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FÊTE DES EAUX – Sens et origines de la tradition

Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 3 novembre 2014, mis à jour le 3 novembre 2014

Il est difficile de remonter aux origines de la Fête des Eaux, baptisée ainsi par les Français du temps du Protectorat. Une tradition qui traverse l'Histoire et qui reste la grande fête annuelle.

Les plantes aquatiques du lac du Tonlé Sap quittent le plus grand lac d'eau douce d'Asie du Sud-Est et descendent le fleuve pour rejoindre le Mékong. Le Tonlé Sap coule désormais, jusqu'au mois de mai, du lac vers le Mékong, du nord-ouest vers le sud-est. Ce retournement des eaux est symboliquement ordonné par le roi lors de la Fête des Eaux.

La Fête des Eaux est célébrée dans toute l'Asie du Sud-Est. Au Cambodge, on l'appelle aujourd'hui Bom Om Teuk. Autrefois, les Khmers l'appelaient « thvo bon pranan teuk no » que l'on peut traduire par Fête des joutes des pirogues ou encore « Thvo bon loi pradip » qui signifie fête des feux flottants qui sont en réalité deux parties distinctes de cette tradition. C'est sous le Protectorat que les Français l'ont baptisée Fête des Eaux.

Lors de ce retournement des eaux, le peuple rend hommage aux bienfaits de la terre et de l'eau, synonymes de prospérité pour la culture et la pêche. Les eaux descendantes laissent de riches dépôts nutritifs de sédiment dans la région, ce qui en fait une terre propice à l'agriculture pour le reste de l'année. Certains poissons suivent ce courant, d'autres le remontent parfois jusqu'en Chine.

Entre légende, religion et Histoire

« Il est impossible de savoir aujourd'hui des Cambodgiens à quelle époque il faut faire remonter l'origine de la fête des eaux, et si cette cérémonie est du rituel bouddhique on si elle est un vestige de la vieille croyance brahmanique » écrit Leclère Adhémard dans le Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient  en 1904*.  Il précise « qu'une tradition qui ne comporte aucune date et qui nomme un roi légendaire d'on ne sait quel pays, mais qu'on attribue quelquefois au Cambodge, dit qu'elle fut décidée par un raja (prince) nommé Práh Khvam [?] sur la proposition d'un tuteur du royaume ou premier ministre, très savant et très illustre, dont le nom était Thmé? ?ei. Thmén ?ei est le héros d'une légende bien connue au Cambodge. Ils sont probablement l'un et l'autre des créations littéraires d'origine hindoue, adaptées au goût des Khmers ».

Certains situent plus certainement l'origine de la Fête des Eaux au XIIe siècle, lorsque le roi khmer Jayavarman VII

chassa les Chams, qui avaient envahi le Cambodge et Angkor, lors d'un combat décisif qui eut lieu à l'endroit où il fit édifier plus tard le temple Preah Khan. Ce combat fut une bataille fluviale sur des pirogues de la marine royale.

Leclère Adhémard ajoute dans ce Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient  qu'au cours des trois derniers siècles, donc depuis le XVIe, la Fête des Eaux comporte quatre parties bien distinctes. On pourrait alors supposer qu'il y aurait des traces datant de cette époque. Les quatre parties en question sont : le « thvo bon pranâh tuk ?o », la « fête des courses de pirogues à hautes poupe et proue » ; le « kàt práh pral » ou « coupe de la lanière sainte », qui s'achève par une course d'ensemble à laquelle toutes les pirogues prennent part ; la purification royale? ; le « tlivo bon loi pratip » ou fête des feux flottants.
Ces différentes parties existent encore aujourd'hui. Nous évoquerons dans notre édition de demain, mercredi 5 novembre, la « coupe de la lanière sainte » par le chef des Bakou à la proue de la pirogue royale.

La Fête des Eaux fait ainsi son grand retour depuis 2010, année du drame qui provoqua la mort de 345 personnes (lire notre article au lendemain de la catastrophe ici). L'année suivante, l'édition fut annulée suite à une mousson trop forte. En 2012 également suite à la mort du Roi Père Norodom Sihanouk. L'année dernière, le premier Ministre Hun Sen prétexta une nouvelle fois les intempéries pour annuler la fête. Alors en pleine crise politique avec de grosses manifestations du CNRP, l'homme fort du pays redoutait une foule de plus de 1 million de personnes, dont une bonne partie acquise à l'opposition.
Au cours du XXe siècle, la Fête fut interrompue au gré des affres de l'Histoire. Pendant la seconde guerre mondiale avec un retour en 1946, puis une disparation au début des années 70 pour revenir en 1994.

Le retour de la Fête des Eaux en 1946


Emmanuel SCHEFFER ? www.lepetitjournal.com - Mardi 4 novembre 2014

* Leclère Adhémard. La fête des eaux à Phnom-Penh. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 4, 1904. pp. 120- 130.
Pour lire l'article dans son intégralité, cliquez ici

 

 

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Publié le 3 novembre 2014, mis à jour le 3 novembre 2014

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