qu'il y a de la corruption. Mais de là à faire croire au monde que tout le milieu est corrompu...'' Très pragmatique, il reconnait aussi : ''On travaille dans des pays où il y a des économies parallèles, c'est normal qu'il y ait des choses qui tombent du camion. Moi je préfère que 90% des ressources arrivent, et 10% qui tombent du camion, plutôt que rien du tout.''

Une collection de livre pour parler de l'ONU au grand public

Entendre des idées reçues sur le milieu de l'aide internationale, c'est d'ailleurs l'une des raisons qui ont poussé Roberto Garcia à inclure une dimension pédagogique dans ce premier roman. Et il ne compte pas s'arrêter là. Non seulement Onu soit qui mal y pense sera finalement une trilogie, dont le second tome se déroulera au Cambodge, mais Roberto Garcia lance aussi avec son éditeur une nouvelle collection consacré au sujet : ''On ne proposera que des bouquins s'adressant au grand public et parlant de ce monde-là : de l'Onu, et plus largement du développement.''

Quelque soit leur format, les livres des Editions du Millenium devront donc apporter avant tout des informations claires et justes sur le fonctionnement de l'aide internationale. Roberto Garcia prévient : ''On ne publiera pas de personnes qui veulent juste une revanche personnelle, ni de petites histoires locales. On peut être critique, mais pas de mensonge. On exagère pas outre mesure pour faire du buzz. Et si on doit sortir un scandale, on le sort sans problème, mais on s'appuie sur du solide.''

Les propositions de manuscrits affluent déjà selon Roberto Garcia. Après la littérature spécialisée dans les histoires frivoles de filles (''chick lit''), ou dans les affaires ("Biz-lit"), va-t-on assister à l'essor d'un nouveau genre : l'''humani-lit'' ? Ne manquez pas de venir en discuter avec Roberto Garcia lors de la séance de signature d'Onu soit qui mal y pense, organisée à la librairie Carnets d'Asie, ce samedi 3 mars.

Roberto Garcia, Onu soit qui mal y pense, Éditions des étoiles, 2011.

Séance de dédicace le samedi 3 mars de 10h à 13h et de 15h à 18h00 à la librairie Carnets d'Asie.
Librairie Francophone du Cambodge
Institut Français du Cambodge. 218, rue Kéo Chea (184).
Phnom Penh.
Tel : 012 799 959 / 023 210 421
casiephnompenh@gmail.com

Céline Ngi (http://www.lepetitjournal.com/cambodge) Vendredi 2 mars 2012

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Publié le 1 mars 2012, mis à jour le 15 novembre 2012

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